Éducation : les enseignants ont une semaine pour organiser un « temps d’échange sur l’antisémitisme et le racisme »

Par Sarita Modmesaïb
21 juin 2024 17:43 Mis à jour: 28 juin 2024 15:29

N.D.L.R. Ajout de commentaires d’acteurs de l’éducation.

Suite à l’agression à caractère sexuel et antisémite d’une jeune fille de 12 ans à Courbevoie (Hauts-de-Seine), le temps d’échange sur l’antisémitisme et le racisme, souhaité par Emmanuel Macron, s’effectuera finalement « d’ici la fin d’année » dans les écoles et collèges.

« Aucun élève ne peut être laissé sur le bord du chemin, ni se voir dénier son égale appartenance à la société. Il est de notre devoir de nous battre contre le racisme et l’antisémitisme sous toutes leurs formes, pour éradiquer définitivement ces fléaux. »

C’est en ces termes que Nicole Belloubet, ministre de l’Éducation, a demandé aux chefs d’établissement d’organiser « d’ici à la fin de l’année scolaire », « d’organiser pour les élèves un temps d’échanges, d’enseignement et de réflexion sur le racisme et l’antisémitisme ».

Cette demande de la ministre fait suite au souhait exprimé par Emmanuel Macron en Conseil des ministres d’organiser cette séance d’une heure pendant cette semaine même.

Cette demande fait réaction au viol en réunion d’une jeune fille de 12 ans par d’autres jeunes du même âge à Courbevoie. Des insultes à caractère antisémites auraient motivé cette agression. Trois mineurs ont été mis en examen suite à cette agression. Cette agression avait suscité l’émoi notamment chez les citoyens qui ont organisé depuis plusieurs rassemblements, mais aussi au sein de la classe politique en cette période électorale.

« Cet acte est malheureusement révélateur de la propagation de discours de haine antisémites et racistes dans notre société », écrit ainsi la ministre de l’Éducation, ajoutant que « l’antisémitisme est l’exacte négation du projet républicain ».

Les enseignants sauront employer « les termes les plus adaptés à leurs élèves, en particulier selon leur âge »

Dans son courrier, la ministre rappelle que cette séance se déroulera « dans le prolongement des enseignements et actions d’enseignement moral et civique menés tout au long de l’année ».

Nicole Belloubet promet également la mise en ligne de « ressources pédagogiques qui seront mises à disposition sur le site Eduscol à compter du 21 juin. Ils pourront notamment se référer à une version actualisée du vademecum « Agir contre le racisme et l’antisémitisme », rédigé conjointement par la DILCRAH, le Conseil des sages de la laïcité et la DGESCO. »

Ce vademecum, d’une centaine de pages, permet d’identifier les actes et paroles antisémites et racistes et propose des réponses selon des situations spécifiques.

La ministre conclut son propos en rappelant que « comme toujours », les enseignants sauront employer « les termes les plus adaptés à leurs élèves, en particulier selon leur âge. »

Si les enseignants du primaire ont jusqu’au 5 juillet pour organiser cet échange, le timing est plus serré au collège, puisque la plupart des établissements ferment dès le 28 juin afin d’accueillir les épreuves du brevet.

Problématique « d’établir une équivalence entre racisme et antisémitisme »

Au lycée, les épreuves du bac ayant débuté, les lycéens ne sont donc pas inscrits dans le dispositif.

Les réactions n’ont pas tardé dans le corps enseignant et ont même dépassé nos frontières. A Genève, Olivia Daellenbach Habib considère ainsi « que les échanges sur le racisme et l’antisémitisme au collège et au lycée sont d’une importance capitale ». Cette enseignante en français et en culture générale au lycée estime que « les échanges permettent aux élèves de mieux comprendre les réalités et les impacts du racisme et de l’antisémitisme. En abordant ces sujets, nous pouvons déconstruire les stéréotypes et les préjugés qui existent dans la société. »

Pour cette enseignante, il faut « discuter de ces sujets » qui  « aident les élèves à développer leur empathie et leur sensibilité envers les expériences des autres. Cela les encourage à se mettre à la place des victimes de discrimination et à comprendre la gravité de ces actes. En ayant des conversations ouvertes sur le racisme et l’antisémitisme, nous créons un environnement scolaire plus inclusif et respectueux. Les élèves apprennent à valoriser la diversité et à respecter les différences de chacun. Ces échanges préparent les élèves à devenir des citoyens engagés et responsables. »

Autre acteur du milieu éducatif dont l’avis est parfois peu pris en compte, bien qu’il soit en contact direct et permanent avec les élèves: l’assistant d’éducation. Rayan Chelbani en est un, officiant au Collège Florimont de Genève. Lui n’est pas vraiment convaincu quant à ce type de séance, estimant problématique « d’établir une équivalence entre racisme et antisémitisme ».

« Même si le premier est hideux, il s’est rarement manifesté dans une forme exterminationiste, contrairement au premier, poursuit ce diplômé en Lettres de 31 ans. L’antisémitisme s’est souvent montré sous des formes de massacres et tueries de masse, que ce soit dans l’Europe du Moyen-âge ou la Russie du 19e siècle, sans parler de l’Holocauste des nazis. Cependant, il est vrai que les génocides rwandais ou arméniens pourraient s’apparenter à du racisme, dans sa forme extrême », conclue-t-il.

La dégradation des valeurs morales au cours des dernières décennies

Juliette est également professeure de français au lycée en Suisse. Elle partage l’avis de Rayan, estimant que « la véritable discrimination aujourd’hui est davantage liée à l’appartenance religieuse qu’à l’origine ethnique. L’antisémitisme est une haine profondément inscrite dans l’histoire et liée à la montée des totalitarismes ; il ne peut pas être mis au même niveau que le racisme, qui est une discrimination des personnes en raison de leur appartenance à un groupe racial ou ethnique. Le racisme peut se manifester dans toutes les cultures et n’est pas le fait d’un peuple plus que d’un autre. L’augmentation de la haine raciale est la conséquence de différents facteurs dont le principal est, à mon sens, la dégradation des valeurs morales au cours des dernières décennies. Le véritable combat à mener dans les écoles est un combat contre l’obscurantisme de façon générale, qui ne peut être résolu que par la transmission de valeurs morales solides. »

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