Du Corneille énergique au théâtre du Ranelagh

Par Epoch Times
16 novembre 2016 15:15 Mis à jour: 2 avril 2021 12:42

 

Contre mon propre honneur

mon amour s’intéresse :

Il faut venger un père,

et perdre une maîtresse.

L’un m’anime le cœur,

l’autre retient mon bras.

Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme, Ou de vivre en infâme,

Des deux côtés mon mal est infini.

Ces vers, le public les murmure avec Rodrigue dans l’Acte I Scène VII déchiré autant que lui par ce choix on ne peut plus… cornélien !

Jean-Philippe Daguerre continue à charmer le public au théâtre du Ranelagh avec sa nouvelle mise en scène du Cid.

Les classiques toujours séduisants

Une fois de plus, par son penchant pour les œuvres du canon dramaturgique français, Jean-Philippe Daguerre nous persuade que les classiques respirent toujours et sont encore capables de nous inspirer, grands et petits, des émotions profondes ainsi que de beaux sentiments. Amour, loyauté, sacrifice et honneur sont présentés avec un clin d’œil mais sans jamais omettre la grâce du texte ni trahir son auteur.p11-du-corneille-energique-au-theatre-du-ranelagh_01

Jean-Philippe Daguerre donne un coup de jeune à la tragi-comédie de Corneille, nous faisant rire et pleurer tour à tour. Daguerre et ses comédiens font jaillir avec brio les passions, maîtrisent avec audace les moments d’action et de suspens tout en clamant avec aisance et naturel les alexandrins de Corneille.

Comme dans tout bon spectacle, les surprises se succèdent faisant sourire le public. Un claquement de doigt fait surgir des mains de derrière les rideaux tels des tiroirs magiques, un harmonica rythme le face à face de Rodrigue et Don Sanche comme avant le duel d’un bon vieux western.

Sans oublier le personnage du roi – totalement revisité – un tantinet fantoche et infiniment drôle. Il zozote en dansant littéralement ses répliques. Hissé sur une balustrade ou assis dans le public il nous divertit sans jamais nous lasser. Certains diront « rien de commun avec le roi qu’avait imaginé Corneille », peut-être oui, mais n’en reste pas moins qu’un exercice magistral de théâtre nous est offert là.

Un tango pour les amoureux

À l’autre bout de la gamme de rires et de pleurs, l’infante sacrifiant son amour nous bouleverse avec son courage et sa passion. Les jeunes amoureux Chimène et Rodrigue, interprétés avec justesse et brio, nous touchent par leur candide et ardent amour. Elle, nous envoûte par sa douceur, tandis que lui, nous séduit par sa flamme.

Les comédiens sont accompagnés des deux musiciens qui animent la scène d’un air espagnol qui nous situe entre Castille et Séville ou d’un tango argentin qui accompagne délicieusement l’orgueil et le défi de la mort, les passions enflammées et les épées brandies – parfaitement illustrées dans la scène de l’ouverture dans ce tango sensuel ou combat amoureux entre Rodrigue et Chimène.

Les combats et les épées sont là pour accomplir la vengeance, restituer l’honneur ou gagner le cœur de la bien-aimée. Représentant pour l’intrigue à la fois le moyen d’accéder à la gloire et la cause du malheur, ils sont pour la pièce un moyen de rythmer l’action et de créer le suspens.

Et toi, de mes exploits glorieux instrument,

Mais d’un corps tout de glace inutile ornement,

Fer, jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,

M’a servi de parade, et non pas de défense,

Va, quitte désormais le dernier des humains,

Passe, pour me venger, en de meilleures mains.

Don Diègue, Acte I Scène V

La chorégraphie des combats a été mise au point par Christophe Mie, maître d’armes et champion de France de sabre.

Les costumes de Virginie Houdinière viennent ajouter leur touche de rouge au décor sombre avec peut-être même un zeste de bravoure.

Interprété toujours par la flamboyante compagnie « Le Grenier de Babouchka », Le Cid mis en scène par Jean-Philippe Daguerre est un grand moment poétique, émouvant et drôle. À partager sans modération avec petits et grands pour s’enivrer des impérissables vers de Pierre Corneille.

 

Infos pratiques

Le Cid de Corneille

Mise en scène : Jean-Philippe Daguerre, assisté de Nicolas Le Guyader

Avec : Alexandre Bonstein ou Didier Lafaye, Stéphane Dauch, Manon Gilbert, Kamel Isker ou Thibault Pinson, Johann Dionnet ou Édouard Rouland, Charlotte Matzneff, Christophe Mie, Sophie Raynaud, Yves Roux, Mona Thanaël

Musiciens : Petr Ruzicka, Antonio Matias

Décors : Franck Viscardi

Costumes : Virginie Houdinière

Musique originale : Petr Ruzicka

Théâtre le Ranelagh – 5 rue des vignes 75016 Paris – 01 42 88 64 44

Du mercredi au samedi à 20h45, samedi 15h et dimanche 17h.

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