Une hausse du budget et un arsenal de mesures : Éric Dupond-Moretti dévoile jeudi son « plan d’actions » issu des États généraux de la justice, marqué par une nouvelle hausse du budget du ministère pour répondre au constat de « délabrement avancé » de l’institution.
Selon une source proche du dossier, le garde des Sceaux, arrivé Place Vendôme à l’été 2020, va s’engager jeudi à porter le budget de la Justice de 9,6 à 11 milliards d’euros en 2027.
Sur cinq ans, cet engagement représente une enveloppe supplémentaire de 7,5 milliards d’euros, un effort budgétaire qui dépasse de loin celui consenti sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy (+2 milliards) comme sous celui de François Hollande (+2,1 milliards), fait-on valoir à la Chancellerie.
Un chantier titanesque
Ces financements seront sanctuarisés dans une prochaine de loi de programmation et d’orientation pour financer les promesses d’embauche de 10.000 fonctionnaires de justice d’ici à 2027, dont 1500 magistrats, et atténuer le « sous-formatage chronique des effectifs » relevé par les États généraux.
La feuille de route que doit présenter M. Dupond-Moretti à partir de 10h00 devant la presse s’inspirera des quelque 50.000 consultations de professionnels et citoyens menées dans le cadre de ces États généraux lancés en octobre 2021, et du rapport de synthèse très alarmiste remis au chef de l’État en juillet.
Malgré une nouvelle hausse du budget de la Justice pour 2023, beaucoup de voyants restent au rouge encore aujourd’hui : des magistrats et greffiers sont redescendus fin novembre dans la rue pour crier leur « désarroi » et la surpopulation carcérale vient de battre des records.
Dans le détail, le plan devrait également introduire des mécanismes pour accélérer les procédures de la justice civile qui connaît, selon le rapport des États généraux, un « lent déclassement » et « ne parvient plus à trancher les litiges dans des conditions décentes » alors qu’elle représente 60% de l’activité judiciaire (divorce, contentieux salarié-employeur…).
La justice pénale devrait également figurer au menu avec un chantier titanesque: la refonte du code de procédure pénale qui se fera en grande partie « à droit constant », sans nouvelle loi.
Cette réforme, annoncée fin octobre par le chef de l’État Emmanuel Macron, vise à simplifier cette bible procédurale dont le nombre d’articles a enflé de près de 40% entre 2008 et 2022.
A côté de cette « recodification », l’exécutif devrait également amorcer une réflexion sur le sujet inflammable des procédures régissant les enquêtes judiciaires.
Les États généraux avaient jugé le système actuel, qui repose sur trois types d’enquêtes (flagrance, préliminaire, information judiciaire), facteur « d’inégalités » et de confusion, mais s’étaient déclarés favorables au maintien du juge d’instruction.
Situation « effrayante » dans les prisons
Le ministre devrait également évoquer la situation dans les prisons « de plus en plus en plus effrayante », selon le récent diagnostic du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.
En décembre, le nombre de détenus a battu un record pour le deuxième mois d’affilée, avec 72 836 détenus pour 60 698 places opérationnelles, soit une densité de 120%.
Face à ce mal chronique, les États généraux avaient plaidé pour un mécanisme fixant pour chaque établissement un seuil de « suroccupation majeure » au-delà duquel pourraient être « envisagées » des mesures de « régulation » de la population carcérale.
Ce mécanisme a les faveurs de certains syndicats alors que la Chancellerie préfère traditionnellement insister sur la construction en cours de 15.000 nouvelles places de prison prévue d’ici 2027 et sur l’entrée en application de réformes déjà existantes.
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