L’Ethiopie et l’Erythrée ont rouvert mardi deux postes-frontières fermés depuis 20 ans, nouvelle étape symbolique de la spectaculaire réconciliation de ces voisins de la Corne de l’Afrique. Le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed et le président érythréen Issaias Afeworki ont participé à deux cérémonies officielles, d’abord à l’extrême sud-est de leur frontière commune, ensuite au nord-ouest, a indiqué le ministre érythréen de l’Information Yemane Gebre Meskel sur Twitter.
Passage fermés en 1998 à l’aube de la guerre de deux ans qui a fait 80.000 morts
Les postes-frontières situés d’une part au sud-est entre les villes de Bure, en Ethiopie, et Debay Sima, en Erythrée, et d’autre part au nord-ouest entre Zalambessa (Ethiopie) et Serha (Erythrée), font partie des points de passage fermés en 1998 à l’aube de la guerre de deux ans qui a opposé les deux pays, faisant 80.000 morts, notamment en raison d’un différend territorial.
Une guerre froide de 20 ans entre l’Ehiopie et son ancienne province a suivi, paralysant le développement et les échanges bilatéraux, et minant la sécurité régionale. Mais, contre toute attente, une volonté d’ouverture de la part d’Abiy Ahmed en juin a été accueillie favorablement par Issaias Afeworki, amorçant un improbable rapprochement entre frères ennemis.
M. Abiy respecte le jugement de 2002 soutenu par l’ONU
Au cœur de ce dernier, la promesse de M. Abiy de respecter le jugement en 2002 d’une commission internationale soutenue par l’ONU, accordant à l’Erythrée un territoire disputé. Mardi, jour célébrant le Nouvel An éthiopien, MM. Abiy et Issaias ont visité ensemble la zone que les deux pays se disputaient pour y marquer la réouverture d’une route reliant les deux pays.
Le chef de cabinet de M. Abiy, Fitsum Arega, a expliqué que cette visite était destinée à « célébrer le Nouvel an avec des membres des forces de défense éthiopiennes et érythréennes à la suite de la normalisation complète des relations entre les deux pays ».
A Zalambessa, les soldats en poste ont enlevé les sacs de sable bloquant le passage du poste frontière, sous les vivats de milliers d’Ethiopiens et Erythréens qui se sont salués et ont dansé ensemble pour fêter cette réouverture historique, selon des images retransmises en direct à la télévision nationale éthiopienne.
Aller de l’avant, s’aider, avancer
Le président de la région éthiopienne du Tigré, frontalière de l’Erythrée, Debretsion Gebremichael, s’est adressé à la foule. « En travaillant ensemble plutôt qu’en se détruisant, en s’aidant plutôt qu’en se sabotant, nous pouvons aller de l’avant », s’est-il félicité, aspirant à ce qu’Ethiopie et Erythrée soient un « modèle de paix, de fraternité et de partenariat dans les prochaines années ».
Jadis cité commerciale dynamique et principal point de passage entre les capitales éthiopienne et érythréenne, Zalambessa avait été très affectée par la guerre et, bien que reconstruite, avait été réduite à l’état de ville fantôme par la fermeture de la frontière.
L’Ethiopie affiche des croissances économiques les plus rapides du continent
L’Ethiopie est le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique et affiche une des croissances économiques les plus rapides du continent, mais cette dernière est notamment freinée par le fait que l’Ethiopie est un pays enclavé. Car l’Ethiopie a perdu son accès à la mer Rouge lorsque son ancienne province a déclaré son indépendance en 1993 après trois décennies de guerre.
A cet égard, la réouverture des deux postes frontières est plus qu’un symbole: un accès à la mer Rouge via les ports érythréens d’Assab et de Massawa faciliterait grandement les importations et exportations éthiopiennes qui passent essentiellement par Djibouti.
Les cérémonies de mardi sont les derniers épisodes en date d’un spectaculaire rapprochement entre Ethiopie et Erythrée, amorcé par le Premier ministre réformateur Abiy Ahmed, entré en fonction en avril. Ce rapprochement s’est traduit notamment par la réouverture des ambassades à Asmara et Addis Abeba, et le rétablissement des liaisons aériennes, des relations commerciales et des lignes téléphoniques.
Depuis son arrivée au pouvoir, M. Abiy a multiplié les réformes, faisant libérer de nombreux opposants, ordonnant la levée de l’état d’urgence ou encore l’ouverture au secteur privé du capital des grandes entreprises publiques.
DC avec AFP
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