Emmanuel Abramowicz : « Le conflit israélo-palestinien est en France depuis 1983 »

Par Julian Herrero
1 novembre 2023 16:53 Mis à jour: 13 novembre 2023 18:06

ENTRETIENEmmanuel Abramowicz est membre du bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA). Il revient pour Epoch Times sur la recrudescence des actes antisémites en France depuis les attaques terroristes du Hamas en Israël le 7 octobre dernier. Il analyse également la récente visite d’Emmanuel Macron au Proche-Orient et les premières incursions de Tsahal dans la bande de Gaza.

Epoch Times : Monsieur Abramowicz, vous êtes membre du BNVCA. Pourriez-vous nous parler de l’histoire de cette association et de ses missions ?

Emmanuel Abramowicz : Le BNVCA a été créé en 2000 par Sammy Ghozlan, ancien commissaire de police en Seine-Saint-Denis, à la demande de plusieurs responsables d’associations qui avaient des remontées du terrain, de gens qui étaient agressés et qui rencontraient des difficultés à faire valoir leurs droits, comme celui de porter plainte par exemple. L’association a aussi pour but de fournir une assistance juridique, c’est-à-dire des conseils, mais aussi, des avocats aux personnes modestes. Parmi les autres missions du BNVCA, il y a aussi l’écoute. Nous avons des victimes qui se retrouvent en plein désarroi, parce qu’elles sont isolées, âgées, incomprises, et donc nous apportons aussi une assistance sous forme d’écoute. Enfin, ce que nous faisons aussi pour certaines victimes, qui n’ont pas de famille, c’est de se constituer partie civile pour elles ou avec elles lors de procès.

Jeudi 26 octobre, dans une interview du Dauphiné Libéré, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a annoncé que depuis le 7 octobre, 719 actes antisémites ont été recensés par les services de l’État. Quelques jours auparavant, il avait déjà fait état d’un bilan de 588 actes antisémites signalés, dépassant celui de la seule année 2022. Comment voyez-vous la situation ?

Cette recrudescence de l’antisémitisme n’est pas une première. La nouveauté réside dans le chiffre affreusement élevé. Nous avons par capillarité une réaction de certaines personnes qui prennent fait et cause pour la cause palestinienne, sans souvent connaître ni l’histoire de la Palestine, ni l’histoire du conflit, et qui sont entraînées à des actions non pas de soutien à la création d’un État palestinien (ce qui serait parfaitement légitime) mais de violences antisémites sur la voie publique. Je dois vous dire, à ce stade, que nous sommes en réalité très inquiets, car l’armée israélienne est à peine entrée dans Gaza et nous sommes déjà à ce chiffre incroyable, affreux, qui nous rappelle les plus tragiques années de l’histoire de France. Je voudrais également ajouter quelques éléments qui me paraissent majeurs, parce que nous entendons très souvent une sémantique sur le conflit israélo-palestinien basée sur le mensonge.

Le premier mensonge que nous entendons, c’est qu’Israël serait un pays d’apartheid. C’est totalement faux et très facilement vérifiable. Il y a dans la plus haute administration israélienne des Arabes israéliens qui sont parfaitement intégrés. Il y a de grands professeurs de médecine qui sont parfaitement intégrés et qui opèrent des gens, qu’ils soient juifs, musulmans, chrétiens, sans aucune difficulté, en toute confiance. De hauts fonctionnaires de l’administration de hauts cadres du privé et enfin des sportifs de haut niveau dans les équipes nationales de sport, sont des personnes issues de la diversité. Ceux qui affirment qu’Israël est un État d’apartheid font preuve de mensonge. Le deuxième mensonge est que les Gazaouis se révoltent contre la colonisation. Je regrette, mais à Gaza, il n’y a plus un seul juif depuis 2005.

