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Budget 2025 : « Refuser de s’attaquer à l’immigration et à la transition écologique conduit l’État à la faillite », analyse Pierre Godicheau

novembre 6, 2024 16:44, Last Updated: novembre 7, 2024 7:22
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ENTRETIEN – Pierre Godicheau a travaillé au ministère de l’Économie, à la direction générale de la Concurrence et de la Consommation (bureau des études économiques), à la direction du Trésor et de la politique économique (bureau des dépenses publiques) et à la direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (chargé de mission auprès du sous-directeur de la prospective et des études économiques). Il est l’auteur de deux ouvrages Économie ou socialisme : il faut choisir (2014) et Pour un État juste et efficace (2017) aux éditions Godefroy de Bouillon. Il a également créé un mouvement à vocation politique : l’association libérale et sociale (ALS). Il revient pour Epoch Times sur le projet de loi de finances 2025.

Epoch Times : Pierre Godicheau, le projet de loi de finances 2025 ambitionne notamment de contenir le déficit public à 5 % du PIB en 2025. Il s’agit de faire un effort global de 60 milliards d’euros. Dans son état actuel, peut-il permettre d’atteindre cet objectif ?

Pierre Godicheau : Le déficit public prévu pour 2024 est de 166,6 milliards d’euros. Le PIB prévu pour 2024 est de 2836,5 milliards d’euros (PIB 2023 de 2805,7 milliards d’euros avec croissance prévue de 1,1 %, selon une prévision de l’OFCE). Soit un déficit anticipé de 5,87 %. Si le déficit public est ramené à 106,6 milliards et que la France connaît une croissance de 0,8 % en 2025, soit 2860 milliards d’euros, on aura un déficit de 3,7 %. Si la croissance était, par exemple, de 1,2, à la suite des mesures prises, on aurait un PIB de 2 870 milliards d’euros et un déficit tournant encore autour de 3,7 %.

L’objectif de contenir le déficit public à moins de 5 % du PIB serait largement atteint. Est-ce que le gouvernement Barnier est capable de mener à bien cet effort de 60 milliards d’euros ? Cela demande un courage et une inflexibilité assez importants. Par ailleurs, l’OFCE est un institut de conjoncture assez sérieux et ses prévisions n’ont rien d’irréaliste sur le papier.

Dans les détails, on trouve, entre autres, des hausses d’impôts de 19,3 milliards et une baisse de la dépense publique de l’ordre de 40 milliards. Comment jugeriez-vous cette répartition ?

Du côté des impôts, dans la situation actuelle, les augmentations, même réduites à 20 milliards d’euros, me semblent de nature à casser le moral de la population et notamment des entrepreneurs.

Le taux de prélèvements obligatoires en France était de 48 % du PIB en 2022, alors que Valéry Giscard d’Estaing, peu connu pour sa rigueur budgétaire, avait dit en 1980 qu’ « à partir de 40 % de prélèvements obligatoires, on entre en socialisme ». De ce côté-là, nous poursuivons donc notre progression dans le socialisme.

Selon moi, une progression des impôts de 10 milliards d’euros à titre de solidarité me paraît un maximum. En revanche, au niveau des dépenses, le gouvernement Barnier aura du mal à trouver ses 40 milliards d’économies dans les directions qu’il explore, étant donné que face à chaque dépense publique il y a un « chien » bénéficiaire qui aboie !

Surtout il ne va pas chercher là où sont les principales économies qui seraient possibles en restreignant sévèrement l’immigration (de près de 500.000 à 100.000 par an, par exemple) et en abandonnant l’essentiel de l’inutile et ruineuse « transition écologique ».

Bien sûr, cela demande de dénoncer beaucoup de textes européens, mais il faut avoir le courage de le faire. Ce sont 100 milliards d’euros d’économie par an que l’on peut faire ! Gardons 20 des 40 milliards de Michel Barnier et ajoutons-y ces 100 milliards, cela fait 120 milliards d’économies. Gardons seulement 10 milliards d’euros de hausses d’impôts, cela fait un effort de 130 milliards d’euros, ramenant le déficit budgétaire à 36,6 milliards ! Cela pourrait entraîner un boom de la croissance de 2,8 %, soit un PIB de 2836 milliards x 1,028 = 2915 milliards.

De cette manière, le déficit serait ramené à 36,6 : 2 915, soit 1,25 % du PIB ! Le rêve quoi ! Mais, il faut la compétence et le courage pour le faire, soit au moins 25 au test Lewino (cf. mon livre « Économie ou socialisme : il faut choisir »), note que Barnier est loin d’avoir !

