Envoyer des supporters de l’OM dans un ancien camp d’internement, pour les confronter au fascisme

Par Epoch Times avec AFP
26 décembre 2024 12:15 Mis à jour: 26 décembre 2024 12:22

Que faire pour lutter contre la haine ? « Aller voir la réalité du fascisme », répond Rachid Zeroual, leader du principal groupe de supporters de l’Olympique de Marseille qui a embarqué, avec un rabbin, des jeunes au camp des Milles.

Ce rabbin, Haïm Bendao, reconnaît qu’il avait « un peu une boule au ventre » en arrivant avec cette soixantaine de supporters des South Winners, âgés de 15 à 25 ans, dans cette ancienne tuilerie située près d’Aix-en-Provence qui fut pendant la Seconde Guerre mondiale un camp français d’internement avant la déportation d’environ 2000 juifs.

(Wikipédia)

Mais très vite, l’agilité de la médiatrice accompagnant le groupe fait que les blagues fusent et il glisse : « c’est au-delà de mes espoirs », ils réussissent à « sortir du pire par le sourire ».

« Et si je me mettais à tenir des propos racistes, vous feriez quoi ? », demande la médiatrice. « Je te questionnerais : ‘‘pourquoi tu dis ça’’ ? », répond l’un. « Faut partir dans un débat pour lui montrer ses torts », appuie un autre. « Et on risque quoi à faire ça ? », leur demande-t-elle. « Rien ! » répondent les jeunes, prenant conscience qu’il n’y a pas de petit acte de résistance.

Et tous éclatent de rire quand l’un des anciens demande s’il peut en venir aux mains, comme l’avaient fait les Winners dans les années 80 pour chasser les « fachos du stade ».

« S’il y a un groupe qui s’est démarqué, qui a lutté contre la montée du fascisme dans les stades, c’est nous », leur rappelle de sa voix rocailleuse Rachid Zeroual, figure des South Winners, le groupe au 7500 membres qui enflamme le virage Sud du mythique stade Vélodrome.

Rachid Zeroual (à g.), leader des « South Winners », le plus grand groupe de supporters de l’Olympique de Marseille, et Haim Bendao, rabbin des quartiers nord de Marseille, participent à une visite du Camp des Milles, un centre d’internement et de déportation pendant la Seconde Guerre mondiale à Aix-en-Provence, dans le sud-est de la France, le 23 décembre 2024. (MIGUEL MEDINA/AFP via Getty Images)

Aujourd’hui, il souhaite qu’« ils en prennent plein la gueule » dans ce lieu mémoriel pour se rendre compte de la « réalité » du fascisme. « Je veux pas que ça dérape et j’avais peur que ça débarque à Marseille, que les jeunes s’entretuent pour des histoires qui sont lointaines et dans lesquelles, en fait, ils ne comprennent rien ».

La cité portuaire, qui a accueilli des vagues d’exilés d’Arménie, d’Italie, du Maghreb, compte aujourd’hui les communautés juive et musulmane parmi les plus importantes du pays. Depuis toujours les groupes de supporters de l’OM affichent des valeurs fortes d’anti-racisme mais « lors de déplacements, on est confronté à des groupes qui ont des idéaux fascistes, on voit des saluts nazis », raconte Jules Sitruk, 26 ans.

Mohamed-Ali Ahmaidi, 21 ans, se dit « touché » de traverser les allées du camp, glaciales en ce jour de mistral, et d’imaginer les internés dormir sur ce sol rouge argileux et poussiéreux où tout le monde toussait et crachait du sang.

« Il ne faut pas tout le temps croire ce qu’on voit, surtout sur les réseaux, sur les téléphones. C’est très important de savoir ce qui s’est passé », estime-t-il. Pour lui, il faut que dans le stade on puisse continuer à « manger ensemble, boire un coup », sans oublier surtout ce que « chacun peut apporter à l’autre ».

« Le communautarisme est de plus en plus présent parce que les gens ne vivent plus ensemble », embraye Emmanuel Cayo, 26 ans. Le vivre-ensemble, une obsession chez les South Winners qui multiplient depuis le 7 octobre 2023 les initiatives pour éviter une importation du conflit.

Une figure du dialogue inter-religieux

« Si on exportait la paix plutôt ? », sourit Haïm Bendao, kippa et tee-shirt noirs assortis et veste kaki qui officie depuis 25 ans dans les quartiers Nord et est une figure du dialogue inter-religieux dans la ville.

En janvier, ils débrieferont cette visite. « J’ai envie que ce qui doit être dit violemment ou pas violemment soit dit (…) je veux arriver à cette discussion sur le conflit israélo-palestinien et qu’on ne mélange pas tout », espère-t-il.

« Si ça en fait changer un sur les 60, c’est toujours un de gagné. Et ça en fera réfléchir beaucoup », conclut Rachid Zeroual.

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