Catastrophe pour La France insoumise : la liste emmenée par Manon Aubry, estimée à 6,7%, est reléguée très loin derrière les verts d’EELV, avec qui elle était au coude-à-coude dans les sondages, un résultat qui pourrait plonger le mouvement de Jean-Luc Mélenchon dans une profonde crise.
A 20H00, dans le bar Le Belushi’s près de la gare du Nord, où LFI a organisé sa soirée électorale, le silence a résonné longuement, seulement coupé par des jurons étouffés… L’endroit était, il faut le dire, quasi désert, en dehors des journalistes, parmi lesquels certains ont vite décampé pour se diriger vers le QG en fête, celui d’EELV.
Les sondages avaient, depuis plusieurs mois, prévu la dégringolade de LFI par rapport aux 19,58% réalisés par M. Mélenchon en 2017. Cette semaine, l’un d’eux en pointait le facteur-clé : seuls 18% des électeurs du chef de file prévoyaient de voter à nouveau pour LFI, tandis que 57% d’entre eux s’abstenaient.
Mais les Insoumis se voyaient tout de même au-dessus d’EELV, eux qui avaient fixé leur objectif autour des 11,3% des législatives de 2017. Manon Aubry avait même affiché la volonté, la semaine dernière, de dépasser Les Républicains dans la dernière ligne droite pour « déjouer le duo » LREM-RN et « représenter l’alternative portant les aspirations écologiques et sociales de toute une population ».
Las, LFI n’est même pas la première force de gauche, dépassée par la liste EELV menée par Yannick Jadot, qui a été portée par une dynamique des derniers jours typique des campagnes européennes. La formation de Jean-Luc Mélenchon en est réduite au voisinage avec le PS, le parti qu’il a quitté en 2008. Un résultat qui place LFI en position de faiblesse dans la recomposition à suivre de la gauche.
D’autant que les troupes de M. Mélenchon auront aggravé leurs relations avec les autres partis. Les diatribes au sommet mais aussi sur les réseaux sociaux ont souvent fusé avec EELV, Générations de Benoît Hamon, et même leurs anciens alliés du PCF, début septembre. La « fédération populaire » proposée par Jean-Luc Mélenchon – sous la bannière d’une France insoumise qui aurait été en tête – paraît loin…
Manon Aubry a concédé au micro : ce sont des « résultats décevants compte tenu des espoirs et efforts déployés dans cette campagne ».
Les Insoumis n’avaient pourtant pas ménagé leur peine dans cette campagne. Après la désignation de Manon Aubry en tête de liste dès décembre, ils ont labouré le terrain lors de centaines de petites réunions publiques, et aucune autre liste n’a organisé autant de meetings communs entre la tête de liste et le chef de file.
L’échec de ces élections européennes est donc tout autant imputable à Jean-Luc Mélenchon, qui a enchaîné les meetings depuis mars, qu’à Manon Aubry, ancienne porte-parole de l’ONG Oxfam, qui a dû apprendre la politique à marche forcée.
Les Insoumis ont aussi souhaité renouer avec la créativité de leur campagne présidentielle : ateliers participatifs de directives européennes, commission d’enquête fictive sur le groupe McDonald’s, camions avec hologrammes des candidats sillonnant les petites villes…
Mais ces méthodes confinant au marketing politique ont trouvé leurs limites et la mayonnaise n’a jamais pris. L’annulation pour raisons météorologiques de deux meetings en plein air, à Marseille et place Stalingrad à Paris – auront achevé de donner l’impression d’une campagne en berne.
Cette défaite majuscule ne manquera pas de poser la question du rôle joué, dans la désaffection des électeurs, par la colère de Jean-Luc Mélenchon face aux perquisitions du siège de LFI en octobre. Et de remuer le couteau dans les multiples plaies internes de ce jeune mouvement.
Depuis l’été dernier, les départs se sont succédé : des candidats ont dénoncé les travers d’une organisation « gazeuse » où un petit clan autour de Jean-Luc Mélenchon profite de l’absence de structures de décision collectives pour régner sans partage.
Le coup de grâce aura peut-être été porté par Andréa Kotarac, conseiller régional insoumis qui a rallié le RN dans la dernière ligne droite.
Déjà début décembre lors de la désignation de Manon Aubry, un militant insoumis confiait à l’AFP : « Des choix qui nous ont parfois irrités au départ, nous les militants, se sont révélés bons. J’accepte d’être éduqué politiquement », tant qu’il y a « une dynamique ». La dynamique n’existe plus.
Avec AFP
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