Remaniement cosmétique pour Cristina Kirchner en Argentine

Écrit par Aurélien Girard, La Grande Époque
17.07.2009

  • Le maquillage gouvernemental de Cristina Kirchner ne fait pas effet.(DANIEL GARCIA/AFP/Getty Images)(Staff: DANIEL GARCIA / 2009 AFP)

Après sa défaite cinglante aux élections législatives du 28 juin, la présidente argentine Cristina Kirchner a nettoyé la moitié de son cabinet ministériel, sans pour autant convaincre l’opposition et les analystes de la réalité du changement opéré.

Parmi les entrants notables au gouvernement, le nouveau Ministre de l’Economie, Amado Boudou. Celui-ci va devoir s’atteler à réformer l’INDEC, outil de mesure de l’inflation nationale dont la rigueur est largement mise en doute. La réouverture des négociations sur les taxes agricoles, point majeur de discorde avec l’opposition, est également prévu. Le porte-parole de l’AFIP, l’administration des impôts, le confirme indirectement à Bloomberg en disant que «même si les taxes à l’export font partie de notre politique de distribution des richesses, toutes les questions de taxes dans le domaine agricole feront partie du dialogue.»

Un point crucial si on se souvient qu’en 2008, les fermiers argentins ont provoqué des pénuries alimentaires nationales par plusieurs mois de grève musclée contre ces taxes.

A San Miguel de Tucumán où elle participait le  10 juillet à une cérémonie de commémoration de l’indépendance de l’Argentine, Cristina Kirchner a exprimé le souhait de renouer le dialogue : «Nous devons faire démarrer une nouvelle étape pour notre pays, basée sur les principes d’économie, de démocratie et de société» a-t’elle déclaré, reprise par le Buenos Aires Herald. «Le dialogue doit exister dans tous les domaines de l’économie et pas seulement avec les entrepreneurs. Il n’y a plus de place pour les petites discussions isolées : le monde traverse une crise profonde. Sa convalescence demandera un immense effort d’échange d’idées de tous les secteurs. Je soutiens donc une politique de dialogue ouvert, et pas la simple écoute des lobbyistes.»

Mais pour Michael Soltys, analyste au Buenos Aires Herald, la modification du gouvernement «ne change presque rien, ou alors pour le pire.» La nomination d’Amado Boudou est par exemple d’après lui un signal dangereux, le nouveau ministre de l’économie ayant «complètement ruiné la confiance économique» en  mettant la main sur les fonds de pension privés en novembre 2008.

Une analyse largement partagée par la banque d’investissement Barclays Capital pour qui la composition du nouveau gouvernement «confirme que les Kirchner ont ignoré la demande de changement : les nominations suggèrent objectivement qu’ils continuent à sa baser sur leur cercle intérieur et que Nestor Kirchner, bien loin de s’éloigner des décisions économiques et politiques, continuera a agir en coulisses»

Le nouveau premier ministre, Anibal Fernandez, ne rassure pas l’opinion, d’autant que les portefeuilles les plus stratégiques restent aux mains du clan Kirchner – via Julio de Vido, ministre de la planification, et via Guillermo Moreno, secrétaire au commerce, tous deux accusés de la manipulation de l’INDEC.

Les cours des valeurs sud-américaines ont plongé en bloc après l’annonce du remaniement. L’Argentine, rejetée des marchés créditaires mondiaux pour ne pas avoir honoré plus de 100 milliards de dollars de dettes 2002, tente de rétablir la confiance. Mais les mesures économiques du parti péroniste au pouvoir ne convainquent pas. Il a perdu le 28 juin sa majorité dans les deux parlements argentins, et fait face à des pressions de plus en plus fortes de la part des gouvernements provinciaux qui exigeant une part plus importante des ressources nationales.