ENTRETIEN – Le 7 octobre, au lycée Sévigné à Tourcoing, une enseignante a été giflée par une élève parce qu’elle lui avait demandé de retirer son voile. L’enseignante Eve Vaguerlant, auteure de « L’effacement des mères » (L’Artilleur, 2024) analyse pour Epoch Times cette agression. Dans cet entretien, elle livre également son regard sur la situation de l’école quatre ans après l’assassinat de Samuel Paty.
Epoch Times : Eve Vaguerlant, de quoi cette agression est-elle, selon vous, le fruit ?
Eve Vaguerlant : Cette agression est à la fois le fruit d’un laxisme au sein de l’Éducation nationale, où les élèves peuvent multiplier insolences et provocations sans jamais être réellement sanctionnés (rappelons qu’il n’y a jamais d’exclusion réelle puisqu’un élève exclu est toujours replacé dans un autre établissement), et d’un phénomène d’islamisation qui touche la société tout entière et tend à effacer les mœurs françaises dans nombre de quartiers.
En l’occurrence, le laxisme de l’école n’est que le reflet du laxisme de l’État, qui a laissé l’islam radical s’implanter en France par le biais d’une immigration incontrôlée, qui a laissé se développer des ghettos où la loi française ne s’applique plus, qui a toléré l’apparition de mosquées salafistes partout sur notre territoire, qui a rapatrié de Syrie des djihadistes traîtres à notre pays pour les condamner à des peines de prison souvent dérisoires, etc.
Certains syndicats d’enseignants ont réagi à cette agression en dénonçant un « manque de moyens » dans l’établissement. Qu’en pensez-vous ?
C’est la réponse classique des syndicats à tous les problèmes depuis des décennies. Ils ne parviennent pas à s’extraire d’un schéma matérialiste issu du marxisme, qui ne veut prendre en considération que les problématiques sociales – selon le même raisonnement, on explique que les émeutes de banlieue seraient des émeutes « de la misère », dues à de mauvaises conditions de vie –, et qui refuse de prendre en compte d’autres facteurs comme, par exemple, le facteur identitaire, culturel ou religieux.
C’est tout le paradoxe d’une gauche qui finalement ne pense qu’à l’argent, n’envisage jamais d’autre solution que celle des « moyens », et réduit l’être humain à des conditions matérielles d’existence, incapable de voir que les hommes sont souvent mus par d’autres mobiles que le mobile pécuniaire.
Dans le cas de l’Éducation nationale, on sait bien que son budget est obèse et que cette gabegie d’argent bénéficie en tout premier lieu aux établissements considérés comme « sensibles », et cela en pure perte depuis des années. C’est donc un secteur où l’on a pu constater que le fait d’arroger sans cesse des moyens supplémentaires n’était pas une solution.
Le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine, Samuel Paty était poignardé et décapité par un islamiste. Quatre ans après sa mort, la situation pour les enseignants s’est-elle améliorée ?
Les mesures prises dans l’Éducation nationale depuis la mort de Samuel Paty, afin de lutter contre la pression islamiste à l’école sont largement symboliques, exceptée l’interdiction des abayas en septembre 2023.
Les formations à la laïcité sont aussi insuffisantes dans ce domaine que les « cours d’empathie » face au harcèlement scolaire. Il faut des sanctions pour les élèves qui ne respectent pas le cadre fixé par la loi ; il faut exclure du système scolaire les élèves radicalisés, ainsi que l’avait proposé Gabriel Attal après la mort de Dominique Bernard – on parle tout de même de jeunes qui peuvent regarder des vidéos de décapitation, perturber les cours par des provocations, faire preuve de violence dans leur établissement, exercer une pression religieuse sur leurs camarades et leurs enseignants, mais qui restent néanmoins à l’école au milieu des autres enfants.
Il faut encore imposer l’uniforme, pour refaire des élèves qui aient une posture d’élèves (quand certains établissements sont remplis de jeunes en jogging noir et sweat à capuche noir) et pour que l’école redevienne l’école.
Dans un livre intitulé : « Le cours de monsieur Paty » (Albin Michel, 2024) co-écrit avec l’auteure Emilie Frèche, la sœur du professeur d’histoire-géographie, Mickaëlle Paty dénonce la faiblesse de l’État face au fondamentalisme islamiste. « La situation est devenue si critique que nous ne pouvons plus nous contenter de réagir aux attaques. Il nous faut désormais nous réarmer idéologiquement », a-t-elle notamment écrit. Partagez-vous cette prise de position ?
Oui, mais il faut savoir ce qu’on entend par « se réarmer idéologiquement ». En effet, s’il s’agit encore de brandir les « valeurs de la République » et la « laïcité », cela ne suffira pas à nous affirmer face à une idéologie vraiment combative et conquérante. Ces valeurs sont en effet des coquilles vides que nous agitons désespérément, à défaut d’être capables de défendre notre identité, et alors même que nous entretenons constamment un sentiment de repentance dont nos ennemis profitent largement aujourd’hui.
Le fait que le mot de « République » se substitue presque systématiquement à celui de « France » dans la bouche de nos gouvernants en dit long sur notre incapacité à assumer ce que nous sommes, à force de vouloir éviter le danger du « nationalisme ».
Face à une culture islamique archaïque et rétrograde, nous devons être fiers de notre histoire et de notre civilisation. Il nous faut aussi revendiquer notre culture chrétienne, ce qui n’est en rien incompatible avec la laïcité entendue comme liberté des religions et comme discrétion dans l’espace public, afin de rompre avec une tradition laïcarde foncièrement hostile à la religion catholique et qui n’a fait que semer le vide autour d’elle depuis son apparition, laissant toute la place à l’islam auprès de jeunes en complète perte de repères spirituels.
Au mois de mars, Le Figaro rapportait que Mickaëlle Paty avait entamé une démarche contre l’État pour qu’il reconnaisse sa responsabilité dans l’assassinat de son frère. Pour vous, l’État a une responsabilité dans la mort de Samuel Paty ?
Bien sûr, l’État est responsable. Non seulement il ne s’agit par d’un simple fait divers, ni même d’un phénomène de société. Il s’agit d’une défaillance de l’État, qui a manqué à sa mission première : assurer la sécurité des citoyens. Il a rompu le contrat social en se donnant d’autres priorités.
En effet, c’est dans le but d’obtenir la protection de l’État, et uniquement dans ce but, que nous, citoyens, acceptons de lui aliéner une part de notre liberté et de nous soumettre à la loi.
Le meurtre de Samuel Paty résulte de l’absence de soutien de sa hiérarchie, qui n’a pas agi à temps pour le protéger, mais surtout de décennies de politiques laxistes sur le plan judiciaire et migratoire. Nos dirigeants, mus par une idéologie mondialiste qui croit les individus interchangeables, ont refusé de voir le danger que pourrait constituer une immigration venue majoritairement de pays hostiles à la France et à l’Occident chrétien en général.
Sans cette idéologie, jamais Abdoullakh Anzorov et Mohammed Mogouchkov n’auraient été là pour assassiner Samuel Paty et Dominique Bernard. Les professeurs, avec la police, les pompiers et les médecins, sont les premiers sur le front dans les fameux quartiers dits « sensibles », désertés par le reste de la population autochtone. Ils représentent l’État français. Il serait temps que celui-ci les protège.
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