Nouveau coronavirus, crise de l’hôpital, bataille autour de la réforme des retraites: Agnès Buzyn quitte le ministère de la Santé pour la course à la mairie de Paris en laissant derrière elle de lourds dossiers.
C’était la raison qu’elle avait invoquée pour ne pas entrer en campagne.
Depuis le début de l’année, Agnès Buzyn est en première ligne face à l’épidémie de coronavirus apparue en Chine. Plusieurs fois par semaine, c’est elle, flanquée du directeur général de la Santé, qui vient en personne annoncer les nouveaux cas détectés sur le territoire français ou donner des nouvelles des Français de Chine.
Samedi, elle a annoncé le décès d’un touriste chinois de 80 ans hospitalisé depuis plusieurs semaines à Paris, premier mort hors d’Asie en lien avec l’épidémie.
Douze cas ont été confirmés en France à ce jour, avec désormais quatre guérisons et encore sept patients hospitalisés, la fille du touriste décédé et six Britanniques.
Cette stratégie d’une communication régulière a été saluée car elle permettait d’éviter la propagation de fausses nouvelles ou de nourrir trop d’inquiétudes.
Omniprésente, elle a rencontré dans le sud de la France les Français rapatriés de Wuhan et s’est rendue à Bruxelles pour une réunion d’urgence des ministres européens de la Santé.
Il reviendra au prochain ministre de poursuivre la stratégie utilisée jusqu’ici pour éviter la diffusion du virus en France, basée sur l’hospitalisation en confinement de chaque cas confirmé et sur la réalisation d’une enquête pour retracer et dépister les personnes avec lesquelles elles ont été en contact.
La ministre s’extirpe d’une crise inédite de l’hôpital, dont cette hématologue est elle-même issue, 11 mois après de le début d’une grève dans les services d’urgences qui s’est depuis étendue à tout le secteur.
Rallonge budgétaire, primes pour les personnels, reprise partielle de dettes… Après une succession d’annonces et une « stratégie Ma Santé 2022 » qui, depuis septembre 2018, tarde à produire ses effets, le gouvernement avait dévoilé fin novembre un « plan d’urgence » pour l’hôpital pour apaiser la grogne née de plusieurs années de restrictions budgétaires.
En vain. Environ 800 médecins-chefs de service ont démissionné de leurs fonctions administratives depuis trois semaines en guise de contestation.
Et vendredi, plusieurs milliers de médecins et paramédicaux ont à nouveau manifesté pour réclamer plus de moyens et des hausses de salaires.
Le même jour, la ministre promettait de recevoir les démissionnaires cette semaine…
Effacée ces dernières semaines sur le dossier le plus explosif du quinquennat, Agnès Buzyn n’était pas moins la ministre de tutelle du secrétaire d’État aux Retraites, Laurent Pietraszewski.
Et avant lui du Haut-commissaire Jean-Paul Delevoye, contraint à la démission, en plein conflit social autour de la réforme, sur fond de déclaration d’intérêts lacunaire.
Or il faudra épauler son successeur pour défendre le projet de loi pour un futur système universel de retraites, débattu à partir de lundi dans l’hémicycle, sous la pression de la rue, mobilisée depuis le 5 décembre.
« L’ambiance est compliquée », résume un négociateur syndical, à deux jours du démarrage des travaux de la « conférence de financement », chargée de ramener le système à l’équilibre d’ici à 2027.
« On espère pouvoir continuer à travailler sereinement » après autant de « turpitudes » et deux ans de concertations autour de cette promesse du candidat Macron.
La ministre n’aura pas eu le temps de lancer sa « loi grand âge », très attendue, initialement pour 2019, mais repoussée à l’été, au grand dam des représentants du secteur de l’aide aux personnes âgées.
Les enjeux liés au vieillissement de la population, bombe à retardement, avaient été mis en lumière par une vaste mobilisation entamée début 2018 par les personnels des maisons de retraite.
Mi-2018, Emmanuel Macron promettait une loi dépendance « votée avant la fin de l’année » 2019.
En mars dernier, en recevant un important rapport sur le grand âge, Mme Buzyn avait évoqué un texte « à l’automne » avant de repousser plusieurs fois l’échéance jusqu’en 2020.
Le nombre de seniors en perte d’autonomie, qui était de 2,5 millions en 2015, pourrait atteindre 4 millions en 2050, selon l’Insee.
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