Un couvre-feu entrera en vigueur pour une troisième nuit consécutive lundi soir à Santiago, a annoncé le général Javier Iturriaga, chargé d’assurer la sécurité publique depuis l’éclatement de violentes protestations sociales au Chili qui ont fait onze morts.
« Il faut à nouveau décréter un couvre-feu qui concernera toute la région métropolitaine (de Santiago) aujourd’hui à partir de 20H00 et jusqu’à 06H00 « , a déclaré le responsable militaire dans une allocution télévisée. Un premier couvre-feu nocturne avait été décrété dès samedi soir dans la capitale, renouvelé dans la nuit de dimanche à lundi.
De nouvelles manifestations avaient lieu lundi au Chili, dans un climat toujours très tendu, pour protester contre les inégalités sociales, après trois jours d’émeutes et de pillages qui ont fait onze morts.
Des milliers de personnes se sont rassemblées sur la plaza Italia, dans le centre de la capitale, plus grand rassemblement depuis le début de la fronde sociale dans un pays jugé « en guerre » par son président Sebastian Piñera.
« Dehors les militaires ! », criaient les manifestants à l’adresse des soldats et policiers déployés en nombre dans le centre de Santiago, a constaté l’AFP. « Ça ne va pas s’arrêter, ça ne va pas s’arrêter », a déclaré une manifestante à une télévision locale.
La manifestation se déroulait pour l’heure dans le calme dans la capitale, mais des échauffourées ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre lors d’un autre rassemblement à Concepcion, grande ville du centre du pays.
Onze morts et plusieurs centaines de blessés
Les étudiants avaient appelé à de nouvelles manifestations pour lundi dans la capitale où les quelque 7,6 millions d’habitants ont vécu leur deuxième nuit consécutive sous couvre-feu après trois jours d’émeutes qui ont fait onze morts et plusieurs centaines de blessés.
« Nous avons eu trois morts avant-hier (samedi) et huit hier, dimanche », en majorité dans des pillages, a annoncé la gouverneure de Santiago, Karla Rubilar.
Selon le ministre de la Santé, Jaime Manalich, 239 civils ont été blessés depuis le début des troubles vendredi, dont huit avec un pronostic vital engagé. Une cinquantaine de policiers et militaires ont également été blessés, selon le ministre de l’Intérieur, Andrés Chadwick.
L’état d’urgence en vigueur depuis vendredi soir dans la capitale concerne dorénavant neuf autres des 16 régions du pays. Près de 10.000 policiers et soldats ont été déployés. C’est la première fois que des militaires patrouillent dans les rues depuis la fin de la dictature du général Augusto Pinochet (1973-1990).
Selon les autorités, 2.151 personnes ont été arrêtées dans tout le pays.
Les manifestations ont débuté vendredi pour protester contre une hausse – de 800 à 830 pesos (environ 1,04 euro) – des tickets de métro, une mesure finalement suspendue par le pouvoir.
Les émeutes se sont toutefois poursuivies, nourries par la colère face aux conditions socio-économiques et aux inégalités dans ce pays loué pour sa stabilité économique et politique, mais où l’accès à la santé et à l’éducation relèvent presque uniquement du secteur privé.
Trois jours de paralysie
Après trois jours de paralysie, les Chiliens tentaient lundi de reprendre leurs activités, avec de longues files d’attente pour tenter de s’approvisionner en essence et en denrées diverses, alors que des dizaines de supermarchés, de véhicules et de stations-service ont été saccagés ou incendiés.
Bus et stations de métro ont été particulièrement ciblés par les manifestants. Le métro, par lequel transitent environ trois millions de passagers par jour, est fermé depuis vendredi après le saccage de 78 stations et des dégâts évalués à plus de 300 millions de dollars. Seule l’une des sept lignes a rouvert partiellement lundi.
Dans la matinée, le général Javier Iturriaga, chargé vendredi de la sécurité publique par le président Pinera, avait affirmé que la capitale était « en paix et calme », dans une volonté d’apaisement après les déclarations dimanche soir du chef de l’Etat.
« Nous sommes en guerre contre un ennemi puissant, implacable, qui ne respecte rien ni personne et qui est prêt à faire usage de la violence et de la délinquance sans aucune limite », avait déclaré M. Piñera au sujet des émeutiers. Le même qui, quelques jours avant la crise, qualifiait son pays d’« oasis » de stabilité en Amérique latine.
La Haut-Commissaire aux droits de l’Homme de l’ONU, Michelle Bachelet, qui a été à deux reprises présidente du Chili (2006-2010, 2014-2018), a appelé le gouvernement et les acteurs de la société civile à engager immédiatement le dialogue.
De nombreux employés ont renoncé à se rendre à leur travail et les cours ont été suspendus dans la quasi-totalité des écoles et universités de la capitale. Selon les autorités, quelque 20.000 emplois ont été directement affectés par les destructions et la bourse de Santiago a dévissé lundi, perdant 4% en milieu de journée après avoir en baisse de 5%.
A l’aéroport international de Santiago, des milliers de voyageurs dont les vols ont été annulés ou retardés ont passé la nuit bloqués par le couvre-feu et l’absence de transports publics.
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