Les hausses d’impôts concernant les entreprises peuvent-elles fragiliser l’économie ?

À partir d’un certain point, oui. Dans le cas présent, la hausse d’impôts n’est pas énorme, mais, comme je l’ai dit précédemment, les prélèvements obligatoires sont déjà de 48 %, c’est-à-dire très avant dans le socialisme si l’on considère les propos de Valéry Giscard d’Estaing.

Si la baisse des dépenses était de plus de 100 milliards par an comme je le préconise, cela aiderait à faire « avaler la pilule » aux patrons. Mais, encore une fois, il faut être prudent et 10 milliards d’euros me paraissent largement suffisants au titre de la « solidarité ».

Le texte prévoit également une contribution des collectivités territoriales de 5 milliards d’euros. Est-elle justifiée ?

La loi de décentralisation de 1982 avait pour objectif de donner une certaine autonomie aux collectivités locales. Cela partait d’une bonne intention, mais il n’était pas prévu qu’une gestion socialiste de ces collectivités pouvait conduire à une hausse des dépenses, des impôts et des déficits parfois insupportables ! L’intrusion de l’État peut être mal perçue par les intéressés !

Cependant, de nombreux rapports font état de dépenses excessives de certaines collectivités. L’État marche sur des braises et une éventuelle contribution des collectivités doit être accompagnée d’une opération de communication sur la responsabilité des collectivités locales dans notre endettement très excessif.

D’un côté, il pourrait y avoir des négociations avec les collectivités les plus dispendieuses qui reçoivent des aides de l’État, de l’autre une mesure générale qui incite tout le monde à participer à l’effort collectif, les « bons » et les « moins bons », sachant que 5 milliards d’euros me paraît un grand maximum au vu de la responsabilité écrasante de l’État dans les déficits publics.

D’autres mesures pour réaliser 5 milliards d’euros d’économies sont prévues. Elles visent notamment les fonctionnaires comme la hausse du nombre de jours de carence dans le secteur public ou la baisse des indemnités des arrêts-maladies. Sont-elles nécessaires ?

Vouloir aligner les conditions sociales des fonctionnaires sur le privé est louable. Le principal paramètre est le nombre d’heures de travail réel des fonctionnaires que de nombreux rapports indiquent comme inférieur à celui du privé.

Pour les délais de carence (3 jours dans le privé, 1 jour dans le public), on pourrait peut-être unifier à 2 jours, mais cela irait à l’encontre du but du gouvernement qui est de chercher de l’argent. Refuser de s’attaquer à l’immigration et à la transition écologique conduit l’État à la faillite et la tentation est grande de s’en prendre aux droits des travailleurs (les ministres et les parlementaires ne s’étant pas voté des diminutions de train de vie malgré leur incompétence !).

Quant à la baisse des indemnités des arrêts- maladies, elle atteindra vite ses limites, le gouvernement risquant d’apparaître très vite comme un méchant « prédateur » vis-à-vis de ses employés. En revanche, un meilleur contrôle sur la validité des arrêts-maladies me paraîtrait plus judicieux, tant les remontées sont négatives à ce sujet.

En résumé, à défaut de s’en prendre aux causes réelles de notre déficit – l’immigration et l’inutile et coûteuse « transition écologique » -, l’État en est réduit à des « économies de bouts de chandelles », même si certaines sont justifiées. Quand on refuse de « voir grand », on est conduit à une politique étriquée et chaotique.

Cependant, à condition que les chiffres donnés par l’État soient exacts, ce qui est un autre sujet, les mesures prises par l’État (20 milliards de hausses d’impôts et 40 milliards d’économies) seraient bien de nature à ramener le déficit public à moins de 5 % du PIB, mais, pour ce qui est de la croissance, rien ne dit que la hausse du PIB soit meilleure que celle prévue par l’OFCE.

À ce moment-là, les sacrifices demandés par le gouvernement apparaîtraient inutiles à une partie de la population si la croissance de l’économie ne repart pas. C’est pourquoi ma solution de 130 milliards d’euros de baisse des dépenses et de seulement 10 milliards de hausses d’impôts qui pourrait à la fois conduire à une croissance de près de 3 % et à un déficit public ramené à 1,25 % est de loin la plus souhaitable même si elle nécessite une compétence et un courage qu’on n’a jamais trouvé chez les gouvernements qui se sont succédé depuis 43 ans !

Pour contacter Pierre Godicheau : pierregodicheau@wanadoo.fr

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