À l’époque, Ariel Sharon avait déjà démembré toutes les colonies. Et donc depuis 2005, il n’y a plus d’Israéliens ou de juifs à Gaza. Ce qui d’ailleurs devrait tous nous interpeller. Les Gazaouis qualifient Israël d’État apartheid alors qu’eux-mêmes la pratiquent. Essayez d’imaginer un juif qui voudrait s’installer à Gaza, il n’aurait aucune chance.

Enfin, il faudra un jour dire la vérité sur le peuple palestinien. Un peuple, ce sont des frontières, une langue, une population unie derrière un drapeau, c’est un hymne national, ce sont des rois, des reines, un système de gestion, des victoires, des défaites, etc. Ce sont tous ces éléments-là qui sont constitutifs d’un peuple. Or, au regard de la littérature et de la science que nous pratiquons, aucun de ces éléments ne correspond à la population arabe de Palestine. La notion de peuple palestinien apparaît pour la première fois en 1964 dans la charte de l’OLP, une organisation dirigée par un terroriste patenté qui s’appelait Yasser Arafat, inventeur du terrorisme moderne, dont les principales actions étaient le détournement d’avions, la prise d’otages et les attentats contre des civils dans les restaurants. C’est cela la réalité.

Un certain nombre de personnalités politiques de tous bords, mais aussi des intellectuels et d’autres experts, ont fait part de leur crainte quant au risque d’importation du conflit israélo-palestinien en France. D’autres affirment que le conflit est déjà là. Quel est votre point de vue ?

Le conflit est là depuis 1983 et je vais vous expliquer par des faits historiques, politiques vérifiables, comment cela s’est passé. En 1983, la gauche est au pouvoir en la personne de François Mitterrand qui a promis monts et merveilles au peuple ouvrier. Or, la même année, le socialisme au pouvoir est confronté aux réalités économiques et a lieu la première dévaluation. Quand on dévalue, on diminue mécaniquement le pouvoir d’achat des salariés. Et évidemment, le monde ouvrier se sent trahi parce que la gauche réduit le pouvoir d’achat de la classe sociale la plus fragile qui lui a permis de remporter l’élection de 1981. Nous assistons donc à la première trahison des électeurs ouvriers de gauche.

La seconde trahison est celle de l’immigration massive qui a été par ailleurs dénoncée dès 1981 par le secrétaire national du Parti communiste, Georges Marchais. Une immigration massive qui met en danger les ouvriers français. Nous avons donc les deux raisons qui ont constitué la double trahison du peuple ouvrier qui avait voté pour François Mitterrand. Ces ouvriers trahis par la gauche, feront le grand écart en rejoignant progressivement le Front National qui est alors présidé par Jean-Marie Le Pen. C’est l’acte I.

L’acte II commence quand les dirigeants de gauche en France se posent la question légitime de comment ils vont gagner les prochaines élections si la majorité de leurs électeurs sont partis à l’extrême droite. C’est à ce moment-là qu’apparaît un think tank qui existe toujours : Terra Nova. Cet organisme de réflexion va expliquer qu’en réalité l’équation est résolue. Il suffit de remplacer le vote des ouvriers par le vote des nouveaux migrants du Maghreb. Et c’est ainsi que la gauche va commencer à vouloir séduire un nouvel électorat qui entre en convergence avec ses luttes, c’est-à-dire la défense d’une minorité opprimée, colon égal capital, etc. Et pour accélérer le mouvement de sympathie des populations issues de l’immigration, notamment maghrébine et plus généralement musulmane vers la gauche, on va désigner les boucs émissaires tout naturels, que sont Israël et les Juifs. C’est pour cette raison que les gauchistes les plus extrémistes qui flattent ce nouvel électorat maghrébin et musulman, prennent fait et cause pour la cause palestinienne. C’est ainsi qu’est importé en France le conflit israélo-palestinien. 

Dans le cadre d’un discours prononcé à l’Assemblée nationale ce mardi 24 octobre, Marine le Pen, reprenant la position historique de la France, affirmait que la sécurité au Moyen-Orient « passera par un État palestinien ». Partagez-vous cette analyse ?

