De hauts magistrats ont manifesté « leur inquiétude » vendredi après des propos du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin sur une « présomption de culpabilité » pesant selon lui sur les policiers dans des affaires judiciaires, une nouvelle « atteinte » selon eux à l’indépendance de la justice.
Gérald Darmanin, qui réagissait au mouvement de protestation des policiers contre l’incarcération de l’un des leurs à Marseille, a estimé jeudi que « les policiers ne peuvent pas être les seules personnes en France pour lesquelles la présomption d’innocence (…) est remplacée par la présomption de culpabilité ». Le ministre s’exprimait devant un commissariat parisien, juste avant de recevoir les représentants des syndicats de policiers place Beauvau.
« Une nouvelle fois, la remise en cause par le ministre de l’Intérieur de l’application de la loi pénale par les magistrats, évoquant un non-respect de la présomption d’innocence et donc du principe d’impartialité s’agissant des policiers, constitue une critique directe des décisions de justice », déplorent dans un communiqué les conférences nationales des chefs de cours d’appel.
Les conférences des premiers présidents et des procureurs généraux rappellent que les placements en détention provisoire d’un policier à Nanterre dans le cadre de l’enquête sur la mort de Nahel, et d’un autre à Marseille soupçonné d’avoir roué de coups un jeune homme, sont des décisions « motivées » et qui ont « fait l’objet d’un appel ».
Magistrats et policiers travaillent ensemble
« Les magistrats travaillent quotidiennement avec les fonctionnaires de police nationale dont ils dirigent l’action dans sa composante judiciaire, notamment dans la conduite des enquêtes pénales. Ils ne manquent jamais de saluer leur engagement, leur professionnalisme et leur courage », soulignent les chefs de cour.
« Nous sommes soucieux de maintenir des relations apaisées avec les forces de sécurité intérieure, mais nous ne pouvons que craindre qu’une forme de radicalisation des positions s’installe parmi les fonctionnaires de police, facilitée par les atteintes publiques de leurs plus hautes autorités aux principes de la séparation des pouvoirs et de l’indépendance de l’autorité judiciaire », ajoutent-ils.
Le directeur général de la police nationale (DGPN), Frédéric Veaux, avait déjà provoqué un tollé chez les magistrats après avoir affirmé dimanche qu’« avant un éventuel procès, un policier n’a pas sa place en prison ». Ses déclarations avaient conduit à une « mise au point » du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), garant de l’indépendance de justice, qui a rappelé que l’autorité judiciaire était « la seule légitime pour décider du placement ou non en détention provisoire des personnes qui lui sont présentées ».
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