Chimie : la firme Vencorex passe sous pavillon chinois, une cinquantaine d’emplois conservés

Par Epoch Times avec AFP
10 avril 2025 15:45 Mis à jour: 11 avril 2025 15:54

« Un jour noir » pour la chimie française : la reprise de l’usine Vencorex, près de Grenoble, a été attribuée jeudi à son concurrent chinois Wanhua, qui ne gardera qu’une fraction de l’activité et des salariés.

Le tribunal de commerce de Lyon a jugé « irrecevable » un projet de reprise en coopérative par des salariés, qui aurait permis de sauvegarder davantage de postes et de garder ce « fleuron » de la chimie dans le giron français.

« On est déçu, en colère »

« On est déçu, en colère », a réagi Séverine Dejoux, élue CGT et porteuse du projet coopératif, lors d’une conférence de presse sur le site de Pont-de-Claix. « La France a échoué collectivement », a renchéri Olivier Six, un entrepreneur local engagé dans cette alternative.

Exprimant des « regrets » face à une « terrible nouvelle », des élus de tous bords ont également critiqué une décision symbolisant, selon eux, la « perte de souveraineté de la France ».

Refus d’une nationalisation

Le cabinet du ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a toutefois assuré avoir « sécurisé » des approvisionnements alternatifs pour les filières nucléaire et spatiale qui, à l’instar de Framatome ou Ariane, utilisent les sels produits par Vencorex, et « circonscrit autant que possible » les risques de défaillances en cascade dans le secteur.

Soulignant l’interconnexion des entreprises de la chimie, salariés et élus locaux avaient demandé une nationalisation temporaire de Vencorex après son placement en redressement judiciaire en septembre. Le Premier ministre François Bayrou avait refusé au motif que son activité n’était « pas viable ».

À l’automne, le concurrent chinois de Vencorex, Wanhua avait proposé une reprise partielle de l’usine via sa filiale hongroise BorsodChem. Contre 1,2 million d’euros, il s’est engagé à maintenir une cinquantaine d’emplois sur les 450 que comptait le groupe initialement et à investir 19 millions d’euros sur le site d’ici 2027. C’est cette offre que le tribunal de commerce de Lyon a validé jeudi.

« Ce jugement vient conforter un projet industriel ambitieux structuré depuis plus de six mois, et marque le point de départ d’un nouvel avenir pour ce site stratégique de la chimie française », s’est réjoui Wanhua dans un communiqué. « Nous avons désormais un objectif clair : redonner toute la dynamique au site de Pont-de-Claix, dans une logique d’excellence industrielle et d’ancrage territorial. Le travail commence maintenant », a déclaré Dr Howard Ding, Président de Wanhua Performance Chemicals.

« Pas d’avenir »

Le projet concurrent, baptisé CIRCEI (Coopérative industrielle de relance Chimie Electrochimie Isocyanate) et bâti en quelques semaines a bénéficié d’une forte mobilisation locale mais le tribunal a estimé que ses financements n’étaient « pas réunis ».

Les porteurs avaient demandé un délai de quatre semaines pour boucler leur dossier. Or, « la trésorerie ne permet pas de garantir la mise en sécurité du site au-delà de 15 jours », relève le tribunal. « Le temps nous a manqué », a déploré Christophe Ferrari, président divers gauche de la métropole de Grenoble. « C’est un jour sombre, un jour noir », et « profondément du gâchis », a-t-il poursuivi, visiblement ému, en reprochant au gouvernement d’avoir pensé que le site n’avait « pas d’avenir ».

Sophie Binet de la CGT (au c.), accompagnée du maire de Pont-de-Claix, Christophe Ferrari (à g.), arrive pour visiter les employés de l’usine chimique Vencorex, après la mise en faillite de l’entreprise en septembre, à Pont-de-Claix, le 7 novembre 2024. (JEFF PACHOUD/AFP via Getty Images)

La Région Auvergne-Rhône-Alpes, qui s’était déclarée prête, à l’instar d’autres collectivités, à participer financièrement au projet de SCIC, a pris « acte de cette décision, avec le regret de voir ce fleuron industriel passer sous pavillon étranger ».

Perte de « souveraineté industrielle »

« Le sel de Vencorex est indispensable à notre filière nucléaire et spatiale. Notre souveraineté industrielle s’effrite sous l’indifférence coupable de la Macronie ! »,  a condamné le député européen Aleksandar Nikolic sur X.

« La France s’apprête déjà à céder un nouveau fleuron indispensable à notre dissuasion nucléaire à la Chine. Les promesses de E. Macron n’auront même pas tenu 1 mois. Il est incompréhensible que l’État ne le nationalise pas ! », a renchérit son collègue du RN Guillaume Bigot.

« C’est la mise au chômage de centaines de familles et la perte de notre souveraineté », a écrit la député écologiste Cyrielle Chatelain sur le réseau Bluesky.

« Ils n’ont rien appris. Les mêmes qui nous parlent de ‘souveraineté’ à longueur de journée laissent Vencorex, une industrie stratégique, partir dans les mains de la Chine. Notre pays continue d’être bradé aux financiers étrangers », a déclaré François Ruffin sur X.

La France Insoumise a pour sa part accusé le gouvernement de ne pas avoir fait assez pour sauver Vencorex. « Vencorex bradé à Wanhua, son concurrent. C’est le savoir-faire français liquidé », a réagi sur X son leader Jean-Luc Mélenchon, qui s’était rendu sur le site en soutien aux salariés. « Terrible symbole du démantèlement de notre industrie ! »

« C’est vrai que reprendre 54 salariés, c’est peu mais pour moi, ce projet est beaucoup plus fiable pour ces 54 personnes qui vont rester. Et puis surtout, il y a un bon PSE pour les personnes qui vont partir, avec un suivi et des formations. Donc on sait qu’on a quelque chose derrière », a néanmoins témoigné Mathilde, une salarié de l’entreprise, auprès d’Europe 1.

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