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Douleur exquise – Plaisante souffrance

Écrit par Mélanie Thibault, La Grande Époque - Montréal
23.06.2009
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Douleur exquise, un texte de Sophie Calle mis en scène par Brigitte Haentjens et interprété par Anne-Marie Cadieux, était présentée dans le cadre du Carrefour International de Québec qui se terminait samedi dernier. Cette performance d’acteur et de mise en scène est d’un plaisir troublant.

Sur l’écran de la salle du Musée de la civilisation, un objet rare, le film No sex last night de Sophie Calle, relate un road trip avec son amoureux, visiblement peu intéressé par elle. Sans fard ni trompette, nous assistons aux désirs enfouis de cette femme privée de toute relation sexuelle et affective au profit d’une voiture que vénère son amant. L’humour n’est jamais loin de la souffrance chez cette artiste et le duo Haentjens-Cadieux affirme ce paradoxe jusqu’au bout.

La sensibilité féminine n’est pas de la sensiblerie chez Cadieux. Foudroyante, elle ressasse de 35 façons différentes les 99 jours suivant la séparation entre elle et M. C’est avec étonnement – et osons le dire, amusement – que la souffrance est portée sur scène. Le droit de vivre celle-ci semble être accordé au spectateur, ce dernier porté en témoin et participant à cette catharsis de la douleur.

Il faut rendre compte de l’extrême intensité du jeu d’Anne-Marie Cadieux. Un don qu’elle partage avec nous, laide et magnifique à la fois, jamais fausse, toujours troublante. C’est plus qu’un one woman show, c’est un échange conscient qu’effectue l’artiste avec le spectateur sur cet épisode troublant avec toute l’émotion disponible à une situation semblable. L’arrivée parcimonieuse d’autres personnes venant partager leur pire douleur apporte une complexité supplémentaire au sujet amoureux. Cette pièce de théâtre donne, par ses multiples tons, matière à réflexion plutôt que matière à lamentation et c’est là toute sa grandeur.

D’humain à humain, avec ce qu’il y a même de plaisant dans cette divulgation de l’échec amoureux, nous sortons de la salle, curieusement grandis par cet abandon, concernés par ce passage de l’être aimé vers celui de la solitude. À ce titre, je vous conseille un des ouvrages qui a visiblement beaucoup inspiré le spectacle : Fragments d’un discours amoureux de Roland Barthes qui décrit théoriquement ce que Douleur exquise illustre sur scène.

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