Le gouvernement vénézuélien a affirmé mercredi avoir déjoué une tentative de « coup d’Etat » militaire impliquant l’opposition, en lien avec les Etats-Unis, la Colombie et le Chili, des allégations immédiatement rejetées avec ironie par l’opposant Juan Guaido.
Selon le ministre vénézuélien de la Communication, Jorge Rodriguez, le coup d’Etat prévoyait l’assassinat du président socialiste Nicolas Maduro. Impliquant des militaires actifs et en retraite, ainsi qu’un ancien chef du renseignement, il devait avoir lieu dimanche et lundi derniers.
« Nous avons assisté à toutes les réunions de planification du coup d’Etat », a déclaré M. Rodriguez, en faisant allusion à des agents gouvernementaux qui auraient été infiltrés dans la préparation de cette tentative de renversement de Maduro et son remplacement par un général.
Le ministre, qui a annoncé l’arrestation d’au moins six militaires, a également mis directement en cause le chef de file de l’opposition, Juan Guaido, reconnu comme président par intérim par une cinquantaine de pays, dont les Etats-Unis.
« Jusqu’à quand Guaido? Jusqu’à quand planifier des assassinats? Jusqu’à quand chercher le bain de sang? », a lancé le ministre dans une allocution télévisée, où il a également pointé du doigt les présidents de droite colombien, Ivan Duque, et chilien, Sebastian Pinera, ainsi que le conseiller américain à la sécurité nationale, John Bolton.
Le chef de file de l’opposition qui avait tenté en avril de susciter un soulèvement militaire pour renverser le régime, a aussitôt rejeté les allégations du gouvernement.
« C’est la énième fois et la presse a déjà perdu le compte du nombre de fois où ont été répétées de telles accusations. L’appel que nous avons lancé et que nous continuons de lancer s’adresse au corps militaire, c’est à l’armée de se ranger du côté de la Constitution », a réagi l’opposant.
Le gouvernement colombien a réagi en défendant son action comme étant politique, diplomatique et légale.
Jorge Rodriguez a aussi accusé l’ancien chef du renseignement du Venezuela, le général Cristopher Figuera, parti en Colombie après le soulèvement raté du 30 avril contre Nicolas Maduro et arrivé lundi aux Etats-Unis, d’avoir levé « des centaines de milliers de dollars » pour financer cette opération.
Dans un entretien réalisé à Bogota et publié lundi par le Washington Post, Cristopher Figuera affirmait que le président socialiste, que l’opposition a échoué jusqu’à présent à renverser, pouvait encore tomber.
« Pour le moment, le régime nous a damé le pion. Mais cela pourrait changer rapidement », a ajouté le général, formulant également de graves accusations de corruption contre plusieurs hauts responsables du pouvoir vénézuélien, y compris des membres de la famille de M. Maduro.
Nicolas Maduro a accusé le général Figuera d’être une « taupe de la CIA ».
Mercredi soir, le président a averti qu’il sera « implacable » avec l’opposition si elle cherche à le renverser par un coup d’Etat. « Nous serons implacables au moyen d’une contre-offensive révolutionnaire face à une tentative de coup d’Etat fasciste, implacables ! », a déclaré M. Maduro dans un discours radio-télévisé.
Cinq mois après l’apparition surprise de l’opposant Juan Guaido qui promettait une fin rapide au pouvoir de Nicolas Maduro, le jeu politique au Venezuela s’est figé dans un face-à-face où l’armée et les Etats-Unis donnent le ton.
L’auto-proclamation de Juan Guaido, président de l’Assemblée nationale, comme président par intérim le 23 janvier avait remobilisé les opposants contre le pouvoir chaviste. Mais depuis la tentative ratée de soulèvement militaire en avril, les grandes manifestations qui occupaient régulièrement les rues du pays ont marqué le pas.
En mai, les deux parties ont accepté d’entamer un dialogue de leurs représentants sous la médiation de la Norvège, mais celles-ci n’ont pour l’heure rien donné, en tout cas publiquement.
La Russie, principal soutien du régime avec la Chine, a annoncé pour sa part mercredi avoir effectué une rotation des « techniciens » militaires qu’elle avait envoyés au Venezuela en rapatriant vers Moscou une équipe de ces experts. Selon l’ambassade russe à Caracas, ils n’étaient occupés qu’à la « maintenance » des équipements militaires livrés à Caracas et à la formation des militaires vénézuéliens, et aucunement à de la « déstabilisation ».
Le Venezuela, qui possède les plus grandes réserves pétrolières du monde, est secoué par une profonde crise économique qui se traduit notamment par une hyperinflation, des pénuries d’essence, de produits de première nécessité et des coupures de courant à répétition.
Quatre millions de Vénézuéliens ont quitté le pays depuis 2015 et quelque 7 millions de personnes, soit un quart de la population, a besoin d’une aide humanitaire d’urgence, selon l’ONU.
E.T. avec AFP
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