Si la Russie souhaite trouver du soutien face aux condamnations occidentales qui s’accumulent quant à son invasion en Ukraine, il lui suffit de parcourir l’internet chinois.
Dans l’espace en ligne chinois, étroitement contrôlé, le sentiment pro‑Moscou domine. Les célébrités qui expriment leur sympathie envers l’Ukraine sont réprimandées. Les commentaires belliqueux russes sont applaudis. Et certains internautes portent aux nues Vladimir Poutine, ce héros tenant tête à l’Occident.
L’enthousiasme s’étant au commerce électronique. Certains Chinois se sont rués sur un magasin en ligne appartenant à des Russes, qui aurait reçu l’aval de l’ambassade de Russie en Chine, et ont vidé les rayons de chocolats, de gaufres, de vodka, etc.
« Chaque chocolat est une balle tirée sur les nazis, ypa ! », a écrit un acheteur dans l’espace commentaires du magasin, une référence explicite aux propos de Poutine voulant « dénazifier » le pays.
Le point de vente, connu sous le nom de « Pavillon national russe », a vu son audience en ligne tripler en l’espace d’une journée et a reçu un total de 50 000 commandes passées depuis le 28 février, selon les médias chinois. Mercredi, une vidéo de Sergey Batsev, ambassadeur en Chine de l’organisation russe à but non lucratif Business Russia, est apparue pour remercier les « amis chinois » de soutenir son pays en ces « temps difficiles ».
« Pendant cette situation internationale compliquée et en constante évolution, nous avons vu la camaraderie de nos vieux amis chinois », a‑t‑il déclaré. « Un vieux dicton chinois dit qu’une plume d’oie envoyée de loin transmet une profonde affection. Nous chérirons cette amitié profonde dans nos cœurs. »
Pendant ce temps, des voix nationalistes sur les médias sociaux acclament le fort partenariat entre la Russie et la Chine.
« J’ai dit il y a longtemps qu’avec la Chine agissant comme un bouclier pour la Russie, toutes les sanctions occidentales seront réduites à néant », écrit un universitaire nationaliste chinois sur Weibo, le Twitter chinois. Le message est accompagné de photos qui montrent de longues files d’attente d’acheteurs devant un magasin russe du nord de la Chine. L’universitaire rajoute avoir visité deux fois le site Web du Pavillon national russe sans avoir pu trouver quoi que ce soit à acheter.
Il est difficile de savoir dans quelle mesure ces points de vue reflètent le véritablement le sentiment général de l’opinion publique chinoise, en raison de la forte censure exercée par Pékin qui réduit au silence les voix de l’autre camp.
Plusieurs acteurs chinois ont été censurés sur Weibo après avoir publié des remarques pro‑Ukraine. Des publications sur les médias sociaux d’éminents universitaires chinois opposés à l’invasion russe ont été mises hors ligne, de même que des suggestions selon lesquelles la Russie serait du côté des perdants. Une vidéo d’une vlogueuse ukrainienne populaire en Chine, qui exhortait ses fans en mandarin à « respecter les vies » et à « ne pas prendre la guerre à la légère », a été supprimé de l’internet chinois et n’est désormais consultable que sur Twitter, une plateforme interdite en Chine.
Lorsque le championnat d’Angleterre de football (Premier League) a annoncé son intention de manifester sa solidarité avec l’Ukraine ce week‑end en faisant porter aux capitaines des clubs des brassards aux couleurs du drapeau ukrainien, bleu et jaune, et en affichant sur les écrans des stades le slogan « Le football demeure solidaire » imprimé sur un drapeau ukrainien, le partenaire de diffusion chinois de la ligue a réagi en annulant la couverture prévue.
Favoriser un climat pro‑russe, ou du moins l’impression d’un tel climat, semble être le dessein de Pékin depuis le début.
Deux jours avant que Poutine ne commence à bombarder l’Ukraine, des réglementations de censure ont été dévoilées. Les médias d’État chinois ont reçu l’ordre de veiller à ce que leur contenu n’apparaisse pas comme anti‑russe ou pro‑occidental.
Comme le régime chinois refuse d’utiliser le mot « invasion » pour caractériser l’attaque de la Russie, ce mot est tabou dans la couverture des médias chinois. Lorsqu’une référence est nécessaire, les médias adoptent le terme « opération militaire spéciale » employé par Moscou ou utilisent l’expression vague de « situation actuelle ».
Lors de récentes conférences de presse et déclarations publiques, les responsables chinois ont adopté une ligne ambiguë en refusant de se positionner clairement pour l’un ou l’autre camps. Ils ont donc refusé de dénoncer l’attaque de la Russie, reconnu que la Russie avait des préoccupations légitimes en matière de sécurité tout en maintenant que la souveraineté de tous les pays devait être respectée et en appelant à un règlement pacifique de la crise. Ils n’ont pas manqué, au passage, de reprocher aux États‑Unis d’attiser la perspective d’une guerre.
Mais la machine de propagande chinoise a pris un ton plus enflammé.
Alors que la plupart des médias du pays se concentrent sur les Jeux paralympiques de Pékin, les relativement rares reportages des médias d’État chinois sur la crise ont minimisé les critiques à l’égard de la Russie. Le hashtag « plusieurs pays refusent de sanctionner la Russie », poussé par le tabloïd nationaliste Global Times, a obtenu 120 millions de vues en une journée sur Weibo.
« Russes, veuillez tirer bien à propos », a écrit dans un post un journaliste du Jinhua News, un journal appartenant au Parti communiste chinois (PCC), en apprenant que 70 Japonais s’étaient portés volontaires pour rejoindre l’armée ukrainienne.
Des blagues grossières en ligne sur l’accueil de belles Ukrainiennes réfugiées en Chine et des remarques pro‑russes ont rendu la vie des ressortissants chinois bloqués en Ukraine d’autant plus compliquée. Certains ont déclaré avoir été menacés par des Ukrainiens en colère alors qu’ils se rendaient dans des supermarchés.
La position de Pékin n’est pas passée inaperçue en Russie.
Maria Zakharova, porte‑parole du ministère des Affaires étrangères du pays, a déclaré jeudi que son ministère « appréciait la vision impartiale et sans parti pris de Pékin sur la question ukrainienne ».
La Chine « évite d’être induite en erreur par les stratagèmes occidentaux », a‑t‑elle affirmé lors d’un point de presse.
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