INTERNATIONAL

« Civisme » ou illégalité, l’Irak divisé face au président qui menace de démissionner

décembre 27, 2019 13:15, Last Updated: décembre 27, 2019 13:27
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Les Irakiens se divisent vendredi sur la menace du président Barham Saleh de démissionner face au camp pro-Iran, certains y voyant une « violation de la Constitution », d’autres un acte de « civisme » en réponse aux « partis corrompus ».

M. Saleh fait depuis des jours de la résistance face aux pro-Iran qui veulent placer leur homme au poste de Premier ministre, d’abord un ministre démissionnaire et maintenant un gouverneur controversé.  Jeudi, il a écrit au Parlement qu’il préférait démissionner plutôt que de proposer aux députés ces noms déjà rejetés par la rue.

Vendredi, certains espéraient que le sermon de la figure tutélaire de la politique irakienne, le grand ayatollah Ali Sistani, éclaircirait l’avenir d’une crise de plus en plus illisible. Mais ce dernier a refusé vendredi d’évoquer la situation politique, se mettant un peu plus à l’écart d’une classe politique jugée corrompue et dénoncée par une révolte inédite qui ne faiblit pas.

La contestation marquée par près de 460 morts

Alors qu’elle s’apprête à entrer dans son quatrième mois, la contestation a déjà été marquée par près de 460 morts et 25.000 blessés.

Son épicentre, la place Tahrir de Bagdad, s’est couverte dans la nuit d’une nouvelle banderole, aux côtés de tous les portraits des Premiers ministrables barrés de grandes croix rouges.

Il y est écrit sous le portrait de M. Saleh: « Merci Barham d’avoir pris le parti des revendications du peuple en refusant les candidats des partis corrompus. On est avec toi ».

Les protestataires et les politiciens sont divisés

Mais tous les protestataires ne partagent pas cet avis.

Pour Ali Mohammed, instituteur qui manifeste dans la province de Babylone, au sud de Bagdad, « cette démission va mener au chaos et donner encore plus de contrôle aux partis sur le pays »« Il faut que le président reste pour résister aux partis, car il est la seule barrière de sécurité qui garantisse la désignation d’un candidat nationaliste » comme Premier ministre, affirme-t-il à l’AFP.

Sur le campement des manifestants de Diwaniyah, plus au sud, Mohammed Mehdi espère, lui, que « cette démission va devenir effective et entraîner la dissolution du Parlement et donc des élections anticipées pour enfin en finir avec tous les corrompus ». « On salue cette action parce que depuis le début, on demande la démission de tous les dirigeants », assure-t-il à l’AFP.

Les réactions des politiciens sont également divisées.

Le bloc parlementaire des paramilitaires pro-Iran, qui revendique le titre de « plus grande coalition » et donc le droit de désigner le Premier ministre, appelle les députés à « prendre des mesures judiciaires contre le président pour violation de la Constitution ».

La liste de l’ancien Premier ministre Haider al-Abadi, désormais dans l’opposition, exhorte, elle, M. Saleh à « revenir sur sa démission » et à travailler avec tous à « un changement radical du rapport de force au pouvoir ».

L’Irak dans l’impasse

Cette liste est arrivée troisième aux législatives, mais est désormais amputée de la moitié de ses députés qui ont rejoint le camp pro-Iran.

Il faut que toutes les forces politiques « abandonnent la mentalité de trahison, d’intimidation et de domination » qui plongera l’Irak « dans l’inconnu », estime également la liste dans un communiqué.

Car la pression des pro-Iran est « énorme », assure de son côté la liste Wataniya, emmenée par l’ancien Premier ministre Iyad Allaoui et dominée par les sunnites.

Wataniya salue une « position civique » du président mais l’incite à rester pour former « un gouvernement de transition réduit » qui travaillera « sous supervision onusienne » à sortir l’Irak « de l’impasse ».

Deuxième producteur de pétrole de l’Opep, le pays est toujours pris en étau entre l’intransigeance des pro-Iran et celle des manifestants. Ces derniers paralysent toujours administrations et écoles dans la quasi-totalité des villes du sud du pays, promettant la poursuite du mouvement tant qu’ils n’auront pas obtenu ce qu’ils réclament depuis le 1er octobre.

Ils veulent une refonte totale du système de répartition des postes en fonction des ethnies et confessions et le renouvellement d’une classe politique inchangée depuis 16 ans.

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