Essonne : un maire accusé d’appeler à la délation envers ceux qui ne respectent pas le confinement dans les quartiers

Par Paul Tourège
14 avril 2020 12:46 Mis à jour: 14 avril 2020 12:46

Le maire de Montgeron a fait afficher une note appelant les habitants de deux quartiers de la commune à signaler aux forces de l’ordre celles et ceux qui ne respecteraient pas les mesures de confinement en vigueur.

Dans une note à l’attention de ses administrés datée du 8 avril, Sylvie Carillon, maire (LR) de Montgeron réélue au premier tour le 15 mars 2020, est revenue sur les mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire liée au virus du Parti communiste chinois (PCC), connu sous le nom de nouveau coronavirus.

D’après Le Parisien, le message a été affiché dans les halls des immeubles des quartiers populaires de la Forêt et de l’Oly.

« Si le respect de ce dispositif est absolument indispensable pour lutter contre la propagation du coronavirus, j’ai toutefois bien conscience qu’il implique un effort supplémentaire pour les habitants qui résident en appartement. Aussi, je tiens à vous remercier sincèrement pour votre civisme. Dans leur immense majorité, les Montgeronnais respectent en effet bien le confinement », écrit l’édile.

« […] Je souhaite enfin vous assurer que les forces de sécurité sont pleinement mobilisées pour faire respecter ce dispositif et ont déjà dressé de nombreuses verbalisations à l’encontre de celles et ceux qui pensent pouvoir s’y soustraire. La surveillance sera d’ailleurs encore renforcée dans les prochains jours », ajoute Mme Carillon.

« Dès lors, si vous êtes témoins du non-respect du confinement, je vous invite à le signaler à la police municipale […] ou nationale (en composant le 17) afin que les forces de sécurité puissent intervenir dans les meilleurs délais », poursuit le maire de Montgeron.

Un paragraphe que certains, notamment parmi l’opposition municipale de cette ville de 24 000 habitants située à une vingtaine de km au sud-est de Paris, considèrent comme un appel à la délation.

« Nous avions décidé de garder le silence durant cette situation exceptionnelle. Mais là, la ligne rouge a été franchie. Je suis d’accord avec 90 % de cette note, mais ce paragraphe n’est pas acceptable. Un rectificatif doit être fait. Ce message risque d’exacerber les tensions dans les quartiers. Les forces de l’ordre pourraient se retrouver submerger par des appels calomnieux qui donneraient lieu à des conflits de voisinage », explique Cécile Ciéplinski, conseillère municipale d’opposition et tête de liste Divers Gauche pendant les dernières élections.

« Les habitants ne pourront se baser que sur des suspicions. Le confinement joue sur le moral de tout le monde, je ne suis pas sûr que c’était la peine d’en rajouter. La mairie devrait prôner l’apaisement », abonde Stefan Milosevic, conseiller municipal d’opposition élu en mars sur une liste sans étiquette ayant obtenu 7,74 % des voix.

Le maire assume et dénonce l’utilisation « de références historiques totalement inappropriées »

Contactée par Le Parisien, Sylvie Carillon assume la note placardée dans les halls d’immeubles des quartiers de la Forêt et de l’Oly.

« J’ai voulu signaler aux habitants de ces deux quartiers qu’ils ont aussi le droit de faire intervenir la police. Certains ne dorment plus. Dans les cages d’escalier, ils peuvent être une quinzaine à se regrouper tous les jours jusqu’à parfois deux heures du matin. Les gens sont traumatisés, contraints de les frôler pour rentrer chez eux », souligne l’édile.

« J’assume totalement le courrier que j’ai adressé et suis profondément choquée par l’utilisation de mots ou de références historiques totalement inappropriées. Je rappellerai donc à ceux qui l’ignorent que la délation est le fait de donner des informations concernant un individu pour des motifs contraires à la morale. En l’espèce, c’est donc tout le contraire », a-t-elle ajouté dans un communiqué publié sur le site de la mairie de Montgeron.

Interrogées par Le Parisien, les forces de l’ordre montgeronnaises ne trouvent pour leur part rien à redire au message rédigé par le premier magistrat de la ville.

« Nous recevons déjà énormément d’appels d’habitants qui nous signalent le non-respect du confinement. Il s’agit souvent de violation manifeste des règles, comme lorsque des personnes se regroupent pour jouer au football ou pour discuter. Nous ne pouvons pas être partout. Ces informations nous permettent de réagir rapidement », conclut un policier.

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