Entretien – La finale de l’Eurovision se déroulait ce week-end en Suède. Un concours marqué par la victoire de la Suisse, mais aussi par des protestations contre la candidate israélienne de 20 ans, Eden Golan. Elle a été huée lorsqu’elle chantait et devait se déplacer en étant escortée par des policiers. Lors d’une conférence de presse jeudi dernier, la candidate grecque Marina Satti a fait sembler de s’endormir lorsque la chanteuse israélienne répondait aux questions des journalistes. Le grand reporter d’origine iranienne, Emmanuel Razavi, spécialiste du Moyen-Orient et auteur du livre « La face cachée des Mollahs » publié aux éditions du Cerf, livre son analyse.
Epoch Times – Comment qualifiez-vous ce qu’il s’est passé à l’Eurovision ? Peut-on parler de dérive de ce concours ?
Emmanuel Razavi – Ce qu’il s’est passé est tout simplement honteux parce que cette jeune chanteuse israélienne est venue participer à l’Eurovision qui est un concours de chansons et pas autre chose. Des lobbys ont voulu instrumentaliser cet événement pour en faire un lieu d’influence d’idées islamistes. Nous avons vraiment pu voir la convergence entre l’extrême-gauche et l’islamisme. Et c’est bien cette convergence qui a conduit à des manifestations demandant l’exclusion d’Eden Golan.
Je ne suis pas un spécialiste de ce concours, mais ce qui est certain, c’est que cette session a clairement mise en avant des idées wokistes et le wokisme est l’un des passe-plats de l’islamisme – ce qui est, à mon sens, très dangereux. Il est tout à fait louable de soutenir l’idée d’un État palestinien, personne ne dit le contraire. Mais le problème, c’est que certains profitent d’événements culturels comme l’Eurovision pour faire passer des idées antisémites.
Évidemment, les organisateurs ne sont pas responsables. C’est tout un ensemble de lobbys d’extrême-gauche, certains prétendument écologistes. On a vu, par exemple, Greta Thunberg manifester. Encore une fois, c’est honteux, il n’y a pas d’autres mots.
« Beaucoup de musulmans en France sont laïcisés et ne veulent pas entendre parler de religion », avez-vous récemment déclaré sur Cnews. D’où vient alors le problème de l’islamisme en France ?
Je pense qu’il y a beaucoup gens, comme moi, qui ne se reconnaissent pas dans le récit qui est fait aujourd’hui à l’extrême-gauche, c’est-à-dire, celui qui voudrait systématiquement que les musulmans soient des victimes de l’Occident. Le wokisme cherche à faire des minorités, des communautés toujours victimes.
Aujourd’hui, beaucoup de musulmans sont effectivement laïcisés, notamment ceux de la génération de nos parents. Le problème se trouve davantage dans la jeunesse. Il y a comme une montée en puissance de la radicalisation chez les jeunes. Ce qui est très inquiétant.
Ils sont manipulés par l’extrême-gauche, les Frères musulmans, mais aussi par des États. Je pense notamment à la Turquie, l’Iran et le Qatar. Ces trois pays sont très actifs. Et de nos jours, les Turcs le sont tout particulièrement, mais aussi le Qatar qui finance des universités aux États-Unis. L’Iran a également des partenariats avec des universités européennes et un certain nombre d’universitaires européens sont liés à Téhéran.
Nous avons l’Iran et la Turquie qui instrumentalisent le conflit entre Israël et le Hamas. Il s’agit, pour eux, de faire monter le radicalisme religieux en France, en Europe et aux États-Unis. Cela fait partie de leur stratégie.
Pour vous, l’extrême-gauche instrumentalise aussi le conflit israélo-palestinien ?
Oui parce que la stratégie des pays cités précédemment s’accompagne de relais. Ils considèrent que pour faire un bon lobbying, il faut s’appuyer sur des relais avec lesquels ils peuvent communiquer relativement facilement.
Pourquoi vont-ils chercher l’extrême-gauche ? Tout simplement parce que l’extrême-gauche, comme les Frères musulmans, porte les thématiques anti-colonialiste, anti-sioniste, antisémite – en réalité, et anti-impérialisme. Par anti-impérialisme, il faut comprendre anticapitalisme. Ces trois piliers se retrouvent à la fois chez les islamistes et l’extrême-gauche, et les islamistes s’appuient sur ces convergences.
Tout ceci a été théorisé, notamment dans les années 1920 en Iran par un responsable du Parti communiste iranien et représentant du Parti au Komintern qui s’appelait Soltanzadeh. Il a théorisé l’alliance entre les marxistes, les communistes et les islamistes en disant que les ennemis de mes ennemis sont mes amis. Et les trois avaient cette volonté de combattre l’impérialisme, donc le capitalisme, le sionisme et les Juifs. Ils ont trouvé les points importants de leurs convergences.
Cela a, par exemple, entraîné dans les années 1960, l’émergence des moudjahidines du peuple iranien. En Iran, ce sont bien les islamo-marxistes qui ont aidé Khomeini à prendre le pouvoir en 1979.
Nous assistons donc à nouveau aujourd’hui, à cette convergence entre l’islamisme frériste et l’extrême gauche, notamment en Europe, et à l’utilisation du conflit israélo-palestinien. Je rappelle que Yasser Arafat fut le premier leader politique international à avoir soutenu Khomeini lorsqu’il a pris le pouvoir. Le chef de l’OLP l’a d’ailleurs rencontré le 17 février 1979, soit deux semaines après le retour de celui, devenu leader de la République islamique d’Iran
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