Des hommes armés ont fait irruption mardi après-midi sur le plateau d’une télévision publique (TC) à Guayaquil (sud-ouest de l’Équateur), prenant en otage des journalistes et d’autres employés, selon les images diffusées en direct par cette chaîne
« Ne tirez pas, s’il vous plaît, ne tirez pas ! », crie une femme au milieu des coups de feu, tandis que les assaillants, munis de pistolets, fusils à pompe et certains de grenades artisanales, frappent et forcent les personnes terrorisées à se mettre au sol.
L’un d’entre eux est encagoulé, d’autres portent capuches et casquettes. D’autres encore ont le visage à découvert ou se filment avec leur téléphone portable, tandis que plusieurs d’entre eux font avec les doigts des deux mains les habituels signes de reconnaissance des bandes criminelles liées au narcotrafic qui font régner la terreur en Équateur.
?? | URGENTE: Delincuentes irrumpieron en TC Televisión y secuestran a todos en vivo y directo en Guayaquil, Ecuador. pic.twitter.com/ob1yleusOc
— Alerta Mundial (@AlertaMundoNews) January 9, 2024
« Ils sont entrés pour nous tuer, mon Dieu protégez-nous », a envoyé à un correspondant de l’AFP, dans un message WhatsApp, l’un des journalistes captifs. Des plaintes sont audibles en bruit de fond.
Au milieu des coups de feu, la diffusion de ces images surréalistes se poursuit en direct pendant de longues minutes, malgré l’extinction des lumières sur le plateau et la caméra qui se fige. Jusqu’à apparemment l’intervention de la police aux cris de « Police, police ». « Les unités de la police nationale ont été alertées de cet acte criminel et sont déjà sur les lieux », a déclaré la police dans un message à la presse.
Une crise sécuritaire sans précédent
Tirs en direct sur un plateau de télévision, gardiens de prison ou policiers pris en otages, écoles et magasins fermés : l’Équateur est plongé, selon son président, dans un « conflit armé interne » avec les gangs de narcotrafiquants qui a fait déjà fait au moins 10 morts.
Dans un décret mardi, au troisième jour d’une crise sécuritaire sans précédent, le président Daniel Noboa a ordonné « la mobilisation et l’intervention des forces armées et de la police nationale » pour « garantir la souveraineté et l’intégrité nationale contre le crime organisé, les organisations terroristes et les belligérants non-étatiques ».
Après avoir décrété l’état d’urgence lundi au lendemain de l’évasion d’un chef de gang redouté, M. Noboa, 36 ans, plus jeune président de l’histoire du pays, a ordonné mardi la « neutralisation » des bandes criminelles dont il a fourni une liste exhaustive, soulignant la nécessité pour les forces armées d’agir « dans le respect des droits de l’homme ».
⚡?? FLASH : Les citoyens équatoriens prennent les armes contre les cartels de la drogue.
On peut voir les habitants de l’Équateur s’armer et unir leurs forces à celles de la police pour lutter contre la montée du narcoterrorisme qui déferle sur leur pays.
Pour rester informé,… pic.twitter.com/Lyb1jQrKBC
— Les Spectateurs (@les_spectateurs) January 10, 2024
L’Équateur, 18 millions d’habitants et naguère havre de paix, est ravagé par la violence après être devenu le principal point d’exportation de la cocaïne produite au Pérou et en Colombie voisins. Les assassinats dans les rues ont augmenté de 800% entre 2018 et 2023, passant de 6 à 46 pour 100.000 habitants. En 2023, 7800 homicides ont été comptabilisés et 220 tonnes de drogues saisies.
Adolfo Macias, alias « Fito », 44 ans, chef des Choneros – un gang d’environ 8.000 hommes selon les experts –, s’est enfui dimanche de la prison de Guayaquil (Sud-Ouest). Mardi, Fabricio Colon Pico, un chef des Los Lobos, autre puissant gang, s’est aussi évadé.
La France recommande de « différer » les déplacements en Équateur
La France demande à ses ressortissants de différer leurs déplacements en Équateur en raison de la flambée de violences en cours, selon le site du ministère des Affaires étrangères. « Dans ces conditions, les Français envisageant un voyage en Équateur dans les prochains jours sont invités à différer leurs projets dans toute la mesure du possible », recommande le site du ministère mis à jour mardi.
Les États-Unis se sont dits mardi « extrêmement préoccupés » par les violences qui ont déjà fait dix morts en Équateur. Dans ce pays d’Amérique latine, miné par la guerre des gangs et le trafic de drogues, la Chine a suspendu mercredi l’accueil du public à son ambassade.
Le Pérou a annoncé mardi soir avoir déclenché l’état d’urgence le long des plus de 1400 km de sa frontière avec l’Équateur et renforcé sa surveillance. Le Brésil, le Chili, la Colombie ont exprimé leur soutien à l’Équateur.
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