Coronavirus : les scientifiques découvrent pourquoi certaines personnes perdent leur sens de l’odorat

Par Simon Veazey
12 janvier 2022 03:20 Mis à jour: 2 mai 2023 21:01

Dès les premiers rapports émanant de la ville de Wuhan, d’Iran et plus tard d’Italie, nous savions que la perte de l’odorat (anosmie) était un symptôme important de la maladie. Aujourd’hui, après des mois de rapports, tant informels que cliniques, nous pensons avoir trouvé une explication sur la façon dont ce virus provoque la perte de l’odorat.

L’une des causes les plus courantes de la perte d’odorat est une infection virale, comme le rhume, les sinus ou d’autres infections des voies respiratoires supérieures. Les coronavirus qui ne provoquent pas de maladies mortelles, comme le Covid‑19, le SRAS et le MERS, sont l’une des causes du rhume et sont connus pour provoquer une perte d’odorat. Dans la plupart de ces cas, l’odorat revient, lorsque les symptômes disparaissent, car la perte d’odorat est simplement le résultat d’un nez bouché, qui empêche les molécules d’arôme d’atteindre les récepteurs olfactifs du nez. Dans certains cas, la perte d’odorat peut persister pendant des mois et des années.

Dans le cas du nouveau coronavirus (SRAS‑CoV‑2), cependant, le schéma de la perte d’odorat est différent. De nombreuses personnes atteintes du Covid‑19 ont signalé une perte soudaine de l’odorat, puis un retour soudain et complet à un odorat normal, en une semaine ou deux.

Il est intéressant de noter que beaucoup de ces personnes ont déclaré que leur nez était dégagé, ce qui signifie que la perte d’odorat ne peut être attribuée à un nez bouché. Pour d’autres, la perte d’odorat était prolongée et plusieurs semaines plus tard, elles n’avaient toujours pas d’odorat. Toute théorie de l’anosmie dans le cas du Covid‑19 doit prendre en compte ces deux phénomènes.

Ce retour soudain à un sens de l’odorat normal suggère une perte d’odorat obstructive, dans laquelle les molécules d’arôme ne peuvent pas atteindre les récepteurs du nez (le même type de perte que l’on obtient avec une pince à linge sur le nez).

Maintenant que nous disposons de tomodensitogrammes du nez et des sinus des personnes atteintes de la perte d’odorat dû au Covid‑19, nous pouvons voir que la partie du nez qui sent, la fente olfactive, est bloquée par des tissus mous gonflés et du mucus – ce que l’on appelle un syndrome de fente. Le reste du nez et les sinus semblent normaux, et les patients n’ont aucun problème pour respirer par le nez.

Localisation du bulbe olfactif. medicalstocks/Shutterstock

Nous savons que le SRAS‑CoV‑2 infecte l’organisme en se fixant sur les récepteurs ACE2, à la surface des cellules qui tapissent les voies respiratoires supérieures. Une protéine appelée TMPRSS2 aide ensuite le virus à envahir la cellule. Une fois à l’intérieur de la cellule, le virus peut se répliquer, déclenchant la réponse inflammatoire du système immunitaire. C’est le point de départ des ravages et des destructions que ce virus provoque, une fois dans l’organisme.

Au départ, nous pensions que le virus pouvait infecter et détruire les neurones olfactifs. Ce sont les cellules qui transmettent le signal de la molécule d’arôme présente dans votre nez, à la zone du cerveau où ces signaux sont interprétés comme une « odeur ».

Cependant, une collaboration internationale a récemment montré que les protéines ACE2, dont le virus a besoin pour envahir les cellules, ne se trouvaient pas sur les neurones olfactifs. Mais elles se trouvaient sur des cellules appelées cellules sustentaculaires, qui soutiennent les neurones olfactifs.

Nous pensons que ces cellules de soutien sont susceptibles d’être celles qui sont endommagées par le virus, et que la réponse immunitaire entraînerait un gonflement de la zone, mais laisserait les neurones olfactifs intacts. Lorsque le système immunitaire s’est attaqué au virus, le gonflement se résorbe, les molécules d’arôme peuvent atteindre leurs récepteurs intacts et l’odorat revient à la normale.

Alors pourquoi l’odorat ne revient‑il pas dans certains cas ? Cette question est plus théorique, mais elle découle de ce que nous savons de l’inflammation dans d’autres systèmes. L’inflammation est la réponse de l’organisme à un dommage et se traduit par la libération de substances chimiques qui détruisent les tissus concernés.

Lorsque cette inflammation est grave, d’autres cellules voisines commencent à être endommagées ou détruites par ce dommage collatéral. Nous pensons que cela explique la deuxième étape, où les neurones olfactifs sont endommagés.

Le recouvrement de l’odorat est beaucoup plus lent, car les neurones olfactifs ont besoin de temps pour se régénérer à partir des cellules souches présentes dans la muqueuse nasale. La récupération initiale est souvent associée à une distorsion de l’odorat, connue sous le nom de parosmie, où les choses n’ont pas la même odeur qu’avant. Pour de nombreux parosmiques, par exemple, l’odeur du café est souvent décrite comme étant brûlée, chimique, sale et rappelant les eaux usées.

Physiothérapie pour le nez

L’olfaction est parfois qualifiée de « Cendrillon des cinq sens », car elle a été négligée par la recherche scientifique. Mais elle est passée au premier plan, durant cette pandémie. Le bon côté des choses est que nous allons en apprendre beaucoup sur la façon dont les virus sont impliqués dans la perte de l’odorat. Mais quel espoir y a‑t‑il aujourd’hui, pour les personnes souffrant d’une perte d’odorat ?

La bonne nouvelle est que les neurones olfactifs peuvent se régénérer. Ils se régénèrent chez presque tout le monde, tout le temps. Nous pouvons exploiter cette régénération et la guider, grâce à la physiothérapie du nez : l’entraînement olfactif.

Il existe des preuves solides que de nombreuses formes de perte d’odorat sont corrigées par une exposition répétée et attentive à un ensemble constant d’odeurs chaque jour, et il n’y a aucune raison de penser que cela ne fonctionnera pas pour la perte d’odorat dû au Covid‑19.


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