TRADITIONS CHINOISES

Enfantins et candides sont mes professeurs : L’histoire de Su Dongpo

janvier 2, 2017 6:44, Last Updated: janvier 2, 2017 6:44
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Su Shi (1036-1101), aussi connu sous le nom de Su Dongpo, est une des quelques grandes figures de l’histoire chinoise, maître de multiples disciplines artistiques et littéraires. Il était un grand écrivain, artiste et calligraphe.

Su Dongpo ainsi que Huang Tingjian, Mi Fu, et Cai Xiang étaient connus comme les «quatre plus grands calligraphes de la dynastie Song». Sur les quatre, il était considéré comme étant le meilleur. Son père Su Xun, son frère Su He et lui-même étaient tous des écrivains célèbres. Tous les trois faisaient partie des huit plus grands écrivains des dynasties Tang et Song. Il excellait aussi en poésie.

Huang Tingjian, le fondateur de l’école de poésie Jiangxi, et Su Dongpo sont connus dans l’histoire comme étant les meilleurs poètes de leur époque. Il fonda un nouveau style de Ci (un type de poésie lyrique chinoise). Il était aussi un peintre exceptionnel. Ses peintures de fleurs et d’oiseaux étaient si fines qu’après lui, ce fut une mode pour les écrivains d’apprendre à peindre. Il était très intéressé par la cuisine et la fabrication du vin; comme il était aussi goûteur de thé, il devint maître dans ces disciplines.

Un jour, il invita plusieurs bons amis à goûter le thé. Après trois tours, l’inspiration les prit. Ils commencèrent à écrire et à réciter des poèmes pour exhiber leurs connaissances littéraires. Ils engagèrent aussi une conversation courtoise. Un des invités Si Maguang demanda en plaisantant à Su Dongpo : « le meilleur thé est blanc, alors que la meilleure encre est noire. Le meilleur thé semble lourd, alors que la meilleure encre semble légère. Le thé doit être savouré frais, alors que l’encre devient meilleure avec l’âge. Pourquoi aimes-tu ces deux choses, qui sont si différentes l’une de l’autre ? »

Su Dongpo posa sa plume, prit une petite gorgée de thé et répondit : « Le meilleur thé et la meilleure encre ont tous deux des parfums et ce sont leurs vertus. Tous les deux sont fermes et c’est leur caractère. Tout comme les personnes dignes peuvent avoir différentes couleurs de peaux allant du sombre au pâle, ils peuvent être beaux ou laids, mais leur vertu et leur conduite sont les mêmes. »

Su Dongpo était aussi un pratiquant du bouddhisme zen et s’était engagé dans la fabrication de la pilule alchimique de l’immortalité. Bien qu’il fut vif d’esprit et plein d’humour, c’était un pratiquant très sérieux et autodiscipliné. Il disait : « Personne n’a atteint l’illumination sans être extrêmement discipliné. »

Il y a beaucoup d’histoires intéressantes à son sujet et au sujet de son bon ami le maître bouddhiste zen Foyin. Celle qui suit en est une célèbre.

Un jour, Su Dongpo se sentit inspiré et écrivit ce poème :

 Je m’incline devant le ciel à l’intérieur du ciel

Minces rayons illuminant l’Univers

Les huit vents ne peuvent m’atteindre

Assis immobile sur le lotus doré violet 

Les «huit vents» dans le poème font allusion à l’éloge, au ridicule, à l’honneur, à la disgrâce, au gain, à la perte, au plaisir et à la misère, les forces interpersonnelles du monde matériel qui mènent et influencent le cœur des hommes. Su Dongpo disait qu’il avait atteint un plus haut niveau d’illumination, où ces forces ne pouvaient plus l’affecter.

Impressionné par ce qu’il avait lui-même écrit, Su Dongpo envoya un domestique porter en main propre ce poème à Foyin. Il était certain que son ami serait impressionné. Lorsque Foyin lut le poème, le maître zen écrivit «Pet» sur le manuscrit et le fit renvoyer à Su Dongpo. Su Dongpo fut choqué lorsqu’il vit ce que le maître zen avait écrit. Il sortit de ses gonds : «Comment ose-t-il m’insulter ainsi, ce vieux moine nul ? Il va devoir s’expliquer !» Plein d’indignation, Su Dongpo ordonna à un bateau de le transporter sur l’autre rive aussi rapidement que possible. Une fois arrivé, il se précipita vers le temple. Il voulait trouver Foyin et exiger des excuses. Il trouva la porte de Foyin fermée. Sur la porte, il y avait un bout de papier, avec les deux lignes suivantes :

Les huit vents ne peuvent me toucher

Un pet m’a fait traverser la rivière

Ceci stoppa net Su Dongpo. Foyin avait anticipé cette visite exaltée. La colère de Su Dongpo s’apaisa quand il comprit ce que son ami voulait dire. S’il avait été réellement homme d’un grand raffinement spirituel, pas du tout affecté par les huit vents, alors comment avait-il pu si facilement se laisser provoquer? Honteux mais plus sage, Su Dongpo repartit calmement.

Nous n’avons aucun moyen de savoir quel niveau Su Dongpo avait finalement atteint dans sa pratique. Cependant, nous pouvons imaginer qu’après cet épisode, il avança plus loin dans sa pratique et améliora son xinxing (nature de l’esprit).

Su Dongpo était doué de nombreuses façons. Sa vie fut riche et haute en couleur. D’un côté, il était charismatique, franc et ouvert d’esprit. D’un autre côté, il aspirait à être aussi innocent et candide qu’un enfant. Pendant plus d’un millier d’années, son héritage sensible et aux talents variés a survécu et fasciné les gens à travers la poésie Su, les essais Su, la calligraphie Su, les paroles Su, la peinture Su ainsi que ses célèbres recettes de poisson Dongpo et de porc Dongpo.

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