Au Dakar, une partie du succès se prépare en coulisses, au soleil couchant, dans un décor moins grandiose que les dunes et les wadi, fait de clés, de crics et de bruits où de petites mains font rouler l’emblématique rallye-raid.
Quand la fureur des premiers moteurs des coureurs professionnels retentit, suivis au compte-goutte par les amateurs jusque tard dans la nuit, une armada de mécaniciens se met en branle sur les quelque 20 hectares du bivouac comme une ruche accueillant sa reine.
Les concurrents font un bref briefing avec leurs équipes, puis s’éclipsent souvent éreintés, et ce sont les « mécanos » qui se mettent aux manettes : 478 véhicules d’assistance remplis de tonnes de caisses et de pièces, et au pied desquels bolides et motos se font réparer dans un ballet bien huilé.
Cette nuit-là dans le campement inondé basé près de Ryad, il est minuit passé et les mécaniciens de SSP attendent en discutant les pieds dans l’eau, bonnets sur la tête et mains dans les poches.
Quand l’un de leurs camions d’assistance arrive enfin, tout s’accélère.
? Be runnin' up that hill
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Le patron Julien Saumet dresse un diagnostic express : la sixième vitesse saute, ça ne « débraye pas assez » et il y a ce « clac clac » suspect aussi. Puis il donne les consignes : un mécanicien se met à nettoyer la cabine à grands jets de souffleuse air comprimé, un autre plonge sa tête dans les entrailles du camion.
Et commence le bourdonnement des nuits du Dakar qui, amplifié par le nombre de stands et de groupes électrogènes, finit par ressembler à celui d’un immense tarmac ou d’une moissonneuse-batteuse.
Des capots arrachés aux pneus crevés, ces équipes d’assistance doivent tout réparer, et « tant que c’est pas terminé, on n’est pas couché », résume Michel Boucou, patron de l’entreprise éponyme spécialisée dans l’assistance.
La tâche est parfois compliquée parce que « les camions qui roulent normalement à 90 on les fait rouler à 130 km/h, tous les organes souffrent », dit le patron qui a engagé 21 camions sur le rallye-raid, dont neuf sont à lui et font la course pour porter assistance à ses clients pendant l’étape.
« Les emmerdes, ça vient en cascade en général. Vous abimez une pièce, ça va en abimer cinq autres derrière, et ça empire au fil des étapes », confirme Philippe Perry, agrippé à une roue pour la retirer et graisser le cardan. Son équipage a loué les services de Boucou pour avoir accès à leur outillage et répare lui-même après les heures de spéciales.
D’autres paient une assistance (20.000 euros) pour qu’elle transporte pour eux des pièces et les leur apporte pendant la course en cas de pannes, et tous ces véhicules sont révisés chaque soir.
« Les mécaniciens sont à pied d’œuvre de 16h00 jusqu’à tard, 6h00 du matin parfois », dit Michel Boucou. Les concurrents partis, ils remballent bâches et outils, avalent des kilomètres de bitume jusqu’au bivouac suivant quand les coureurs chahutent avec les dunes. « On dort quand on peut », dit M. Boucou.
« Le premier boulot c’est un checkup complet », explique Manu Braga de l’équipe Nomades Racing : vidange, changement des petites pièces. Cette nuit-là, quatre mécaniciens s’activent chacun sur une bécane.
« Il faut un gros travail d’anticipation pour emmener le nombre de pièces de rechanges en fonction de la moto et du niveau du pilote », dit-il sous le barnum orange et noir à l’odeur de cambouis.
À mesure qu’ils s’enfoncent dans la nuit, on croise ici ou là des mécanos les bras chargés de gamelles de pâtes, de retour de la cantine où des serveurs philippins, népalais ou botswanais sont aussi sur le pont.
Un peu avant 01h00, une Peugeot Classic arrive enfin sur le stand SSP: panne d’arrivée d’essence. Les mécanos s’y mettent à trois, l’un agenouillé au-dessus du moteur, l’autre qui tente de réamorcer le gasoil. Vingt minutes durant ils vont pomper, dévisser, retirer l’électrovanne, pomper encore. Au bout de 20 minutes, le moteur repart.
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