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Procès des attentats de Trèbes: le sang froid de Julie prise en otage par Radouane Lakdim

janvier 27, 2024 12:30, Last Updated: janvier 27, 2024 12:37
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La musique du supermarché résonne, insistante, dans la salle d’audience. Elle est régulièrement entrecoupée de jingles publicitaires, parfois de « Allah Akbar » criés très fort, pendant une heure de diffusion d’un enregistrement audio surréaliste lors l’attentat de Trèbes en 2018.

« Bonjour madame, je m’appelle Julie, et je suis actuellement, euh, prise en otage par un monsieur armé ». Il est 10h42 ce 23 mars 2018 au début de cet appel aux gendarmes, depuis le super U de Trèbes où Radouane Lakdim, petit délinquant radicalisé de 25 ans, vient de tuer à bout portant le chef-boucher et un client du magasin.

« Ce jour là, j’étais en poste à l’accueil », se souvient vendredi devant la cour d’assises spéciale de Paris Julie L., aujourd’hui 45 ans. « J’entends un premier claquement que j’ai pris pour une palette tombée au sol. Au deuxième claquement, j’ai levé les yeux, j’ai vu un bras en l’air, un tir. »

Elle se cache dans le bureau derrière le stand d’accueil, entend les pas de Radouane Lakdim s’approcher, puis sa voix. « Allez c’est bon, j’ai mon otage. Sors de là, je te ferai pas de mal. Viens, on appelle les flics. »

« Le monsieur dit qu’il est un soldat de l’État islamique »

La suite, on l’entend sur l’enregistrement de l’appel au 17. La gendarme a presque l’air plus paniquée que Julie L., dont le sang-froid tout au long de l’audio impressionne.

– « Il a une arme sur votre tête, il vous menace là ? »

– « Euuh un pistolet, avec un couteau, et deux grenades », répond Julie L..

– « Il est à côté de vous ce monsieur ? »

– « Le monsieur dit qu’il est un soldat de l’État islamique ».

Radouane Lakdim n’y tient plus et se met à hurler dans le combiné : « Vous bombardez mes frères au Mali, en Syrie, en Irak… faut en payer les conséquences. »

La suite est une plongée rare dans le huis clos entre une otage et « un petit con transformé en monstre », comme le décrira Julie L. à la barre.

« Il s’est mis à parler, beaucoup parler, à justifier son action », se souvient l’ex-otage. Sur la bande audio on entend un mélange improbable de propagande de l’organisation terroriste État islamique débitée d’un ton ultra rapide, de musique de supermarché, d’annonces promotionnelles et de prières chantées par l’assaillant. « À travers la baie vitrée, on voyait les gyrophares et les képis des forces de l’ordre. Il était content de lui », se souvient Julie L.

Les gendarmes entrent au loin dans le magasin. Radouane Lakdim les voit, se glisse derrière elle, pointe son pistolet sur sa tempe, son couteau sur côtes, montre-t-elle à la cour. « Je voulais pas la tuer mais là je la tue direct », menace en hurlant d’une voix nerveuse Radouane Lakdim.

« Vous êtes prêt à mourir pour la France ? »

Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame commence à négocier avec lui. Dans la salle d’audience, sa voix est lointaine d’abord, puis plus claire au fur et à mesure qu’il avance vers l’otage, l’assaillant et le téléphone qui enregistre.

– « La petite dame elle y est pour rien, on fait un échange », répète-t-il.

– « Vous voulez que je vous tue à sa place ? »

– « Oui, je préfère. »

« Sérieux ? », répond Radouane Lakdim qu’on sent décontenancé. « Vous êtes sûr ? Vous êtes prêt à mourir pour la France ? »

Pendant une dizaine de minutes, Arnaud Beltrame répète sa demande d’un ton calme, promet qu’il va « pas faire le cow-boy », qu’il l’aidera à faire passer ses messages. « J’ai une grenade », « je suis prêt à mourir tac-tac-tac », prévient Radouane Lakdim, qu’on sent très tendu. « Attention, tu trembles », murmure Julie L., qui a toujours un pistolet braqué sur la tempe.

Arnaud Beltrame entre enfin dans le bureau. Julie L. comprend qu’elle peut partir même si personne ne dit rien. « Je pars doucement, d’accord ? », l’entend-on proposer. Elle sort. Radouane Lakdim sera tué dans l’assaut, après avoir mortellement blessé le gendarme à la gorge à coups de couteau.

« Comment ça s’est passé entre vous et Arnaud Beltrame ? », demande le président à l’ex-otage. « Il ne m’a pas adressé la parole. Je cherchais un signe de sa part mais il m’en a fait absolument aucun », répond Julie L. « Il a fait comme si je n’étais déjà plus là. »

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