Brexit : la Banque du Canada est plus prudente en raison de l’incertitude

juillet 17, 2016 21:56, Last Updated: juillet 17, 2016 21:56
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OTTAWA – La Banque du Canada a révisé à la baisse sa prévision de croissance économique le 13 juillet principalement en raison du Brexit, mais elle a conservé son taux directeur à 0,5 % étant donné les perspectives d’inflation qui demeurent les mêmes qu’auparavant.

La décision du Royaume-Uni de quitter l’Union européenne génère plus d’incertitude dans l’économie mondiale. L’analyse de la banque centrale tient compte des effets directs sur le commerce. Toutefois, il est difficile d’anticiper les implications de l’éventuelle relation du Royaume-Uni avec l’Europe.

Le gouverneur de la Banque du Canada, Stephen Poloz, affirme que les risques concernant le nouvel arrangement ne sont pas quantifiables. Il est impossible de savoir comment les entreprises seront affectées.

« Il est encore tôt pour comprendre les conséquences du choc », affirme M. Poloz.

Ce dernier explique que les entreprises tolèrent moins le risque depuis la crise financière et ainsi elles n’investissent pas au même niveau à travers le monde.

« Cette incertitude a maintenant une autre raison de se répandre davantage », explique M. Poloz.

Cette incertitude a maintenant une autre raison de se répandre davantage.

Stephen Poloz, gouverneur de la Banque du Canada

En juin dernier, les marchés se sont fait prendre en penchant du mauvais côté en prévoyant l’échec du Brexit, et une réappréciation violente des marchés financiers a eu lieu. Le signe encourageant est que les marchés ont assez bien réagi, contrairement à septembre 2008 lorsque Lehman Brothers a fait faillite.

« Il y a eu des gestes importants. Les marchés ont bien réagi, ils n’ont pas été perturbés, il n’y a pas eu d’interruption, alors je pense que c’est un bon test pour voir comment les marchés peuvent fonctionner lors d’un évènement imprévu », estime M. Poloz. Brexit a été comme une véritable mise à l’épreuve confirmant que le système financier international a réussi.

« On pouvait constater certains des avantages [des exigences pour des banques] pour un plus haut capital et plus de liquidités qui ont été mis en place à travers le monde », mentionne la première sous-gouverneure Carolyn Wilkins.

Dans son Rapport sur la politique monétaire de juillet, la Banque du Canada (BdC) indique que l’incertitude prolongée en raison du Brexit « pèse déjà sur la confiance et donnera vraisemblablement lieu au report de décisions économiques importantes, notamment en ce qui concerne les investissements des entreprises ».

La bonne nouvelle pour le Canada est que la BdC s’attend à ce que les répercussions sur le produit intérieur brut (PIB) soient seulement d’environ -0,1 % jusqu’à la fin de 2018, ce qui s’explique par le commerce peu important avec le Royaume-Uni – la destination de seulement 3,5 % des exportations canadiennes.

Messages contradictoires

Le Brexit a rendu les conditions financières encore plus accommodantes, avec les rendements obligataires presque à leur plus bas en attente de la baisse des taux de la Banque d’Angleterre et de la Banque centrale européenne. Le rendement de l’obligation canadienne à dix ans a fermé 0,28 % plus bas le 13 juillet à 1,01 % de son taux de fermeture pré-Brexit le 23 juin. Entre-temps, le S&P 500 et le Dow Jones ont atteint des sommets le 12 juillet alors que le TSX atteignait son plus haut niveau en 11 mois.

Se penchant sur les messages semblant contradictoires envoyés par les actions et les obligations, Aubrey Basdeo, directeur des titres à revenu fixe canadiens chez BlackRock, indique à Epoch Times que les marchés des obligations signalent trois évidences.

