« Chef des armées, pour le président, c’est un titre honorifique puisque c’est le Premier ministre qui tient les cordons de la bourse », a prévenu mercredi Marine Le Pen qui a semblé ensuite nuancer cette déclaration.
« Jordan (Bardella) n’a pas l’intention de lui chercher querelle, mais il a posé des lignes rouges. Sur l’Ukraine, le président ne pourra pas envoyer de troupes », a ajouté la patronne des députés RN interrogée sur une possible cohabitation du chef de l’État avec Jordan Bardella dans un entretien au quotidien régional Le Télégramme.
La probable candidate à la présidentielle de 2027 a semblé nuancer cette déclaration jeudi matin sur X en évoquant « le domaine réservé du Président de la République » tout en reconnaissant en même temps des compétences au Premier ministre dans ces domaines sensibles de la politique étrangère et de la défense.
« Sans remettre en cause le domaine réservé du président de la République, en matière d’envoi de troupes à l’étranger, le Premier ministre a, par le contrôle budgétaire, le moyen de s’y opposer. Jordan Bardella était donc fondé à rappeler qu’il est opposé à l’envoi de militaires français en Ukraine », a-t-elle déclaré sur X.
Une ligne rouge
Emmanuel Macron avait ouvert le débat sur l’envoi en Ukraine de soldats occidentaux en février, en refusant d’exclure l’option.
Il avait d’abord été fraîchement accueilli avant de voir des alliés – République Tchèque, Pologne, États baltes notamment – le rejoindre. Certains observateurs considéraient que la question n’était plus de savoir si, mais quand, des soldats européens seront déployés, saluant une « rupture du tabou » et plaidant pour maintenir « l’ambiguïté stratégique » qui consiste à cacher à son ennemi ce que l’on n’est pas prêt à faire.
Lors d’une présentation à Paris de son programme dans le cadre des élections législatives, Jordan Bardella avait indiqué lundi qu’il faisait au contraire de « l’envoi de troupes (françaises) au sol ukrainien » une « ligne rouge très claire ».
« Je n’entends pas créer les conditions ou mettre en œuvre » un tel projet, avait-il ajouté, faisant valoir qu’il s’agissait de « (sa) position » et « celle de (son) mouvement » politique.
A la différence du Président de la République, je suis opposé à l’envoi de troupes françaises en Ukraine.
Une majorité de Français est opposée à cette décision, et le président Zelensky lui-même ne réclame pas ces troupes. #Eurosatory pic.twitter.com/ZxFHcGWDB7
— Jordan Bardella (@J_Bardella) June 19, 2024
Surtout, Jordan Bardella s’était dit opposé à l’envoi « de missiles longue portée ou de matériel militaire » qui pourrait « frapper directement les villes russes » car « cela créerait les conditions d’une cobelligérance de la France et les conditions d’une escalade face à une puissance nucléaire ».
Cela pourrait s’opposer à la politique de soutien militaire décidée par Emmanuel Macron qui a réaffirmé lundi la « détermination sans équivoque » de la France à soutenir l’Ukraine « dans la durée ».
Si le Rassemblement national, très large favori des sondages, remportait les élections législatives des 30 juin et 7 juillet, une situation de cohabitation entre un président et un gouvernement de couleurs politiques différentes se mettrait en place.
Lors des trois précédentes cohabitations de la Ve République, le président avait conservé de larges pouvoirs en matière de politique internationale et de défense, au nom d’une interprétation de la Constitution octroyant un « domaine réservé » au chef de l’État.
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