Née dans une famille de l’élite nord-coréenne ayant des liens avec la dynastie au pouvoir, Oh Hye Son a grandi en croyant qu’elle était « spéciale », mais elle a ensuite goûté à la liberté à l’étranger et décidé de se libérer de tous ces liens.
La plupart des dizaines de milliers de Nord-Coréens qui ont fui la répression et la pauvreté ont affronté un voyage périlleux à travers la frontière terrestre entre leur pays et la Chine, où ils risquent d’être arrêtés et éventuellement expulsés.
Une décision déchirante : elle a convaincu son mari Thae Yong Ho, alors ambassadeur adjoint de Corée du Nord à Londres, de renoncer à leur statut privilégié pour le bien de leurs enfants.
« Je voulais ne jamais retourner en Corée du Nord et je me demandais pourquoi les Nord-Coréens devaient mener une vie aussi dure », raconte-t-elle à l’AFP lors d’un entretien à Séoul, où elle vit désormais.
Vivre dans la peur du pouvoir
Malgré une lignée impeccable, elle a toujours « vécu dans la peur du pouvoir », explique-t-elle. « Personne, à l’exception de la famille Kim, n’avait de privilèges, et lorsque mes enfants ont appris ce qu’étaient la liberté et la démocratie en vivant à l’étranger, j’ai compris qu’il n’y avait aucun avenir pour eux en Corée du Nord. »
Thae Juhyok, le fils aîné de Mme Oh, souffrait de problèmes de santé chroniques, notamment du syndrome néphrotique, une maladie qui peut entraîner des problèmes rénaux potentiellement mortels si elle n’est pas traitée.
Il était pratiquement impossible d’obtenir ce traitement dans le système de santé en ruine de Pyongyang où il fallait sans cesse soudoyer les médecins et où les médicaments essentiels faisaient défaut.
Mme Oh se souvient que l’arrivée de sa famille à Londres en 2004 et l’accès au Service national de santé lui ont ouvert les yeux.
Son fils a rapidement pu bénéficier d’un traitement gratuit dans l’un des meilleurs hôpitaux de la ville, dit-elle, ajoutant que ses enfants ont également été scolarisés dans des écoles britanniques, où ils se sont bien intégrés.
« Les enfants ont si bien grandi en Angleterre, dans une société qui les respectait », souligne-t-elle.
Un contraste frappant et des valeurs différentes
Le contraste avec la vie à Pyongyang, où ils sont retournés en 2008 après la fin de la première affectation de son mari à Londres, était frappant.
Juhyok a fréquenté l’université de médecine de Pyongyang. Mais au lieu d’étudier, il a été mis au travail sur un chantier de construction pour transporter du ciment, explique Mme Oh.
La Corée du Nord est confrontée à une pénurie de main-d’œuvre dans tous les secteurs économiques et il est courant que le gouvernement ordonne aux étudiants, voire aux écoliers, d’exercer d’éreintantes tâches manuelles en signe de loyauté.
Si l’un d’entre eux ne s’exécute pas, le gouvernement lui retire ses rations alimentaires ou lui impose des taxes, selon le rapport 2022 sur la traite des personnes publié par le département d’Etat américain.
Mme Oh réalise alors, qu’il serait impossible pour ses enfants de s’intégrer pleinement à la société nord-coréenne. « Ils avaient des valeurs complètement différentes », dit-elle. « C’est alors que j’ai commencé à penser que si j’avais l’occasion de repartir à l’étranger, je ne reviendrais pas ».
Une opportunité de se défaire de tous ces liens
L’opportunité s’est présentée pour Mme Oh quand son mari a été de nouveau affecté à Londres. Elle l’a alors convaincu de se défaire de tous ces liens avec la dynastie au pouvoir, mais restait dans l’ inquiétude que ses enfants « lui en veuillent plus tard ».
Son mari Thae Yong Ho est devenu le premier transfuge à être élu au Parlement sud-coréen, où il est aujourd’hui un député très en vue du Parti du pouvoir du peuple, la formation conservatrice au pouvoir.
Les contacts civils sont interdits entre les deux Corées, même si certains transfuges utilisent des intermédiaires pour faire passer clandestinement des téléphones portables chinois à travers la frontière.
Mme Oh n’a pas réussi à contacter ses proches, mais elle a entrevu une fois son beau-frère en 2018. Il faisait alors partie d’une délégation officielle nord-coréenne en visite à Séoul, à l’occasion d’une rare ouverture diplomatique.
Cela lui a donné l’espoir que ses proches n’avaient pas subi les purges du régime des Kim à la suite de la fuite de sa famille.
« Vont-ils m’en vouloir ? Vont-ils m’envier ? Ou m’acclameront-ils en silence ? », se demande-t-elle en essuyant ses larmes.
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