Avec sa victoire à l’élection présidentielle américaine, Donald Trump ouvre une nouvelle ère politique au niveau mondial. Si les marchés restent prudents, la Bourse de Paris était en hausse au lendemain de son élection, les futures décisions politiques du président américain présageant d’un nouveau rapport de force avec la Chine, en guerre commerciale contre l’Europe.
Le nouveau président américain a promis durant sa campagne une hausse de 10 à 20% des droits de douane sur les produits importés aux États-Unis, allant jusqu’à 60% de droits de douane sur tous les produits chinois.
La France se dit prête à défendre « sans trembler » ses intérêts, en particulier agricoles et industriels, si la nouvelle administration Trump prenait des mesures jugées protectionnistes, a prévenu le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot. Quant au Premier ministre, il a appelé les Européens à éviter « le chacun pour soi », alors que l’unité de l’Europe reste fragile.
La stratégie de la Chine pour écraser l’industrie européenne
Face à Trump, Paris prête à défendre ses intérêts économiques « sans trembler »
Le premier mandat de Donald Trump avait été marqué par l’imposition de droits de douanes sur une myriade de biens et produits dans le monde dont français, au motif de rééquilibrer la balance commerciale largement déficitaire des États-Unis vis-à-vis de ses partenaires commerciaux.
« Si l’administration Trump devait persister […], alors nous défendrons nos intérêts agricoles, industriels et commerciaux avec une volonté de fer et sans trembler », a déclaré Jean-Noël Barrot. Selon lui, la prochaine administration américaine commettrait « une erreur de calcul majeure » en appliquant « des droits de douane de manière un peu indiscriminée et massive à l’Europe ».
Trump a déclaré que l’Union européenne était le premier partenaire commercial des États-Unis. Appliquer des taxes supplémentaires à l’importation « pénaliserait lourdement les très nombreuses entreprises américaines qui aujourd’hui sont installées en France ou en Europe », et qui exportent ensuite vers le marché américain, a fait valoir Jean-Noël Barrot.
« L’Europe a changé », a-t-il argué, rappelant que le mois dernier, l’UE avait décidé d’appliquer des droits de douane sur les véhicules électriques chinois considérant que les subventions dont bénéficient les constructeurs automobiles chinois aujourd’hui étaient « désavantageuses pour les entreprises » européennes.
Le Premier ministre met en garde les Européens contre « le chacun pour soi »
Le Premier ministre français Michel Barnier a mis en garde les Européens contre le « chacun pour soi » après la victoire de Donald Trump, plaidant pour une « stratégie européenne coordonnée », a rapporté la porte-parole du gouvernement.
« La tentation ne (doit) pas être au chacun pour soi ni aux relations bilatérales, mais bien à une stratégie européenne coordonnée », a affirmé M. Barnier lors du Conseil des ministres, selon la représentante du gouvernement Maud Bregeon.
« Il a insisté sur le fait que le salut ne serait ni dans un transatlantisme béat, ni dans un nationalisme étriqué. La France doit porter […] une voix forte en Europe pour plus de souveraineté, pour garder l’unité au sein de l’Union européenne, pour veiller à nos intérêts, pour protéger nos frontières communes », selon Mme Bregeon.
« On doit consolider notre stratégie européenne, notre coordination européenne sur les grands enjeux auxquels on fait face en matière de changement climatique, en matière de défense, en matière d’écologie » ainsi que « de commerce, d’agriculture », a complété la porte-parole.
Sur l’avenir de l’Ukraine, en guerre contre la Russie, « indépendamment des choix que font les Américains, la situation en Ukraine, la sécurité des Ukrainiens, la victoire de l’Ukraine et donc in fine, notre sécurité ne peut pas dépendre d’une puissance étrangère, quelle qu’elle soit », a assuré Mme Bregeon.
Ferracci anticipe un « rapport de force commercial et économique »
Le ministre délégué chargé de l’Industrie Marc Ferracci a mis en garde le 7 novembre sur le fait que l’Europe devait se préparer à établir « un rapport de force commercial et économique » avec la future administration Trump.
« Il y aura probablement un durcissement de la politique commerciale américaine si (M. Trump) met en œuvre ce qu’il a évoqué durant toute sa campagne. Nous devons nous y préparer en Européens. Il faut se préparer à assumer une forme de rapport de force commercial et économique avec Donald Trump, et cela, on ne peut le faire qu’en Européens », a-t-il insisté.
« Nous devons avoir le souci de sortir d’une forme de naïveté qui a pu être celle de l’Europe pendant un certain temps vis-à-vis des USA mais aussi vis-à-vis de la Chine », a ajouté le ministre.
La Bourse de Paris en hausse à la victoire de Trump mais prudente
La Bourse de Paris a évolué en forte hausse au lendemain de l’élection de Trump, malgré le risque pour l’Europe de se voir imposer des droits de douanes supplémentaires. À 10h le 6 novembre, l’indice vedette CAC 40 bondissait de 2,10%.
« Cette réaction est surprenante et contre-intuitive avec le retour de Trump », a commenté Alexandre Baradez, responsable de l’analyse marchés chez IG France. Mais l’une « des explications possibles est que la victoire de Trump risque d’obliger la Chine à accroître son soutien à sa propre économie » et que l’Europe « doive aussi muscler son jeu » également, a-t-il poursuivi.
Le 13 novembre, la Bourse de Paris oscillait autour de l’équilibre, dans un marché prudent face aux évolutions politiques aux États-Unis. L’indice vedette de la Bourse de Paris, le CAC 40, gagnait 0,11% vers 09h40.
« Les investisseurs se demandent jusqu’à quel point l’administration Trump pourrait impacter, d’une part, l’Union européenne, et d’autre part, la Chine, ce qui pèserait inévitablement sur le consommateur chinois et les entreprises européennes exposées, notamment dans le secteur du luxe, qui a subi de lourdes pertes hier », commente Andrea Tuéni, responsable des activités marchés de Saxo Banque France.
« Bien que les valorisations européennes soient plus attractives qu’aux États-Unis, où elles atteignent des sommets, cela ne suffit pas à attirer les investisseurs », a-t-il poursuivi. Économistes et investisseurs s’attendent à ce que Donald Trump mette en place de nouvelles barrières douanières, allège les impôts et dérégule l’économie américaine.
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