Depuis les années 1990, lors des cérémonies importantes en Chine, tous les yeux sont fixés sur l’homme en uniforme Mao, une tenue réservée au plus puissant dirigent officiel du Parti communiste chinois (PCC).
Toutefois, lorsque le 3 septembre dernier les plus hauts dirigeants du Parti s’installaient à la tribune de la place Tiananmen pour passer en revue le gigantesque défilé militaire, tous les yeux étaient fixés sur un chétif et pâle personnage portant un costume ordinaire et une cravate marron.
À gauche du patron du Parti Xi Jinping en tenue de Mao noir de jais se trouvait son prédécesseur Jiang Zemin. À un moment du défilé, on a pu les observer, engagés dans ce qui avait l’air d’une brève conversation cordiale.
L’apparition de Jiang Zemin lors du défilé vise à montrer l’emprise de Xi Jinping sur les forces armées du PCC. C’est le dernier développement dans ce que de nombreux observateurs chinois appellent un « combat à mort » entre les deux principales factions au sein du Parti – l’une menée par l’actuel dirigeant Xi Jinping, et l’autre par l’ex-patron Jiang Zemin. Selon les analystes, cela montre que cette lutte intestine n’est pas encore arrivée à sa fin, et que l’avenir politique de l’ex-dirigeant du PCC est loin d’être assuré.
« L’apparition publique de Jiang Zemin ne signifie pas qu’il est libre et s’est tiré d’affaire » – Xin Ziling, responsable du PCC à la retraite.
La présence de Jiang Zemin signifie que la « configuration politique actuelle n’a pas changé – les aînés vivent toujours sous le même toit que les responsables actuels », a confié par téléphone Chen Pokong à un journaliste d’Epoch Times. (Chen Pokong est un commentateur et auteur de livres sur la culture politique de la Chine.) « La lutte va se poursuivre », a t-il ajouté.
En 2012, peu de temps après avoir accédé au poste du dirigeant du PCC, Xi Jinping a commencé à purger, dans le cadre d’une campagne anti-corruption, des centaines de hauts-fonctionnaires chinois, y compris plusieurs parmi eux que l’on croyait intouchables. Cette campagne a été largement interprétée et s’est avérée être une mesure radicale utilisée par Xi Jinping pour déraciner le réseau politique de Jiang Zemin.
Cependant, l’apparition de Jiang Zemin au grand jour à Pékin ne signifie pas que Xi Jinping a assoupli sa campagne du redressement du PCC.
« Le fait que Jiang Zemin et Zeng Qinghong se soient montrés ne signifie pas qu’on ne va pas s’en occuper », a précisé Chen Pokong. Zeng Qinghong, l’ancien membre du Comité permanent du Politburo et puissant acolyte de Jiang Zemin a été considéré par certains journalistes de l’édition chinoise d’Epoch Times comme le possible prochain allié de Jiang Zemin à chuter pour corruption.
« Zeng Qinghong a toujours des soucis – il est possible qu’ils le laissent se montrer avant de s’en occuper », a poursuivi Chen Pokong.
Xin Ziling, un ancien responsable du PCC à la retraite, partage cet avis. Xin Ziling est l’ex-directeur du bureau de la rédaction à l’Université de la Défense nationale de l’Armée populaire de libération. Il est bien connu pour ses discours francs, et il a déjà été censuré par les dirigeants du PCC pour avoir accepté d’être interviewé par la presse étrangère. Cependant, ces derniers temps, les responsables de la propagande du Parti n’ont rien fait pour le faire taire ou limiter ses discours.
« Xi Jinping devait avoir ses propres raisons quand il a permis à Jiang Zemin de se présenter au défilé. L’ensemble du système n’a pas été changé, et rien n’à été publiquement annoncé au sujet de Jiang. Donc, l’apparition publique de Jiang Zemin ne signifie pas qu’il est libre de ses mouvements et s’est tiré d’affaire », a déclaré Xin Ziling à Epoch Times.
Si Jiang Zemin, âgé de 89 ans, allait être ou pas présent au défilé militaire a été un sujet largement discuté par les observateurs et les Chinois suite à une série d’événements survenus en août dernier. Le défilé était organisé pour commémorer le 70e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale.
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Le 10 août, le Quotidien du peuple, porte-parole du PCC, a publié un éditorial qui laissait clairement entendre que les dirigeants du Parti à la retraite devraient cesser de se cramponner au pouvoir par le biais de leurs protégés assis à des postes politiques importants.
Les analystes sont d’accord que cet éditorial visait Jiang Zemin, qui à plus d’une décennie de sa démission de tous les postes officiels continue à exercer un pouvoir important, en agissant en coulisses à travers ses associés occupant des postes politiques clés.
Un peu plus d’une semaine après la publication de cet éditorial, un journaliste de l’édition chinoise d’Epoch Times a appris d’une source proche de la direction du PCC à Pékin que Xi Jinping avait placé temporairement « sous contrôle » Jiang Zemin, ses deux fils et son ancien acolyte Zeng Qinghong, ce qui signifie que leurs mouvements ont été temporairement restreints.
Deux ou trois jours plus tard, une stèle en pierre avec une calligraphie attribuée à Jiang Zemin était retirée de la parcelle d’herbe en face du principal centre de formation des cadres du Parti communiste à Pékin. Un responsable de l’école du Parti a dit que la stèle a été déplacée à l’intérieur du campus dans le cadre des travaux de rénovation.
Mais dans la boîte noire de la politique d’élite communiste, chaque geste est hautement symbolique – que ce soit un éditorial acerbe dans un journal, le déplacement d’une pierre anodine ou un passage en revue d’un défilé.
Selon Xin Ziling, Jiang Zemin fait aussi face à un autre problème : 160 000 plaintes pénales ont été déposées contre lui principalement par des Chinois habitant en Chine, dont la plupart n’ont pas été puni ou harcelé suite à cette action – ce qui serait auparavant le cas.
Selon Xin Ziling, « ce nombre est en soi l’expression d’une volonté publique. Il semble que maintenant les problèmes de Jiang Zemin seront examinés dans le cadre d’une procédure judiciaire. C’est ainsi qu’il pourrait y avoir une percée pour résoudre le problème de Jiang en Chine. »
« Après avoir régné sur la Chine pendant plus que 10 ans, Jiang Zemin a creusé sa propre tombe en persécutant le Falun Gong et en commettant les crimes de prélèvements forcés d’organes, ce qui est un crime contre l’humanité », a poursuivi Xin Ziling. Cela fait référence aux prélèvements d’organes destinés au commerce international de transplantation, et qui se serait concentré sur des dizaines de milliers de pratiquants de Falun Gong – une pratique spirituelle traditionnelle que Jiang Zemin a commencé à persécuter en 1999.
Concernant la question de la stèle avec la calligraphie de Jiang Zemin, Xin Ziling déclare : « Ce qui est important, ce n’est pas l’endroit où la pierre a été déplacée. L’essentiel est que la pierre avec l’inscription de Jiang, qui est l’emblème de l’école et le symbole de la puissance de Jiang, n’est plus à l’entrée de l’école du Parti… Ceci porte un très grand message politique. »
Matthew Robertson et Rona Rui ont contribué à cet article.
Article original : Political Fight in China to Continue as Party Elder Shows Up at Military
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