Une nouvelle espèce de tortue matamata récemment découverte a été décrite par les scientifiques comme « l’une des tortues les plus étranges du monde » et « l’une des plus charismatiques ». Cette étrange tortue d’eau douce se trouve dans l’immense bassin du fleuve Orénoque au Venezuela et dans l’est de la Colombie (d’où son nom scientifique, Chelus orinocensis).
La découverte de cette nouvelle espèce a été publiée dans la revue Molecular Phylogenetics and Evolution. La tortue Orénoque matamata se cache dans les eaux boueuses des rivières, ressemblant à une roche. Seuls ses petits yeux la trahissent auprès de l’observateur, ou lorsqu’elle ouvre son énorme bouche pour aspirer sa proie tout entière.
En tant que co-auteur de cette découverte, Uwe Fritz a déclaré dans un communiqué de presse de l’Institut Senckenberg en Allemagne : « Bien que ces tortues soient largement connues en raison de leur aspect bizarre et de leur comportement alimentaire inhabituel, on en sait étonnamment peu sur leur diversité et leur génétique. » L’étude souligne le besoin de poursuivre la recherche et la protection de ces étranges reptiles blindés, qui sont très recherchés sur le marché des animaux exotiques.
Le Smithsonian National Zoo explique : « Le cou de la tortue matamata est large, aplati et couvert de verrues, de franges de peau et de crêtes. Ses petits yeux sont nichés sur les côtés de sa grande tête triangulaire aplatie, et elle a une large bouche et un long museau tubulaire. »
Dans la mesure où les matamatas ne sont pas de bonnes nageuses, cette apparence inhabituelle est très pratique pour se camoufler. « Elles restent généralement immobiles et camouflées dans les eaux boueuses qu’elles habitent, ce qui leur permet de tendre des embuscades à leurs proies », déclare le Smithsonian.
Bien que les tortues matamata soient connues des scientifiques occidentaux depuis le 18e siècle, on a longtemps supposé qu’il n’y avait qu’une seule espèce (Chelus fimbriata). Cependant, M. Fritz ainsi que les autres chercheurs participant à l’étude récemment publiée savaient, grâce à des travaux de recherche antérieurs, que ces tortues étaient plus diversifiées.
« Plusieurs études ont montré que les tortues matamata ont un aspect différent selon qu’elles vivent dans l’Orénoque ou dans le bassin de l’Amazone. En nous fondant sur cette observation, nous avons décidé d’examiner de plus près la composition génétique de ces animaux », indique l’étude. Au final, les analyses d’ADN ont révélé qu’il y avait deux espèces bien distinctes.
Ils ont ajouté : « Nos analyses moléculaires et morphologiques ont révélé l’existence de deux lignées évolutives de matamatas distinctes, génétiquement bien différentes, qui se sont séparées à la fin du Miocène (il y a environ 12,7 millions d’années). » C’est à peu près à cette époque que le bassin de l’Orénoque est apparu, ce qui explique cette séparation.
Les deux espèces possèdent en commun des carapaces blindées à l’aspect étrange qui leur permettent de se camoufler parfaitement sous une apparence de rochers, et elles ont la capacité d’aspirer des vairons et d’autres petits poissons. Selon Science Alert, les tortues de l’Orénoque matamata ont une carapace dont la forme est plus ovale, et leur face intérieure est dépourvue du pigment de leurs cousins amazoniens.
La découverte des chercheurs n’a pas seulement des implications pour une compréhension scientifique, elle souligne également le besoin de préservation. Mario Vargas-Ramírez, l’un des co-auteurs de l’étude, a expliqué dans le communiqué de presse : « Jusqu’à présent, cette espèce n’était pas considérée comme menacée, compte tenu de sa large répartition. Cependant, nos résultats montrent qu’en raison du fait qu’il s’agit de deux espèces et non une seule, la population de chaque espèce est inférieure à ce que l’on supposait auparavant. »
En plus de la destruction de l’habitat fluvial due à l’exploitation forestière et agricole illégale, les tortues sont menacées par les braconniers. « Chaque année, des milliers de ces animaux à l’apparence bizarre se retrouvent dans le commerce illégal d’animaux et sont confisqués par les autorités », ajoute M. Vargas-Ramírez. « Nous devons protéger ces animaux fascinants avant qu’il ne soit trop tard. »
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