NEW YORK- Il y a près de 20 ans, les titres des journaux se demandaient si Internet allait libérer la Chine. Ils parlaient tout d’abord de Li Hongkuan, un militant pro-démocratie qui était confiant, avait la langue bien pendue et qui publiait le premier bulletin électronique dissident chinois, en envoyant des informations non censurées à des centaines de milliers d’adresses.
Aujourd’hui, Li est de retour, mais il n’utilise plus le courrier électronique. À l’ère des médias sociaux, il pense qu’il y a un outil beaucoup plus puissant pour saper le règne du Parti communiste chinois : WeChat.
Appelé « Weixin » en chinois, WeChat compte 700 millions d’utilisateurs actifs en Chine, ce qui en fait la plate-forme de médias sociaux la plus populaire du pays. En Chine, où Facebook, Instagram et Twitter sont bloqués, WeChat est un outil diversifié et pratique pour remplir le vide. Il peut également être utilisé pour payer les achats dans des magasins, réserver un taxi, envoyer de l’argent aux amis, régler les additions du restaurant, lire les informations et réserver une salle de karaoké.
Il a aussi une différence cruciale par rapport à d’autres applications de médias sociaux chinois : ses communications sont considérées comme « privées ». Au lieu de diffuser des idées dans l’espace public, comme le fait Twitter, les communications sur WeChat sont limitées au cercle d’amis présents sur l’application. Ces dernières années, l’utilisation de Sina Weibo, l’équivalent chinois de Twitter, a été accompagnée par une répression et des punitions sévères, ce qui a refoulé la dissidence dans la clandestinité.
La nature privée de WeChat est à la fois une aide et un obstacle pour quelqu’un comme Li. Il vit depuis plusieurs dizaines d’années aux États-Unis, mais il essaye toujours d’éveiller un désir pour la démocratie parmi ses compatriotes.
Le côté privé de WeChat signifie qu’il y a une plus grande marge de manœuvre : on peut diffuser des idées pro-démocratie, des discours anti-parti et parler des questions sociales sensibles. Lorsqu’un journaliste avait récemment installé cette application, l’un des premiers messages qu’il a reçu provenait d’un pratiquant de Falun Gong, une pratique spirituelle traditionnelle chinoise, ciblée pour l’élimination depuis 1999. Il semble que tant que les autres utilisateurs ne dénoncent pas l’expéditeur du message, beaucoup de choses peuvent être communiquées.
L’inconvénient pour Li est la portée beaucoup plus limitée de WeChat qui s’applique aux communautés en ligne fragmentées. Les groupes de discussion de WeChat ne peuvent compter plus de 500 personnes.
Toutefois, Li se réjouit de pouvoir opérer par le biais de cette application. Assis à l’hôtel Sheraton à Flushing, la banlieue de New York densément peuplée par des Chinois, Li a montré comment il utilise WeChat pour aider les Chinois en Chine à porter un nouveau regard sur leur gouvernement.
« Quelle sera la fin du système pervers du vol de la terre en Chine ? », a été le titre d’un post qu’il a partagé. Un autre post conseillait aux citoyens chinois de donner au réseau Wi-Fi installé dans leur domicile « un nom lié à la liberté, à la démocratie, ou à d’autres termes transmettant des valeurs universelles ». Ainsi, les voisins dans le même immeuble pourraient voir sur leur réseau Wi-Fi des messages comme « opposer la persécution totalitaire, opposer la violente dictature » ou « nos valeurs universelles sont l’avenir de la Chine ».
Des messages consacrés aux sujets semblables se poursuivaient sans fin.
« Vous propagez la vérité et ils vont commencer lentement à la reconnaître », a confié Li Hongkuan. « Au début, ils pourront mal comprendre, mais le partage des idées entre eux aide les nouvelles idées à apparaître ».
Il tire parti des termes de la propagande officielle comme le « rêve chinois » pour se référer au « rêve américain » et explique comment le sens des deux termes pourrait devenir plus proche. Il commente les événements d’actualité pour mettre en évidence la nature non durable du règne du Parti.
Le but de Li Hongkuan et de semer et transmettre des idées subversives, en comptant sur les participants des chatrooms (salons de conversation) pour la transmission à un public plus large, en propageant ainsi la dissidence. Mais de savoir si ces sujets font naître, oui ou non, un grand intérêt, reste une question centrale.
« Tant que les gens ne dénoncent pas ce que vous dites, cela n’a pas d’importance. Personne ne dénonce plus ces choses », a expliqué Li. Toutefois, l’image d’ensemble est plus complexe. La plupart des utilisateurs de WeChat se contentent de l’utiliser que pour discuter avec des amis et réserver des salles de karaoké ; d’autres ont peur de la surveillance.
Michael Zhang, un ouvrier qui partage des idées pro-démocratie et qui avait récemment émigré de la Chine aux États-Unis, a entendu notre conversation au Sheraton. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il en pensait, il a répondu : « Je n’utilise pas WeChat. Il est surveillé. Le gouvernement fera du tort à votre famille ! »
Version anglaise : Chinese Dissent in an Age of Social Media
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