Crise politique en Corée du Sud : ce que l’on sait après cette nuit de déroute pour le Parlement et le président

Par Epoch Times avec AFP
4 décembre 2024 12:24 Mis à jour: 4 décembre 2024 12:26

Le président Yoon Suk Yeol a plongé la Corée du Sud dans une grave crise politique en imposant la loi martiale et en ordonnant à l’armée d’investir le Parlement, avant d’être contraint de faire marche-arrière.

L’AFP revient sur cet hallucinant drame nocturne dans un pays où l’on pensait la démocratie solidement ancrée, et examine les scénarios possibles pour la suite.

Lors d’une allocution télévisée surprise tard mardi soir, Yoon Suk Yeol a annoncé l’imposition de la loi martiale, une première en plus de 40 ans dans ce pays de 52 millions d’habitants. Il a dit vouloir « protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes et éliminer les éléments hostiles à l’État ».

Dans la foulée, un décret pris par le chef de l’armée, le général Park An-su, a suspendu l’activité politique et les partis et interdit la « fausse propagande », les grèves et les « rassemblements incitant aux troubles civils ». Tous les médias sont passés sous l’autorité de l’armée, et tous les médecins, actuellement en grève, ont reçu l’ordre de reprendre le travail sous 48 heures.

L’armée a reçu l’ordre de prendre le contrôle du Parlement, devant lequel des milliers de manifestants se sont rassemblés pour exiger la démission du président et le retrait de la loi martiale.

(ANTHONY WALLACE/AFP via Getty Images)

M. Yoon, élu en 2022, n’a jamais disposé de la majorité au Parlement monocaméral. Les législatives d’avril dernier ont été marquées par un raz-de-marée de l’opposition qui a renforcé sa domination de l’Assemblée nationale, avec 192 sièges sur 300.

Depuis, le Parlement bloque pratiquement toutes les initiatives présidentielles. Il a ainsi réduit de 4100 milliards de wons (2,8 milliards d’euros) le budget de l’État pour 2025. Le président a quant à lui usé de son droit de véto pour bloquer une enquête parlementaire sur une affaire de manipulation de cours impliquant son épouse, Kim Keon Hee.

En imposant la loi martiale, M. Yoon s’est plaint de subir une « dictature législative » et a accusé les élus de l’opposition de bloquer « tous les budgets essentiels aux fonctions premières de la nation ».

Une mesure radicale en cas de menace pour la sécurité nationale

Selon Gi-Wook Shin, professeur à l’Université de Stanford, l’application de la loi martiale n’était pas légalement justifiée. Une mesure aussi radicale « est généralement réservée à des situations de guerre, d’urgence ou à d’autres préoccupations similaires concernant des menaces pour la sécurité nationale », a-t-il expliqué à l’AFP.

Environ six heures après sa première allocution, M. Yoon réapparaît à la télévision. « Nous allons accéder à la requête de l’Assemblée nationale et lever la loi martiale », annonce-t-il au milieu de la nuit.

Entretemps, les députés, défiant les soldats armés qui tentaient de pénétrer dans l’hémicycle, ont réussi à tenir une séance d’urgence, à réunir le quorum et à voter une motion exigeant l’abrogation de la loi martiale par 190 voix contre 0. La Constitution sud-coréenne impose au président d’obtempérer si le Parlement lui ordonne de lever la loi martiale.

Le Parti démocrate, principale force d’opposition, a annoncé qu’il allait porter plainte contre M. Yoon, ses ministres de l’Intérieur et de la Défense et d’autres hauts-responsables pour « rébellion ». Ce crime, que le code pénal sud-coréen définit comme une « violence dans le but d’usurper le territoire national ou de subvertir la Constitution », est passible de la peine de mort (qui n’a plus été appliquée dans le pays depuis 1997).

Parallèlement, mercredi, les six partis d’opposition représentés au Parlement ont déposé une motion en destitution contre le président, qui pourrait être débattue en séance dès vendredi. Pour être adoptée, cette motion devra recueillir les deux tiers des voix. L’opposition n’aura besoin que d’un petit nombre de défections dans le camp présidentiel pour la faire passer.

Si la motion est adoptée, M. Yoon sera suspendu de ses fonctions en attendant une confirmation de la Cour constitutionnelle, qui aura 180 jours pour statuer. Le Premier ministre, Han Duck-soo, assurera alors l’intérim de la présidence.

En cas de destitution, une élection présidentielle devra avoir lieu sous 60 jours.

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