Je voudrais rappeler que mettre en place un État palestinien signifierait mettre en place un État pour une population qui n’en a jamais eu auparavant. Il n’y a jamais eu d’État palestinien. D’autre part, avec quelle autorité voudriez-vous constituer un État ? celle du Hamas ? qui a prouvé de quelles horreurs immondes, atroces, il était capable. Même l’autorité de Yasser Arafat n’était pas crédible. À l’époque, on lui avait ouvert la porte des États-Unis pour signer un accord de paix, et il avait refusé les propositions qu’Israël lui avait formulées. Cette notion d’État, je veux bien l’entendre, mais pour le mettre où ? avec qui à sa tête ? et pour faire quoi ?

En marge d’un déplacement en Israël la semaine dernière, Emmanuel Macron a proposé au chef du gouvernement israélien, Benjamin Netanyahu, d’utiliser contre le Hamas la coalition internationale bâtie quelques années plus tôt pour lutter contre Daesh. Une idée qui n’a pas fait l’unanimité dans la classe politique française. En outre, le président israélien Isaac Herzog a qualifié l’idée d’Emmanuel Macron d’ « innovante et originale » car elle « regarde dans son ensemble le Moyen-Orient ». Qu’en pensez-vous ? 

Celui qui vous parle est d’abord un Français de religion juive. C’est donc en tant qu’observateur du monde qui donne son avis que je vous réponds. C’est probablement la meilleure idée qu’ait eue notre président pour lutter contre toutes les difficultés que nous avons sur le sol national et qui sont rencontrées au Proche-Orient. Cette idée confirme que le Hamas est bien une horrible organisation terroriste comparable à Daesh. Elle est par conséquent, entendable. Maintenant, il me faut faire apparaître la contradiction présidentielle parce que vous ne pouvez pas d’un côté dire que vous allez faire une guerre à outrance contre le Hamas terroriste comme ce fut le cas contre Daesh, en empêchant Israël de faire ce qu’a fait la coalition contre l’État islamique. Il faut être cohérent. Vous ne pouvez pas demander à la démocratie israélienne  qui est en état de légitime défense, un cessez-le-feu, alors qu’en même temps vous dites qu’il faut faire une coalition pour éliminer le Hamas, comme Daesh. Alors qu’en ce moment, plus de 200 otages croupissent dans des souterrains exigus, humides, sans lumière, sans droit de communiquer… Dois-je rappeler que pour éliminer Daesh, des bombardements massifs ont été nécessaires et qu’il y a eu beaucoup de victimes civiles collatérales. Y a-t-il eu des manifestations Place de la République ?

Tsahal a déjà réalisé deux incursions la semaine dernière dans la bande de Gaza. Comment les analysez-vous ?

Je vais répondre sur la motivation de ces incursions. L’armée israélienne est l’armée la plus éthique du monde. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le colonel Kemp qui était le plus haut gradé militaire anglais, qui l’a déclaré à l’ONU il y a quelques années. Avant de bombarder des objectifs militaires, c’est la seule armée qui prévient les populations civiles plusieurs heures avant. Tsahal prend soin des populations civiles prises en otage par le Hamas. Les incursions auxquelles vous faites allusion servent probablement à déblayer le terrain pour que les militaires israéliens ne soient pas tués en essayant de débarrasser les Palestiniens de la dictature qui les opprime.

L’armée israélienne protège ses soldats comme n’importe quelle armée régulière le ferait. Une armée régulière qui prévient les civils avant de bombarder, leur indique une zone précise en permettant que les ravitaillements arrivent. C’est plus honnête éthiquement qu’un président de l’ONU qui appelle au cessez-le-feu sans mentionner les pogroms des terroristes du Hamas, sans mentionner les victimes civiles israéliennes mutilées, sans parler des otages… Peut-être avez-vous oublié que Guterres était un grand ami d’Arafat dans sa période terroriste sanguinaire des années 1970. L’Occident est malade de ses dénis, de ses peurs et de ses complicités mortifères qui manquent cruellement de mémoire et de pragmatisme.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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