À moins de 50 jours du début des Jeux olympiques à Paris, l’éventualité d’un changement de majorité au lendemain des élections législatives le 7 juillet suscite des inquiétudes pour le déroulement des JO. Les risques de changement du ministre de l’Intérieur ou du ministre des Sports pourraient compliquer l’exécution de la fête, dans un contexte extérieur de sécurité renforcée face à la menace islamiste et aux pressions de la Russie et un contexte intérieur de fortes violences venant de l’extrême gauche, opposée au gouvernement et encore plus au RN.
L’annonce faite par Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale suite à la large victoire du RN aux européennes pourrait venir percuter l’organisation des JO, les élections législatives se tenant les 30 juin et 7 juillet, alors que l’événement sportif doit commencer le 24 juillet avec les premières épreuves.
Un changement politique de cette ampleur dans un pays hôte à 50 jours des JO est sans doute une première dans l’histoire des Jeux.
Des interrogations sur l’organisation des Jeux
Eric Henry, délégué national du syndicat de police majoritaire Alliance, se pose la question en cas de changement de gouvernement : « La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques sera-t-elle maintenue en milieu ouvert sur la Seine ? », se demande-t-il.
« L’élection va capter 100 % de l’attention. Et toute la phase de montée en puissance des JO dans trois semaines, deux semaines, etc, tout cela va être phagocyté par la politique », décrypte pour l’AFP l’ex-député PS spécialiste de sport Régis Juanico. « Les JO vont être profondément percutés par cette campagne », ajoute-t-il.
Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques de France, qui risque sa place au cours d’un éventuel remaniement à la veille des Jeux, a rappelé que beaucoup d’engagement, de sérieux et de professionnalisme ont été mis sur le projet. Elle met en garde son possible successeur : « C’est un dossier complexe et difficile dans lequel il faut beaucoup de compétences », a-t-elle déclaré.
Pour Jean-Loup Chappelet dans L’Indépendant, spécialiste de l’olympisme à l’Université de Lausanne, « si Renaissance perd, cela ouvrira une période d’instabilité ministérielle à partir du 8-9 juillet. Un nouveau gouvernement éventuel ne sera pas en place avant mi-juillet au mieux, opérationnel plutôt fin juillet, et les choses commenceront concrètement en septembre ». Mais ce n’est « pas extraordinaire pour l’image » analyse-t-il. Pour Claude Moniquet sur CNews, spécialiste du terrorisme et du renseignement, « si le 7 juillet, le RN est majoritaire, toute la rue peut s’enflammer à moins de deux semaines des JO », a-t-il analysé.
Des manifestations de l’extrême gauche au lendemain des élections
Des milliers de personnes se sont rassemblées lundi soir dans plusieurs villes de France pour dire leur opposition au RN qui, dénoncent-elles, se retrouve « aux portes du pouvoir », après sa poussée dans les urnes la veille et l’annonce d’une dissolution de l’Assemblée nationale.
Place de la République à Paris, plusieurs milliers de personnes selon un journaliste de l’AFP — 3000 selon la préfecture de police — parmi lesquelles beaucoup de jeunes, se sont réunies à partir de 20 h. Dans la foule alentour, les drapeaux palestiniens se mêlaient à ceux de la CGT, de l’Unef et d’autres organisations ayant appelé au rassemblement. L’atmosphère s’est tendue peu avant minuit, les forces de l’ordre dissipant le cortège à coups de grenades de désencerclement.
À Toulouse, la mobilisation a été forte, 6200 personnes se sont réunies selon la police. Des incidents ont eu lieu dans la Ville rose en fin de manifestation : des participants se sont emparés d’un engin de travaux, ont cassé des vitrines et brûlé des poubelles. Les policiers ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser la foule.
À Marseille, deuxième ville de France, qui a placé en tête la liste du RN lors des élections européennes dimanche, plusieurs milliers de personnes — 2200 selon la police — se sont rassemblées à l’appel de plusieurs syndicats, de partis de gauche ou de la Ligue des droits de l’Homme devant la préfecture de région.
À Nantes, les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants et des poubelles étaient en feu sur le passage du cortège qui s’est dissipé dans le calme.
À Lyon, à l’appel de mouvements de gauche et d’ultragauche, les manifestants étaient 2800 selon la police. Certains ont été empêchés de traverser un pont pour rejoindre le quartier du Vieux Lyon, fief de la droite radicale, par un cordon policier « qui a fait usage de gaz lacrymogène après des jets de projectiles » de ces manifestants en sa direction, selon la préfecture. Des poubelles ont également été incendiées en fin de soirée.
Anne Hidalgo inquiète et confiante à la fois
« Je ne peux être qu’inquiète » après le résultat du RN, a déclaré l’édile de Paris Anne Hidalgo. « Après la sidération » de l’annonce de la dissolution, « une dissolution juste avant les JO c’est extrêmement troublant mais comme tous les responsables politiques je serai sur le terrain », commente-t-elle, assurant néanmoins que « rien ne viendra gâcher les Jeux ».
Mme Hidalgo a reproché à Emmanuel Macron d’avoir mené une politique « de plus en plus à droite » avec l’intention de « tuer », « d’anéantir les partis de droite républicaine », s’est-elle exprimé. Selon elle, il s’était déjà attaqué « à la gauche républicaine ». « Quand vous supprimez la gauche républicaine et la droite républicaine, il reste le chaos : des extrêmes, des populismes et des gens qui font des coups ».
Interrogée sur le fait de savoir si elle pourrait « accueillir le monde » avec un éventuel Premier ministre du RN, la maire de Paris a répondu qu’elle accueillerait « le monde en tant que maire de Paris, avec le président de la République, le président du CIO et Tony Estanguet », a-t-elle souligné.
Le CIO veut jouer la carte de l’assurance
Les élections législatives en France sont « un processus démocratique qui ne va pas perturber les JO », a affirmé lundi Thomas Bach, le président du Comité international olympique (CIO). « La France est habituée à faire des élections et ils vont le faire encore une fois, on aura un nouveau gouvernement et un nouveau Parlement et tout le monde va supporter les JO », a déclaré Thomas Bach, au sujet des conséquences possibles de ce scrutin dont le deuxième tour est prévu à trois semaines de l’ouverture des Jeux d’été.
« On a déjà fait face à des adaptations qui ont été fortes, une dizaine d’élections depuis la création du comité de candidature, on a toujours su travailler avec les acteurs publics, on est dans la dernière phase […] les principales décisions ont déjà toutes été prises, on est dans l’opérationnalité », a-t-il résumé.
« Les Jeux, ce sont sept années de préparation et nous avons déjà démontré notre capacité collective à faire avancer le projet même dans des contextes électoraux », souligne-t-on à la direction du Cojop, rappelant que « douze élections ont été organisées depuis la phase de candidature », en 2015.
Reste à voir si les JO ne pourraient pas, au contraire, effacer cette crise politique et rassembler l’ensemble des Français autour des valeurs de l’universalité et de la démocratie.
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