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Chirac et la construction européenne: une conversion pragmatique

septembre 27, 2019 12:24, Last Updated: septembre 27, 2019 13:10
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D’abord hostile à une Europe supranationale par tradition gaulliste, Jacques Chirac s’était rallié à la construction européenne, pour des résultats contrastés, accompagnant le passage à l’euro mais essuyant un échec politique cuisant lors du référendum de 2005 sur la Constitution européenne.

« Non à l’effacement international de la France », clamait Jacques Chirac dans son fameux « appel de Cochin », lancé le 6 décembre 1978 depuis cet hôpital parisien où il avait été admis après un accident de la route, fustigeant le « parti de l’étranger » en allusion à l’UDF pro-européenne de son rival, le président Valéry Giscard d’Estaing.

En campagne pour les élections européennes de 1979, l’ancien Premier ministre éreintait en meeting « cette Europe de l’impuissance », « ouverte comme une passoire à toutes les crises du monde », « non-européenne mais dominée par les intérêts germano-américains », « mollusque ».

Sa liste « Défense des intérêts de la France en Europe » était arrivée en quatrième position, celle de Simone Veil (UDF) se classant en tête devant les socialistes puis les communistes.

-A fini par se convertir au projet européen-

Jacques Chirac, opposé à l’adhésion de l’Espagne et du Portugal à la CEE au nom des intérêts des agriculteurs, avait fini par se convertir au projet européen: en 1992, alors qu’une partie de son camp, le RPR, faisait campagne pour le « non », il avait appelé à voter « oui » au référendum sur le traité de Maastricht.

« A ce moment-là, Jacques Chirac a bien compris que pour être présidentiable il faut être européen », commente l’historien Jérôme Pozzi, spécialiste du gaullisme. « C’est un mariage de raison ».

« Ce n’était pas un Européen de vocation, mais un Européen de devoir. Ça n’a jamais été un ardent fédéraliste et un supra-nationaliste échevelé », reconnaît l’ancien ambassadeur Pierre Sellal, nommé en 2002 par Chirac pour représenter la France auprès de l’UE.

« Mais il était conscient d’avoir reçu en héritage, en particulier du général de Gaulle, la réconciliation franco-allemande et le marché commun », poursuit ce diplomate, pour qui l’ex-président français « n’a jamais manqué à l’Europe dans les moments décisifs ».

Pourtant le bilan européen de Jacques Chirac est marqué par un fiasco, qui avait entraîné une panne de l’Union européenne: le 29 mai 2005, les Français rejettent par référendum le traité établissant une Constitution pour l’Europe.

Jacques Chirac, qui avait pris le risque d’organiser ce vote populaire pour ratifier le traité, avait ensuite fait son mea culpa à l’issue du dernier Conseil européen de son quinquennat, en 2007, en se disant « désolé peut-être de n’avoir pas fait tout ce qu’il aurait fallu » pour éviter ce coup porté à l’Europe.

– Une vision sur l’Europe limitée-

Pour l’historienne Marion Gaillard, spécialiste de la construction européenne, Jacques Chirac « n’est pas quelqu’un qui a porté une vision sur l’Europe », même s’il a eu un rôle important dans le passage à la monnaie unique, par son soutien au traité de Maastricht notamment, et dans la relance de la politique européenne de défense.

Le sommet franco-britannique entre Jacques Chirac et Tony Blair à Saint-Malo en décembre 1998 avait débouché sur la création de la Politique européenne de sécurité et de défense, rappelle-t-elle.

Mais les critiques n’avaient pas épargné sa présidence française de l’UE, au second semestre 2000, de même que le traité de Nice auquel elle avait abouti, attaqué pour son manque d’ambition.

L’ex-chef de l’Etat français avait par ailleurs provoqué un tollé en 2003 en vilipendant les pays d’Europe de l’Est candidats à l’UE, leur reprochant d’avoir « perdu une bonne occasion de se taire » en soutenant la position américaine sur l’Irak. Un sujet épineux sur lequel il fut en accord avec le chancelier allemand de l’époque, Gerhard Schröder.

Une anecdote de 1988 est aussi restée célèbre, quand Jacques Chirac, alors Premier ministre, s’en était pris à Margaret Thatcher lors d’un sommet européen, ulcéré par l’exigence de la Dame de fer d’un rabais sur la contribution britannique au budget communautaire.

« Qu’est-ce qu’elle veut de plus, cette ménagère? Mes couilles sur un plateau? », s’était-il exclamé, sans savoir que son micro était ouvert.

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