TORONTO – Le problème de l’innovation au Canada n’est pas seulement une question d’argent. Un changement culturel doit survenir afin que les innovateurs soient honorés, et non pas méprisés pour leurs échecs. Des politiques gouvernementales appropriées ont aussi un important rôle de facilitation à jouer.
Voilà certains points à retenir du Canada Summit du 8 juin organisé par la publication The Economist, où entrepreneurs, chefs d’entreprises et décideurs se sont rassemblés pour échanger sur comment relancer l’innovation.
C’est un sujet de discussion important, alors que le Canada se retrouve au 22e rang en matière d’innovation dans le classement du Forum économique mondial, et ce, malgré les coûts d’exploitation les plus bas dans le G7, le système bancaire le plus solide, un niveau de vie élevé et une main-d’œuvre instruite.
L’objectif final est de faire grandir les entreprises ; par exemple, faire passer des revenus de 10 à 100 millions de dollars annuellement. Au Canada, seulement 0,2 % des entreprises ont plus de 500 employés.
« Nous ne sommes pas le premier gouvernement à identifier [l’innovation] comme un défi », a déclaré le ministre des Finances, Bill Morneau, l’un de deux conférenciers d’honneur au sommet avec le premier ministre, Justin Trudeau.
Le gouvernement Trudeau a annoncé un nouveau Programme d’innovation avare de détails dans son budget 2016, mais le ministère de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique œuvre pour y ajouter de la substance.
Compétition accrue
Andrei Sulzenko, un ancien sous-ministre adjoint à Industrie Canada, est familier avec le manque d’innovation au pays. Il estime que le Canada traite les symptômes – une faiblesse en matière de recherche et développement, pour lesquels sont octroyés de généreux crédits d’impôt – plutôt que de s’attaquer à la racine du problème.
« Avec le manque de pression concurrentielle sérieuse et soutenue dans les secteurs clés de l’économie canadienne, il est devenu rationnel pour les entreprises de moins investir dans une gamme d’activités innovatrices plus risquées », mentionne M. Sulzenko dans un communiqué.
Il affirme que la concurrence du marché devrait être encouragée, en commençant par réviser les effets du commerce, de l’investissement et de la réglementation sur les stimulants pour promouvoir l’innovation.
Andrei Sulzenko est l’auteur d’un rapport de l’Institut de recherche en politiques publiques qui offre des suggestions claires pour le Programme d’innovation.
De l’avis général – y compris celui de Bill Morneau – le Canada doit investir dans des gens hautement qualifiés, il doit augmenter la disponibilité du financement pour les entreprises en haute croissance, la régulation doit être judicieuse et il doit encourager un écosystème d’innovation à travers différents secteurs et régions.
Trop modeste
En plus des gestes politiques adéquats, il doit y avoir un changement de culture. Les conférenciers au Canada Summit étaient d’accord pour dire que la politesse et la modestie des Canadiens semblent être un obstacle.
« Nous n’aimons pas nous vanter de nos réussites », affirme Andrea Stairs, directrice générale d’eBay Canada. Mme Stairs a dit que nous sommes « terribles » lorsque vient le temps de partager nos réussites. Les jeunes entrepreneurs prospères pourraient ne jamais avoir la même renommée qu’un athlète professionnel accompli, l’écart est beaucoup plus grand qu’il ne devrait l’être.
Jacques Bernier, investisseur en capital risque, entrepreneur et directeur associé chez Teralys Capital, affirme que les médias ont une grande responsabilité de rapporter sur le sujet. « Les médias doivent faire des entrepreneurs des stars plus fréquemment », estime-t-il.
« Nous ne sommes pas connus pour être audacieux et agressifs », affirme Allen Lau, pdg de Wattpad, au sujet du stéréotype entourant « l’image de marque du Canada ». « Mais nous sommes aussi gentils et ces deux choses peuvent coexister. »
Accepter l’échec
Les entrepreneurs qui lancent des projets à répétition subissent beaucoup d’échecs pour chaque réussite. Le message au Canada Summit était toutefois que la société ne doit pas mépriser les innovateurs dont l’idée n’a pas fonctionné quelle que soit la raison. Le Canada a besoin de plus d’entrepreneurs et les tentatives d’innovation doivent être encouragées.
« Nous avons une grande aversion à l’échec », affirme l’ex-gouverneur de la Banque du Canada David Dodge. La réponse générale à l’échec est de réduire la prise de risque. M. Dodge encourage la prise de risque à tous les niveaux de l’écosystème et il estime que les échecs devraient être perçus comme des étapes sur le chemin de la réussite.
« L’échec est pratiquement un insigne d’honneur », affirme Mark Barrenechea, pdg et dirigeant principal de la Technologie chez OpenText, la plus grande entreprise de logiciel au Canada.
David Dodge mentionne qu’il y a une différence entre le Canada et les États-Unis en ce qui concerne la perception de l’échec. Le Canada ne peut continuer à pénaliser l’échec économiquement ou socialement comme il a eu tendance à le faire dans le passé, indique-t-il.
C’est maintenant le temps
Étant donné que la croissance mondiale ne cesse de diminuer, les économistes estiment que les taux de croissance d’avant la crise financière dans les pays développés sont chose du passé. « Nous sommes dans un nouveau monde où le potentiel de croissance est moins élevé qu’il y a 15 ans », ajoute-t-il.
C’est donc une période cruciale pour l’innovation au Canada. Andrei Sulzenko affirme que les améliorations en productivité, propulsées par l’innovation, sont la source la plus durable de croissance pour l’avenir du Canada.
Version originale : Fixing Canada’s innovation conundrum demands multi-pronged approach
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