La décision du Botswana de lever l’interdiction de la chasse aux éléphants a suscité jeudi des réactions passionnées chez les défenseurs de la faune et les habitants de ce pays prisé des amateurs de safari.
Après des mois de réflexion, le gouvernement a annoncé le rétablissement de la chasse en soulignant qu’elle reprendrait « de manière ordonnée et éthique » et que « les animaux en danger » ne seraient pas concernés par cette décision.
Chaque année, moins de 400 éléphants pourront être tués en vertu de permis accordés par les autorités, a précisé le ministère de l’Environnement.
Le Botswana abrite à lui seul un tiers des 415 000 éléphants sauvages d’Afrique.
« Les conflits entre humains et éléphants ont augmenté en nombre et en intensité et affectent de plus en plus les moyens de subsistance » des habitants, a expliqué le gouvernement pour justifier sa décision.
Alors que le commerce d’ivoire menace toujours plus la population d’#éléphant d’Afrique, le Botswana lève l’interdiction de chasser ce pachyderme. Une décision que la Fondation #30millionsdamis condamne. https://t.co/JqZ2bCmyqo
— 30 Millions d’Amis (@30millionsdamis) 23 mai 2019
La chasse des éléphants était interdite au Botswana depuis 2014, à la suite d’une décision du président de l’époque Ian Khama, un fervent défenseur des animaux. Mais des députés du Parti démocratique au Botswana (BDP) au pouvoir ont fait pression pour modifier la loi, estimant que le nombre d’éléphants était devenu ingérable.
La levée du moratoire a suscité l’indignation de plusieurs organisations de défense des animaux.
C’est « scandaleux », a dénoncé Humane Society International, basée à Londres. La population des éléphants du Botswana est « vitale pour la survie régionale de cette espèce emblématique », a-t-elle estimé.
Si le nombre de pachydermes a augmenté dans certaines régions africaines, il a diminué de 111 000 dans le monde en une décennie, surtout en raison du trafic d’ivoire, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN).
« Reprendre la chasse des éléphants suscite des questions morales et va à l’encontre de tous les efforts internationaux pour protéger ces géants, mais en plus cela risque de porter préjudice à la précieuse industrie touristique », l’une des principales ressources du Botswana, a encore prévenu Humane Society International.
« Personne ne peut dire que nous ne sommes pas amoureux de notre faune et notre flore », a répondu le ministre de l’Environnement Kitso Mokaila aux critiques.
« La préservation fait partie de notre ADN au Botswana (…) Notre responsabilité en matière de préservation (de la faune) n’a pas changé », a-t-il assuré.
Le rétablissement de la chasse est « une décision politique qui n’est pas dans l’intérêt de la préservation », a cependant renchéri Jason Bell, du Fonds international pour la protection des animaux (Ifaw), basé aux États-Unis.
« La chasse ne fera rien pour réduire le conflit entre les humains et les éléphants. On doit s’interroger sur les raisons pour lesquelles la chasse des éléphants est rétablie », a-t-il ajouté.
Elephant Management #BatswanaFirst #HumanWildlifeConflictIsReal ???? https://t.co/j5lvaiRIYF via @YouTube
— Botswana Government (@BWGovernment) 23 mai 2019
La décision de Gaborone pourrait se révéler populaire auprès des électeurs ruraux à cinq mois de la présidentielle, où le sortant Mokgweetsi Masisi, au pouvoir depuis 2018, se représente.
Sur le terrain, l’ONG locale Chobe Enclave Conservation Trust, qui regroupe cinq villages du nord du pays, s’en réjouit.
« Nous sommes très contents », a expliqué son président, Amos Mabuku. « On veut remercier le gouvernement de nous avoir entendus (…). On a perdu des frères, des champs, notre bétail », à cause des animaux sauvages.
M. Mabuku a également souligné l’importance économique des chasses organisées pour les amateurs de trophée.
La chasse à l’éléphant de nouveau autorisé au Botswana ! le pays, longtemps exemplaire dans la lutte contre le braconnage, est critiqué pour une décision qui paraît très cynique! Le collectif s’oppose fermement à la reprise de cette chasse abominable, et appel à un sursaut ! pic.twitter.com/fqJcrLP3Uh
— Nos Animaux vus du SIEL (@VusNos) 24 mai 2019
Avant son interdiction, Chobe Enclave Conservation Trust engrangeait 6,5 millions de pula (534 000 euros) par an. Depuis, ses revenus ont chuté à 2 millions (164 000 euros).
La chasse sera rétablie dans des zones dûment désignées et plus de la moitié des permis sera accordée aux organisations travaillant en étroite collaboration avec la population locale, a précisé le ministère de l’Environnement.
« Les trophées offrent une opportunité de revenus qui sont reversés aux communautés locales », a confirmé Tom Milliken, consultant pour l’ONG Traffic basée au Royaume-Uni. « Si on veut conserver de grandes étendues avec des animaux comme les éléphants, il est essentiel d’avoir les communautés locales de son côté », a-t-il insisté.
Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a également souligné les avantages de la chasse, à condition qu’elle soit très encadrée.
« Dans certains cas rigoureusement contrôlés, notamment des espèces menacées, les preuves scientifiques montrent que le chasse peut être un moyen efficace de conservation » de la faune, a estimé l’ONG.
D. S avec AFP
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