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Bouteflika parti, les Algériens dans la rue pour un 7e vendredi consécutif

avril 5, 2019 6:19, Last Updated: avril 5, 2019 6:26
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La démission d’Abdelaziz Bouteflika, arrachée dans la semaine, n’est qu’une « demi-victoire » pour les Algériens qui entendent manifester à nouveau en masse pour un septième vendredi consécutif, afin de chasser le « système » du pouvoir et empêcher les anciens fidèles du président déchu de gérer la transition.

Sur les réseaux sociaux, depuis le départ de M. Bouteflika, le néologisme « vendredire », inventé par les contestataires et signifiant « manifester joyeusement », a acquis un sens supplémentaire: « faire chuter un régime dictatorial pacifiquement ». Les appels à « vendredire » n’y ont pas pour autant cessé avec un nouveau mot d’ordre: chasser les « 3B », Abdelkader Bensalah, Tayeb Belaiz et Noureddine Bedoui, trois hommes-clés de l’appareil mis en place par Bouteflika et à qui la Constitution confie les rênes du processus d’intérim.

Président depuis plus de 16 ans du Conseil de la Nation (chambre haute) par la grâce de M. Bouteflika, Abdelkader Bensalah est chargé de le remplacer pour trois mois à la tête de l’Etat, le temps d’organiser une présidentielle. Tayeb Belaiz, qui fut 16 ans ministre, quasiment sans interruption, préside pour la deuxième fois de sa carrière le Conseil constitutionnel, chargé de contrôler la régularité du scrutin.

Le Premier ministre Noureddine Bedoui était jusqu’à sa nomination le 11 mars le très zélé ministre de l’Intérieur, « ingénieur en chef de la fraude électorale et ennemi des libertés », comme le qualifie le quotidien francophone El Watan jeudi. Tous trois ont toujours servi fidèlement M. Bouteflika, rappellent leurs détracteurs.

« Notre victoire est partielle. Les Algériennes et les Algériens n’accepteront pas que des symboles du régime tels qu’Abdelkader Bensalah  ou le Premier ministre conduisent la période d’intérim et organisent les prochaines élections », a souligné dans une vidéo postée en ligne l’avocat Mustapha Bouchachi, une des voix de la contestation. « Ces symboles du régime ne peuvent pas être une partie de la solution, et nous avons réclamé depuis le 22 février que tout le système, ses symboles et ses clientèles partent. La démission du président ne signifie pas qu’on a eu réellement gain de cause », a-t-il poursuivi.

Me Bouchachi a appelé les Algériens à « continuer » à manifester « jusqu’à leur départ à tous » ajoutant que « vendredi doit être un grand jour ». Jeudi, les bureaux des deux chambres du Parlement se sont réunis pour organiser la session parlementaire prévue par la Constitution dans la cadre de la mise en place de l’intérim. Mais aucune date n’était toujours fixée, plus de 48 heures après la démission du chef de l’Etat.

« S’en tenir à la Constitution » et confier l’intérim et l’organisation des élections à des hommes incarnant le système déchu, « va probablement susciter pas mal de protestations, les contestataires doutant que les élections soient équitables  et libres », estime Isabelle Werenfels, chercheuse associée à l’Institut allemand pour les Affaires internationales et de Sécurité (SWP). Les contestataires réclament à la place la mise sur pied d’institutions de transition, à même de réformer le pays et d’organiser notamment un cadre juridique garantissant des élections libres.

Conscient, le gouvernement donne des gages. Il a notamment enjoint les citoyens à créer des partis et des associations, les invitant même à prendre rendez-vous par téléphone au ministère de l’Intérieur, quand ces mêmes partis et associations peinaient auparavant à obtenir les agréments indispensables. « L’après Bouteflika n’est pas clair. La rue et les partis » d’opposition « appellent à une nouvelle Constitution, une nouvelle loi électorale », souligne Hamza Meddeb, chercheur sur le Moyen-Orient à l’Institut universitaire européen (EUI) de Florence.

L’Algérie entre dans « la phase la plus délicate, car la rue et les institutions risquent de se diviser », estime-t-il. Grand vainqueur de son bras de fer avec l’entourage de Bouteflika, qu’il a contraint in fine à quitter le pouvoir, le général Ahmed Gaïd Salah, chef d’état-major de l’armée, apparaît comme l’homme fort du pays actuellement.

Mais, souligne Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et méditerranéen à Genève, « la rue algérienne est devenue le nouvel acteur dans la vie politique algérienne » et « on ne connaît pas grand-chose des intentions de l’armée concernant la gestion de l’après Bouteflika ». D’autant que le général Gaïd Salah est lui aussi largement perçu par les manifestants comme un homme du « système » Bouteflika qu’il a fidèlement servi depuis sa nomination par le président à la tête de l’armée en 2004, avant de le lâcher ces derniers jours.

D.C avec AFP

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