Leur avis sur la solidité de la dette française était particulièrement guetté vendredi après une série de mauvaises nouvelles concernant les finances publiques depuis février. Mais Fitch et Moody’s, deux des plus grandes agences de notation, ont laissé leurs notes inchangées.
Fitch, qui avait dégradé la note française l’an dernier, à « AA- » avec perspective stable, a réaffirmé cette note, qui signifie que le risque de défaut reste très faible. Elle avait prévenu dès le début du mois qu’elle ne comptait pas la changer.
Moody’s pour sa part n’a pas à proprement parler « réaffirmé » sa note de Aa2, avec perspective stable, un cran au-dessus de celle de Fitch, mais ne l’a pas modifiée non plus.
Le déficit public de la France a lourdement dérapé à 5,5% du PIB en 2023 au lieu de 4,9% espérés, et les 110,6% de PIB de dette représentent le troisième plus fort ratio de dette de l’UE après la Grèce et l’Italie. Le gouvernement a dû annoncer en urgence depuis février deux trains d’efforts budgétaires de 10 milliards d’euros chacun.
Le retour du déficit sous les 3% en 2027 pas crédible
Dans leurs communiqués respectifs, il est clair que ni Fitch ni Moody’s ne croient au retour du déficit sous les 3% en 2027, qui est une exigence de Bruxelles. Cette appréciation est également celle du Haut Conseil des finances publiques (HCFP). Dans son avis du 17 avril, il jugeait que la nouvelle trajectoire de réduction du déficit public proposée par le gouvernement, qui vise un retour sous les 3% du PIB en 2027, manquait de « crédibilité » et de « cohérence », face à une situation des finances publiques « préoccupante ».
Pour Moody’s cependant, la perspective pourrait s’améliorer si le gouvernement « réussit à faire adopter et à appliquer des mesures » permettant de réduire significativement la dette. Mais la perspective et la note elle-même pourraient à l’inverse se dégrader à l’avenir si la situation de la dette se détériorait en France davantage que chez ses « pairs ».
Fitch observe que la note de la France se justifie à la fois par une économie « vaste et diversifiée », des institutions « fortes et efficaces » et « une stabilité reconnue ». Mais qu’en revanche, cette notation est affaiblie par les finances publiques et en particulier le niveau élevé de dette.
Les notes attribuées par les deux agences classent encore la dette française parmi celles de « haute qualité ». La France a perdu en 2012 son triple A, marquant les dettes souveraines les plus sûres, comme celle de l’Allemagne actuellement.
« La France est dans une situation plutôt solide, les marchés lui prêtent à un taux qui n’a pas bougé malgré les mauvaises nouvelles économiques », remarquait vendredi après-midi sur franceinfo Xavier Timbeau, directeur de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
Pour lui, une dégradation aurait eu plutôt un « impact assez fort dans le débat politique » avant les élections européennes du 9 juin : ce qu’il prédisait comme un argument pour que ces agences n’abaissent pas la note de la France, afin « de ne pas jouer avec le feu dans une période électorale ».
Bruno Le Maire prend « note »
Le ministre des Finances Bruno Le Maire a aussitôt « pris note » de ces nouvelles dans un bref communiqué, ajoutant que « cette décision doit nous inviter à redoubler de détermination pour rétablir nos finances publiques et tenir l’objectif fixé par le président de la République : être sous les 3% (de PIB, ndlr) de déficit en 2027 ». « Nous tiendrons notre stratégie fondée sur la croissance et le plein emploi, les réformes de structure et la réduction des dépenses publiques », assure le ministre.
Le gouvernement aura encore à affronter le 31 mai la notation de la plus regardée des agences, S&P, qui place la France sur la même ligne que Moody’s, à AA, mais avec une perspective négative, signifiant que la note pourrait baisser à moyen terme.
M. Le Maire va devoir aller défendre le Programme de Stabilité (« PSTAB ») et les prévisions de retour du déficit public sous 3% en 2027 qu’il contient, devant les députés lundi, puis devant les sénateurs mardi.
Le président (LFI) de la Commission des Finances de l’Assemblée Éric Coquerel a considéré sur X que la décision des agences n’avait « aucune importance », mais « n’empêchait pas la politique budgétaire et économique du gouvernement de nous emmener dans le mur ».
Le rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale, Jean-René Cazeneuve (Renaissance), a estimé au contraire que le maintien des notes était « un signal positif qui valide notre politique de réduction du déficit et les décisions prises en début d’année dès que le ralentissement de la croissance s’est confirmé ».
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.