Le président du MoDem François Bayrou a été mis en examen vendredi pour complicité de détournement de fonds publics dans l’enquête des assistants d’eurodéputés du MoDem, des poursuites qui pourraient fragiliser sa position au sein de la majorité présidentielle.
A l’issue d’environ dix heures d’interrogatoire au tribunal de Paris, M. Bayrou, 68 ans, a été mis en examen par les juges d’instruction Charlotte Bilger, Bénédicte de Perthuis et Patricia Simon, chargées de cette enquête qui ébranle depuis plusieurs semaines le parti centriste.
Très combatif, il a répondu point par point à toutes les questions qui lui étaient posées, selon des sources concordantes.
« Cette mise en examen, annoncée à l’avance dans les journaux, a été décidée à l’encontre de tous les éléments de preuves produits », a réagi auprès de l’AFP Me Pierre Cornut-Gentille, avocat de M. Bayrou. « La suite de l’instruction démontrera qu’elle est totalement infondée », a-t-il ajouté.
Les magistrates cherchent à déterminer si des assistants parlementaires, qui travaillaient aussi à temps partiel pour le MoDem, ont réellement effectué les tâches financées par les crédits européens ou si ce montage servait à financer frauduleusement la masse salariale du parti.
Elles soupçonnent M. Bayrou d’être responsable de l’ensemble du système présumé reproché au parti centriste.
« Pour cela, il faut des instructions », fait valoir l’entourage du responsable politique. « Or, aucun témoignage, aucun document ne désigne François Bayrou », selon cette source.
Une douzaine de responsables du mouvement ont déjà été mis en examen depuis la mi-novembre dans cette affaire, dont l’ex-eurodéputée Sylvie Goulard, l’ancien garde des Sceaux Michel Mercier ou le directeur financier du parti Alexandre Nardella.
La vice-présidente du MoDem Marielle de Sarnez a été mise en examen mercredi pour « détournement de fonds publics » pour le contrat d’une ancienne assistante. Pour cinq autres contrats suspects, elle a été placée sous le statut intermédiaire de témoin assisté.
L’enquête porte essentiellement sur la législature 2009-2014 mais aussi, dans une moindre mesure, sur les législatures antéieure et postérieure. À ce stade, neuf anciens eurodéputés MoDem se trouvent dans le viseur de la justice.
François Bayrou, qui a toujours nié tout système d’emplois fictifs, a relativisé la semaine dernière ces poursuites, déclarant que « tout le monde » était « mis en examen ou à peu près dans la vie politique française ».
L’ouverture d’une enquête préliminaire du parquet de Paris, en juin 2017, avait entraîné sa démission du poste de ministre de la Justice, de même que celles de Marielle de Sarnez (Affaires européennes) et de Sylvie Goulard (Armées).
Cette affaire, ajoutée à la polémique sur des prestations réalisées pour un think tank américain, a par ailleurs coûté à Sylvie Goulard sa place dans la nouvelle Commission européenne, refusée en octobre par les eurodéputés.
Entendu le 11 septembre par l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), M. Bayrou a insisté sur le fait que les accusations émanaient de personnes en conflit avec le MoDem, évoquant un contexte de vengeance politique.
« Alexandre Nardella avait pris l’initiative d’aller voir chacun des assistants qui étaient également salariés pour leur demander de lui rendre compte s’ils constataient un changement de la répartition effective de leur temps de travail », a-t-il souligné.
« C’est-à-dire qu’ils devaient l’informer s’ils constataient qu’ils travaillaient d’avantage pour l’une ou pour l’autre des deux fonctions que ce qui était prévu », a-t-il poursuivi.
La mise en examen du maire de Pau, qui a fait de l’exemplarité un cheval de bataille, pourrait remettre en question l’équilibre de la majorité, alors que les relations entre LREM et les troupes bayrouistes demeurent contrastées, voire conflictuelles s’agissant de la campagne des municipales.
« François Bayrou a consacré une bonne part de sa vie politique à faire avancer la question de la probité dans la vie politique, c’est une part inhérente de son combat politique », a toutefois souligné vendredi le délégué général de LREM, Stanislas Guerini, disant lui maintenir sa « confiance » et son « admiration ».
Le MoDem n’est pas la seule formation dans le viseur de la justice pour des emplois présumés fictifs au Parlement européen. Des enquêtes similaires ont ainsi été ouvertes pour La France insoumise (LFI) et pour le Front national (FN). Dans cette dernière, une vingtaine de personnes, dont Marine Le Pen, ont été mises en examen.
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