« Elles occupent toute la plage et font leurs déjections partout », l’ouette d’Égypte décrié pour ses nuisances

Par Epoch Times avec AFP
17 octobre 2024 12:44 Mis à jour: 17 octobre 2024 13:08

Originaire d’Afrique subsaharienne, l’ouette d’Égypte a pris ses aises dans l’Est de la France, où elle n’hésite pas à déloger canards et cigognes, menaçant la biodiversité locale.

« Cela fait au moins une quinzaine d’années qu’elles sont là, mais elles ne partent plus. Et aujourd’hui leur nombre augmente », témoigne Pascal Koensgen, premier adjoint de Lauterbourg.

Dans cette commune du Bas-Rhin jouxtant le fleuve, ces gros oiseaux ressemblant à des oies et reconnaissables à leur tache brune autour de l’œil se sont installés autour d’un plan d’eau local. L’été, elles se promènent au milieu des serviettes de plages, faisant fuir canards et poules d’eau.

« C’est une oie qui défend son territoire », explique M. Koensgen. Mais le principal problème touche selon lui à l’hygiène : « Quand vous avez 50 à 100 volatiles qui viennent, ça vous pourrit une plage en 24 heures ».

« Elles sont invasives. Elles occupent toute la plage et font leurs déjections partout. Pour nos baigneurs et nos campeurs, c’est une très grande nuisance », peste Eric Beck, gérant du camping Les Mouettes, situé au bord de cette plage également prisée des bernaches du Canada, autre espèce exotique envahissante.

Une croissance exponentielle

Entre le milieu des années 1970 et l’an 2000, l’ouette d’Égypte comptait moins de 50 individus en France, où elle avait été signalée dans 16 départements, indique à l’AFP l’Office français de la biodiversité (OFB). Mais à partir de 2005, la population a connu une croissance exponentielle, et en janvier 2016, des spécimens avaient été observées dans 83 départements, avec un effectif total d’environ 2000 individus.

Elle est surtout présente dans le nord-est de la France (Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle), en partie en raison de la proximité avec la Belgique, les Pays-Bas et Allemagne où elle est bien implantée. Et affectionne particulièrement les gravières et les bords du Rhin.

« À l’origine, c’est un oiseau d’ornement qu’on mettait sur les plans d’eau, les petites mares, pour embellir », retrace Jean-François Maillard, chargé de mission et de recherche sur les vertébrés exotiques envahissants terrestres à l’OFB. Mais entre les spécimens vendus aux particuliers, ceux échappés de zoos ou venus à tire-d’aile de pays voisins, les ouettes ont proliféré.

Un retrait des ventes trop tardif

L’alopochen aegyptiaca – son nom scientifique – n’est plus autorisée à la vente depuis son inscription en 2017 sur la liste des espèces exotiques envahissantes préoccupantes de l’Union européenne. « Mais malheureusement, elle était déjà bien implantée sur le territoire », et c’était « un peu tard » regrette M. Maillard, décrivant l’impact de sa présence sur la biodiversité.

« C’est une espèce qui usurpe les nids d’autres espèces. Elle ne niche pas nécessairement au sol, comme un canard. Elle niche plutôt dans les creux ou à la cime des arbres. Elle peut par exemple occuper des nids de cigognes et évacuer ses locataires. »

L’intruse fait aussi preuve d’une « certaine agressivité envers les canards ». En conclusion, sa prolifération risque de provoquer « l’exclusion des espèces natives ».

Barrières, filets, tirs d’effarouchement… Pour limiter son essor, « on a tout essayé, mais rien ne marche, mis à part le fusil bien entendu », constate l’adjoint au maire de Lauterbourg. Depuis plusieurs années des arrêtés préfectoraux autorisant le tir de l’espèce ont été pris dans de nombreux départements. Dans le Bas-Rhin, l’ouette d’Égypte peut ainsi être tirée du 15 avril au dernier jour de février. En 2023-2024, 527 individus ont été prélevés dans le Bas-Rhin, contre 189 en 2016-2017 et 78 en 2011-2012 selon la Fédération de chasseurs du Bas-Rhin.

« Réguler permet d’avoir ponctuellement des périodes d’accalmie et permet parfois aux autres espèces de finir leur cycle de reproduction », expose Nicolas Braconnier, directeur adjoint de cette fédération. « Mais ça ne va pas régler définitivement le problème. »

« Il suffit d’avoir un plan d’eau où la végétation, le site leur convient, et l’espèce s’installe très rapidement », constate-t-il. Par ailleurs, « elle défend très bien sa progéniture, au point qu’il y a assez peu de pertes au niveau des jeunes. Si on souhaite conserver nos espèces locales, c’est sûr que ça va être un vrai problème… »

L’année dernière, des experts de l’ONU ont répertorié plus de 37.000 espèces dites exotiques (introduites par l’homme sur un territoire) dans le monde. Parmi elles, quelque 3500 sont considérées comme invasives, provoquant des dégâts majeurs sur la biodiversité.

La clé « quand il y a un premier foyer d’une espèce qu’on ne désire pas, c’est d’agir très vite pour la maîtriser et éviter qu’elle se disperse », rappelle M. Maillard. Un peu tard pour l’ouette d’Égypte, qui a fait son nid en France et risque de ne pas s’envoler de sitôt.

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