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Contrastant avec Hong Kong, la « docile et obéissante » Macao cache une société civile « réduite au silence »

décembre 18, 2024 16:21, Last Updated: décembre 18, 2024 16:23
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En 2014, l’élégante place Tap Seac de Macao et ses pavés en mosaïque était occupée par des milliers de manifestants venus réclamer des comptes au gouvernement local. C’était l’apogée du militantisme politique dans l’ex-colonie portugaise.

Dix ans plus tard, au moment où Macao s’apprête à célébrer le 25e anniversaire de sa rétrocession à la Chine, il a quasiment disparu et les manifestations ne sont plus qu’un lointain souvenir. « La société civile de Macao est relativement docile et obéissante, c’est la réalité », affirme Au Kam-san, un enseignant de 67 ans qui était l’un des plus anciens députés pro-démocratie du territoire.

Au Kam-san, l’un des plus anciens députés pro-démocratie du territoire. (EDUARDO LEAL/AFP via Getty Images)

« Mais si c’était totalement vrai, nous n’aurions pas cette diversité d’opinions. Les jeunes ont encore leurs propres points de vue », ajoute-t-il.

Entré en politique après la répression des manifestations de la place Tiananmen à Pékin en 1989, M. Au a longtemps milité pour l’amélioration des conditions de vie, contre la corruption et pour des réformes électorales. Il avait participé en 2014 à l’organisation de ce rassemblement historique, auquel se sont rendues 20.000 personnes, pour protester contre des avantages octroyés aux fonctionnaires à la retraite. Le gouvernement avait fini par abandonner le projet.

Mais après un tour de vis juridique et politique de Pékin, les manifestations sont devenues aujourd’hui impensables à Macao, avec des députés de l’opposition évincés et une liberté d’expression en recul.

« La répression est palpable »

À l’approche des célébrations officielles, plusieurs militants pro-démocratie de Macao assurent à l’AFP avoir été sommés de ne pas exprimer de critiques en public. « La répression est palpable et la société civile a été réduite au silence », affirme Au Kam-san.

Rétrocédée en 1999 à la Chine sous le principe « Un pays, deux systèmes », Macao bénéficie d’une autonomie relative et de libertés civiles plus larges qu’en Chine continentale. Mais la Loi fondamentale de Macao – sorte de mini-constitution – n’a jamais promis une plus grande démocratisation du territoire, contrairement à celle de sa voisine Hong Kong. Jorge Rangel, ex-ministre de l’administration coloniale, explique à l’AFP que la démocratisation des institutions n’était pas une priorité lors de la rédaction de la Loi fondamentale.

Jorge Rangel, ex-ministre de l’administration coloniale. (EDUARDO LEAL/AFP via Getty Images)

Mais « ma vision du principe ‘‘Un pays, deux systèmes’’ était d’avoir une société civile forte, active et indépendante », assure-t-il. Aujourd’hui, les 690.000 habitants n’ont pas leur mot à dire sur le choix du chef de l’exécutif, désigné par un comité de 400 membres favorables au système en place. Et avec moins de la moitié des députés élus au suffrage universel, le mouvement pro-démocratie n’a jamais réussi à obtenir plus de 15% des sièges.

Malgré ce système verrouillé, des militants comme Jason Chao et Scott Chiang ont tenté dans les années 2010 de mobiliser la population, en organisant notamment des commémorations annuelles de la répression de Tiananmen.

Les activistes ont également lancé des débats sur des sujets sociétaux comme les droits LGBTQ+ pour faire évoluer les valeurs « conservatrices » de Macao, explique Jason Chao.

Une volonté massive de pouvoir élire le chef de l’exécutif

En 2014, ce dernier avait organisé un référendum en ligne, non officiel et dénoncé par les autorités, qui demandait aux habitants s’ils souhaitaient l’élection du chef de l’exécutif au suffrage universel : 97% des 8700 participants avaient répondu « oui ». « J’ai trouvé (ces résultats) assez exceptionnels, et je suis reconnaissant du fait que mon équipe et moi avons résisté aux pressions qui demandaient de l’annuler », note Jason Chao.

En 2019, Pékin saluait Macao comme un modèle de patriotisme et de stabilité face aux manifestations monstres qui soulevaient Hong Kong. Mais la répression n’a pas épargné le territoire. Lors du scrutin législatif de 2021, plusieurs candidats pro-démocratie, dont Scott Chiang, ont été disqualifiés pour « manque de loyauté » envers la Loi fondamentale.  Il vit désormais à l’étranger, comme Jason Chao.

Les militants pro-démocratie restés à Macao se font peu d’illusion : le prochain chef de l’exécutif, l’ex-juge Sam Hou-fai, est connu pour avoir prononcé en 2019 un jugement ayant considérablement restreint la liberté de réunion, note Ieong Meng-u, professeur assistant à l’Université de Macao.

L’ancien député, Au Kam-san, reconnaît que le mouvement n’a pas « réussi à changer le système politique ». Mais selon lui, « les graines » déposées par les militants pourraient « encore avoir une chance de germer » un jour.

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