Premièrement, ils sont agnostiques à la force de l’économie américaine. « Si les actifs à risque [les actions] ont augmenté et que les rendements n’ont pas suivi comme prévu, cela suggère que la Fed ne réagira pas de sitôt à la force [économique] », explique M. Basdeo. « Ils veulent encore observer comment va se dérouler le Brexit. »

Deuxièmement, le marché des obligations perçoit la récente force économique des États-Unis comme étant transitoire, comme c’est le cas depuis plusieurs années. « On ne fait pas feu de tout bois, autrement la croissance serait plus près de 4 ou 5 % plutôt que 1 ou 2 % », ajoute Aubrey Basdeo.

Troisièmement, « chaque point de base compte », affirme M. Basdeo. Un point de base équivaut à un centième d’un pour cent. « On recherche les rendements comme jamais auparavant. » Environ le tiers des marchés d’obligations souveraines dans le monde développé ont des rendements négatifs, donc lorsque des investisseurs achètent des obligations avec des rendements positifs, le prix de ces obligations augmente et ensuite les rendements chutent.

Sur la touche

Les prix du pétrole se sont stabilisés récemment à un niveau d’environ 10 dollars américains plus élevé qu’au moment du Rapport sur la politique monétaire d’avril, alors que l’offre et la demande sont relativement équilibrées. Par conséquent, la BdC s’attend à ce que les investissements dans le secteur de l’énergie aux États-Unis reprennent.

En grande partie en raison des feux de forêt en Alberta, on s’attend à ce que l’économie se soit contractée d’environ 1 % au deuxième trimestre. La BdC prévoit toutefois que la croissance au troisième trimestre rebondira à 3,5 % alors que la reconstruction à Fort McMurray prend forme, que la production pétrolière reprend et que la demande américaine augmente. La patience est aussi de mise, puisque les dépenses du gouvernement fédéral pourront être ressenties seulement dans la deuxième moitié de 2016.

La projection de croissance du PIB pour 2016 a été abaissée de 1,7 % dans le Rapport sur la politique monétaire d’avril à 1,3 % dans celui de juillet. Pour 2017, la projection baisse de 2,3 à 2,2 %. Les projections de croissance mondiale de la BdC ont baissé de 0,1 % pour 2016 et 2017, soit 2,9 et 3,3 % respectivement.

Les investissements d’affaires sont en partie responsables de la projection de croissance plus basse. Les faibles investissements d’affaires font perdre 0,9 % au PIB en 2016, selon la BdC. La part des investissements dans le secteur de l’énergie a régressé d’environ 4 % du PIB en 2014 à une estimation d’environ 1,5 % de 2016 à 2018.

La projection de croissance est également affectée par les exportations volatiles et récemment faibles. Les exportations non reliées à l’énergie ont chuté dans trois des quatre derniers mois, et on prévoit que le Brexit va réduire davantage la demande étrangère.

« Nous résistons à l’idée de tourner 180 degrés sur notre prédiction en raison des dernières données. La preuve sera dans les données à long terme », affirme M. Poloz.

Malgré les projections économiques à la baisse, la BdC prévoit un retour de l’inflation à 2 % en 2017 en raison des prix du pétrole plus élevés.

« La chose à retenir ici est qu’il faudra une autre déception majeure dans l’économie pour qu’ils […] abaissent davantage le taux », affirme dans une note Douglas Porter, économiste en chef chez BMO. M. Porter prévoit que le taux directeur de la BdC demeurera inchangé bien après l’arrivée de 2017.

Dawn Desjardins, économiste en chef adjointe chez RBC, partage une opinion similaire.

« La banque a incorporé beaucoup de mauvaises nouvelles dans sa mise à jour de juillet et elle estime encore que le risque sur la perspective d’inflation est essentiellement équilibré. Cela signifie que les conditions, largement hors de leur contrôle, devraient se détériorer davantage avant qu’ils abaissent le taux de nouveau », indique Dawn Desjardins dans une note.

Version originale : Bank of Canada More Cautious Given Brexit Uncertainty

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