Tant Washington que l’Union européenne (UE) ont fait preuve d’une hostilité grandissante à l’égard de Pékin, en particulier pour les relations commerciales. Il arrive régulièrement que des voix s’élèvent à Washington pour évoquer la nécessité de « découpler » l’économie américaine de la Chine. Les Européens utilisent le terme « dérisquage » ou réduire les risques, ce qui est la même chose.
De façon indépendante, et aussi pour leurs propres intérêts, les entreprises américaines et européennes vont dans la même direction, face à ce qui se passe en Chine. C’est en tout cas le message transmis par trois groupes d’entreprises importants : le Conseil d’affaires États-Unis-Chine, la Chambre de commerce des États-Unis à Shanghai et la Chambre de commerce de l’Union européenne en Chine. Ces trois groupes font état d’un changement radical et négatif du sentiment de leurs membres.
Le Conseil a récemment interrogé ses 117 entreprises membres à travers la Chine. Quelque 28 % des personnes interrogées ont exprimé un pessimisme total quant aux perspectives commerciales en Chine – un record. Ce chiffre est en nette augmentation par rapport aux 21 % qui avaient exprimé de tels sentiments lors du sondage de l’année dernière. Le fait que moins de la moitié des personnes interrogées aient été en mesure d’exprimer un quelconque optimisme et que 83 % d’entre elles aient fait état d’un déclin de leurs sentiments à l’égard des affaires en Chine est peut-être encore plus significatif. Quelque 43 % ont déclaré que l’environnement commercial de la Chine s’était détérioré au cours des 12 derniers mois.
L’American Chamber a interrogé ses 325 membres et obtenu des résultats similaires. Seule la moitié d’entre eux se sont montrés optimistes quant à l’environnement commercial de la Chine dans les cinq années à venir. Il s’agit du pourcentage le plus bas jamais enregistré au cours des 24 années d’existence de l’enquête. En 2021, il y a à peine deux ans, 78 % des membres étaient optimistes.
La Chambre de commerce de l’Union européenne en Chine, plus importante et comptant 1 700 membres, n’a pas réalisé d’enquête officielle ces derniers temps. Néanmoins, son président, Jens Eskelund, a indiqué que ses membres ont diminué, ajoutant que le nombre d’Européens en Chine est aujourd’hui plus faible qu’il ne l’a jamais été au cours des trois dernières décennies.
Toutes les personnes interrogées, qu’elles soient américaines ou européennes, ont donné les mêmes raisons pour expliquer leur pessimisme croissant. Selon eux, une partie des raisons découle de l’attitude hostile à l’égard de Pékin qui se développe dans les capitales occidentales, en particulier les mesures prises par le président Joe Biden pour limiter les exportations de technologies vers la Chine et restreindre les investissements américains dans les technologies chinoises.
Plus encore, ils ont noté l’évolution de l’environnement politique chinois. De nombreux membres ont attiré l’attention sur les restrictions imposées par Pékin aux exportations de terres rares et d’autres matériaux essentiels à la production de batteries et de véhicules électriques. Les nouvelles lois anti-espionnage et les règles régissant la collecte de données et les transferts transfrontaliers d’informations figurent toutefois en tête de liste.
Sur ce dernier point, les Américains et les Européens ont fait référence à l’ordre donné par Pékin aux fonctionnaires de ne pas emporter d’iPhones ou d’autres appareils de marque étrangère au bureau. Les réactions à la manière dont Pékin a utilisé sa nouvelle loi anti-espionnage pour perquisitionner les bureaux du Mintz Group, un consultant américain spécialisé en diligence raisonnable, ont été plus virulentes. La cause était la collecte de données sur des entreprises chinoises, en d’autres termes, l’essence même de l’activité de Mintz. Les personnes interrogées ont également noté que les autorités chinoises avaient ensuite infligé une amende de 1,5 million de dollars au bureau de Mintz à Pékin. Réfléchissant à cet événement, un représentant des entreprises européennes a déploré le fait qu’en Chine, les lignes rouges de ce que l’on peut et ne peut pas faire se sont « brouillées » et que cette approche incohérente ait rendu l’environnement des affaires beaucoup plus risqué.
Outre les préoccupations politiques, aussi importantes soient-elles, les intérêts américains et européens réagissent sans doute aussi à l’augmentation des salaires chinois. Selon le Bureau national des statistiques de Pékin, les salaires en Chine ont plus que doublé au cours de la dernière décennie. Il s’agit d’un taux de croissance beaucoup plus rapide que l’équivalent dans les économies développées occidentales ou au Japon. Certes, les salaires chinois ont à peine rattrapé leurs équivalents en Europe, aux États-Unis et au Japon, mais l’écart s’est considérablement réduit.
Plus important encore, l’augmentation des coûts de la main-d’œuvre chinoise a rendu les opérations au Viêt Nam, en Indonésie, aux Philippines et ailleurs en Asie plus attrayantes qu’en Chine. Ces comparaisons sont plus significatives pour ceux qui produisent en Chine pour les vendre sur le marché mondial que pour ceux qui se sont installés en Chine pour vendre à la population de plus en plus prospère de ce pays. Cette distinction explique sans doute pourquoi le nouveau pessimisme à l’égard de la Chine est plus prononcé chez les entreprises technologiques et logistiques que chez les détaillants et les sociétés de services.
Washington et Bruxelles peuvent avoir leurs raisons de vouloir éloigner leurs économies de celle de la Chine. Il semble que Pékin ait alimenté les décisions des gouvernements occidentaux en donnant aux entreprises occidentales des raisons indépendantes de se « découpler » ou de « réduire les risques » avec la Chine. Ce faisant, la Chine perd le développement et les investissements occidentaux dont elle a bénéficié par le passé et qui ont joué un rôle si important dans son progrès économique.
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