En amont de la deuxième journée de mobilisation nationale le 31 janvier, les acteurs syndicaux préparent le terrain pour ce qu’ils espèrent être le « grand soir » de l’union des luttes. Le surprenant incendie volontaire d’un poste d’aiguillage, qui a bloqué la circulation sur le réseau ferroviaire grand-Est une bonne partie de la semaine passée, pourrait en faire partie, malgré leurs multiples dénégations.
D’autres actions « coup de poing », initialement lancées par la CGT-Energie, prennent de l’ampleur et sont, elles, pleinement revendiquées : lundi 23 janvier à Marseille, la CGT a passé le compteur électrique de certaines boulangeries en tarif réduit. La démarche, vue comme solidaire d’artisans en grande difficulté, a été applaudie sur les réseaux sociaux. Il n’en fallait pas plus pour que la direction du syndicat reprenne l’initiative. Elle indique aujourd’hui que « plusieurs hôpitaux ou cliniques, des patinoires et des piscines municipales, des centres sportifs publics, des associations d’intérêt public, des bibliothèques, des collèges, des lycées, des crèches, des chauffages collectifs d’université ou de HLM, des éclairages publics de petites et moyennes communes, des logements sociaux » ont été « placés en gratuité d’électricité ou de gaz ».
C’est illégal, mais c’est populaire, car cela facilite la vie à des acteurs porteurs de missions d’intérêt public. Les communicants syndicaux ont trouvé la brillante idée de nommer l’opération « Robin des Bois », pour tenter de convaincre que les syndicats agissent comme des justiciers – avec bien sûr la Première Ministre Élisabeth Borne dans le rôle du Shérif de Nottingham.
Au micro de RTL, Claude Martin, secrétaire fédéral de la CGT des Mines et de l’Énergie a ajouté que les opérations allaient aussi redonner accès complet à l’électricité ou au gaz pour ceux qui ont vu leur contrat suspendu suite aux non-paiements (et qui n’avaient donc qu’un service de fourniture minimale d’électricité). Le Secrétaire Général du syndicat d’extrême-gauche, Philippe Martinez, a bouclé la boucle en annonçant que ses militants allaient couper le courant des plus fortunés, citant par exemple la famille Bolloré qui, en plus d’avoir le défaut d’être riche, a celui de croire en Dieu.
Ces actions — leurs motivations comme les réactions qu’elles provoquent — sont particulièrement intéressantes à observer en ce qu’elles jettent une lumière brutale sur le désamour des Français pour la démocratie dite représentative. On a l’envie romantique de soutenir ces personnes qui décident d’agir sans attendre une autorisation, sans remplir de formulaire, sans qu’un pouvoir, démocratiquement élu mais largement déconsidéré, décide trop tard qu’il est urgent d’agir.
Cette actualité est aussi particulièrement utile à analyser par sa démonstration de la malléabilité de nos opinions : on voudrait croire à la bienveillance de ces « robins de bois », y compris si cela force à oublier qu’ils n’hésitaient pas, il y a une dizaine de jours, à menacer de couper l’électricité partout en France – même dans les hôpitaux et les crèches. Quelques mois auparavant, les militants des raffineries bloquaient les approvisionnements en essence du pays, affectant le quotidien de millions de personnes pour mieux négocier leur augmentation de salaire annuelle.
Les premiers salariés du secteur de l’énergie qui, individuellement ou en petits groupes, ont décidé d’offrir de meilleurs tarifs d’électricité à des personnes en difficulté ont fait une chose illégale mais peut-être réellement guidée par la solidarité — et par là difficilement condamnable. Les dirigeants syndicaux, eux, mènent froidement une campagne de communication : ils doivent, pour tenir et gagner face au gouvernement, rendre populaire les blocages, effacer l’image tenace d’irresponsabilité qui leur colle à la peau, et donc devenir des « justiciers. »
Le dernier point révélateur dans ces opérations est la volonté non dissimulée de décider de ce qui est juste sur la seule base de la doctrine de Marx : il y aura donc application de la « justice » pour celui qui ne paie pas ses factures d’électricité, et qui serait forcément la victime d’un système injuste (sans envisager la possibilité d’un mauvais payeur malhonnête). Il y aura « justice » aussi pour une maison trop belle, qui serait forcément le domicile d’un oppresseur, et verra donc son électricité coupée.
Les cartels de la drogue au Mexique invoquent aussi une sorte de divinité tutélaire, Jesús Malverde, leur « Robin des Bois », pour donner à leurs actions une couleur de générosité et de service aux autres. Il ne s’agit en réalité que de défendre les intérêts de l’organisation.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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