Alors que la Conférence sur la biodiversité (COP 15) s’est ouverte le 7 décembre dernier à Montréal, les médias, ainsi que de nombreux dirigeants et responsables politiques, insistent sur le fait que cette réunion est majeure, car la biodiversité serait en danger. A cette occasion, l’association Action écologie vient de faire paraître une étude intitulée « Biodiversité : faut-il vraiment paniquer ? ».
Rédigée par Bertrand Alliot, environnementaliste, ancien membre du conseil d’administration de la Ligue pour la protection des oiseaux et Christian Lévêque, directeur de recherche honoraire à l’Institut de recherche pour le développement, ce rapport remet en cause le discours catastrophiste et les fausses croyances, tout en revenant sur des faits sciemment mis de côté par les écologistes militants. Nous allons nous attarder sur trois populations considérées dans cette étude, celles des abeilles, des oiseaux et des mammifères.
Une population mondiale d’abeilles en augmentation
Les abeilles et leur extinction, qu’ils tiennent pour probable, sont la marotte des écologistes et des militants se revendiquant de la défense de la biodiversité. Le centre régional d’information pour l’Europe occidentale des Nations Unies nous explique ainsi qu’à cause de l’agriculture intensive et des « pesticides », « le taux d’extinction des abeilles est de 100 à 1000 fois supérieur à la normale ». Et que donc, 35 % des pollinisateurs invertébrés seraient menacés de disparition.
Les auteurs de l’étude d’Action écologie affirment pourtant que les abeilles ne sont pas en danger. Ils démontrent que le nombre de colonies d’abeilles mellifères a augmenté dans le monde de 65 % entre 1960 et 2013 ! En Europe, le nombre de colonies est passé de 22,5 millions en 2005 à 24,1 millions en 2010, soit une augmentation de 7 %.
Il est vrai que les abeilles d’Europe ont connu des surmortalités « anormales » certaines années. Les écologistes accusent les produits phytosanitaires, notamment les néonicotinoïdes, mais les recherches de spécialistes de la question démontrent que le parasite nommé Varroa destructor[1] et le frelon asiatique sont bien plus nocifs. En 2014, une « task force » mise en place par le président américain Barack Obama a établi que les néonicotinoïdes « présentaient peu de risque pour les abeilles s’ils étaient utilisés en suivant les recommandations d’emploi ». En France, leur interdiction ordonnée par Barbara Pompili avait entraîné, dès la première année, des pertes terribles pour les producteurs de betteraves. Ce type d’insecticide a été de nouveau autorisé « temporairement ».
Des oiseaux et des mammifères qui se portent plutôt bien
Le discours dominant dans les médias concernant la biodiversité tendrait à faire croire que de nombreux oiseaux et mammifères voient leur population diminuer. On entend souvent dire que « 30 % des oiseaux ont disparu en 30 ans ». Ce chiffre est en réalité biaisé : c’est une extrapolation erronée qui ne concerne que les oiseaux des milieux agricoles étudiés par le programme STOC (suivi temporel des oiseaux communs) et en effet, depuis le début de son étude en 1989, ces espèces ont diminué de 29,5%. Le programme constate aussi une diminution des espèces en milieux bâtis (27,6 %) et en milieux forestiers (9,7 %). En revanche, les espèces généralistes ont vu leur nombre grimper de 19,4 %.
Le protocole STOC a été revu en 2001 afin d’être plus rigoureux, mais 1989 restant toujours l’année de référence, Bertrand Alliot et Christian Levêque le remettent en cause. Si l’on prend 2001 comme année de base et que l’on compare les données de 2001 avec les plus récentes, alors les espèces des milieux forestiers demeurent stables, les espèces généralistes connaissent la même augmentation de 19 % environ et les espèces des milieux bâtis et agricoles, une diminution de respectivement 5 % et 23 %. Les auteurs de l’étude d’Action écologie ne contestent pas seulement le protocole et l’année de référence, ils critiquent aussi le nombre[2] et le choix des espèces étudiées. Une étude espèce par espèce semblerait plus pertinente, d’autant que de nombreux oiseaux voient leur nombre considérablement augmenter.
En se basant sur les chiffres du programme STOC, les auteurs remarquent que si l’on crée une nouvelle catégorie « oiseaux des milieux humides », on constate une hausse de 91,8 % dans leur population. L’étude fait aussi observer, partant du rapport « Wildlife Comeback in Europe », que 25 espèces d’oiseaux connaissent une grande expansion sur le continent européen, de 470 % en moyenne ! Cela va de 34 % pour la cigogne noire jusqu’à… 5 000 % pour la Bernache nonnette. La communauté des ornithologues s’accorde sur une présence pus forte, en France, de cigognes, de hérons ou d’aigrettes. Certains pourront dire que ces chiffres ne concernent qu’une petite partie de l’ensemble des oiseaux. Pourtant, même le programme STOC reconnaît que 60% des espèces communes étudiées se portent mieux ou sont stables depuis 2001.
Du côté des mammifères, Action écologie nous livre une donnée claire : 78 % des espèces qui résident en France métropolitaine ne sont pas menacées. En ce qui concerne celles qui sont considérée comme « en danger », les auteurs se montrent là aussi sceptiques étant donné que certaines sont difficiles à répertorier, que d’autres ne sont pas originaires de France, ou ont été réintroduites, etc. Ils mettent en lumière l’alarmisme trompeur de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UCIN) et estiment que seules 5 espèces (et non 16 comme l’affirme l’UCIN) seraient réellement en danger sur notre continent, comme le vison d’Europe par exemple. L’étude souligne également la forte augmentation de nombreux animaux européens en reprenant les chiffres du rapport « Wildlife Comeback in Europe » et note « un retour spectaculaire des mammifères sur le continent ».
Le but de cette étude n’est pas de nier le fait qu’une multitude d’insectes et d’animaux sont en déclin, voire en voie de disparation, ni d’affirmer que l’action humaine est exempte de tout reproche. Elle permet simplement de prendre du recul et de se rassurer, via des données scientifiques non-tronquées : la biodiversité sur Terre n’est pas réellement menacée. Toutefois, s’il faut considérer les propos alarmistes avec précaution, il n’en demeure pas moins que certaines espèces réellement en danger méritent, selon les auteurs, que l’on fasse pour elles davantage « d’efforts de conservation ».
Bertrand Alliot et Christian Lévêque rappellent une réalité scientifique majeure dans leur étude : que « toute l’histoire de l’évolution montre que les espèces ont des durées de vie limitées. Les paléontologues estiment que plus de 99% des espèces qui ont existé sur Terre sont éteintes », notamment à cause de changements climatiques parfois violents dont l’Homme n’était pas responsable…
[1] 75 espèces d’oiseaux sont étudiées par le programme STOC (14 pour les espèces généralistes, 24 pour celles des milieux agricoles, 24 pour les oiseaux forestiers et 13 pour les espèces des milieux bâtis).
[2] Le Varroa destructor est une espèce d’acariens parasites de l’abeille originaire de l’Asie du Sud-Est. Avec les échanges internationaux, il s’est propagé dans le monde entier et provoque de grands dégâts dans les ruches.
Article écrit par Aymeric Belaud, avec l’aimable autorisation de l’IREF.
L’IREF est un « think tank » libéral et européen fondé en 2002 par des membres de la société civile issus de milieux académiques et professionnels dans le but de développer la recherche indépendante sur des sujets économiques et fiscaux. L’institut est indépendant de tout parti ou organisation politique. Il refuse le financement public.
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