Les récentes modifications apportées aux lois sur l’espionnage et l’imposition d’interdictions de quitter la Chine augmentent le degré du risque pour les étrangers dans ce pays, notamment les professionnels, les cadres du milieu des affaires et les universitaires.
L’agence de presse Xinhua a rapporté que lors de la session du Comité permanent de l’Assemblée nationale populaire (ANP), les législateurs chinois ont approuvé une loi révisée sur le contre-espionnage. Cette loi entrera en vigueur le 1er juillet 2023.
Adoptée en novembre 2014, l’actuelle loi sur le contre-espionnage réglemente et « assure » la lutte contre l’espionnage en jouant un rôle important dans la sauvegarde de la sécurité nationale, a déclaré Wang Aili, membre de la Commission des Affaires législatives du Comité permanent de l’ANP.
Cette loi, qui concernait auparavant les « secrets d’État », ne définit même pas ce qui relève des intérêts nationaux de Pékin.
La loi révisée élargit la définition de l’espionnage, en précisant que des actes tels que les cyberattaques contre des organes de l’État, des organes confidentiels ou des infrastructures d’information cruciales sont considérés comme des actes d’espionnage.
Elle élargit également le champ des cibles de l’espionnage, en y incluant tous les documents, les données, les matériaux et les articles concernant la sécurité et les intérêts nationaux, a précisé M. Wang.
La loi révisée permet aux autorités menant une enquête anti-espionnage d’accéder aux données, aux équipements électroniques et aux informations sur les biens personnels, ainsi que d’interdire le franchissement des frontières de la Chine.
Cela inclut également l’accès aux téléphones mobiles et aux ordinateurs.
La récente extension vague et étendue de la législation accroît les risques pour les étrangers en Chine, en particulier pour ceux qui collectent, créent, utilisent ou traitent des données, c’est-à-dire pour de nombreux fournisseurs de services aux entreprises.
Les activités commerciales habituelles, telles que la collecte d’informations commerciales, sont potentiellement concernées.
Même avant l’entrée en vigueur de la nouvelle législation, les entreprises étrangères ont été la cible du Parti communiste chinois (PCC).
Le bureau de Shanghai de la société internationale de conseil en gestion Bain & Co a récemment fait l’objet d’une descente et son personnel a été interrogé.
Cette opération fait suite à des actions similaires menées contre Deloitte et Mintz, deux autres sociétés internationales. À Pékin, cinq employés chinois du groupe Mintz, un important cabinet d’avocats spécialisé dans l’analyse d’entreprises, la diligence raisonnable et les enquêtes sur la corruption, ont été arrêtés.
En 2013, un enquêteur d’entreprise britannique, Peter Humphrey, et son épouse américaine, qui dirigeaient ChinaWhys, une société de conseil en matière de risques, ont été arrêtés après avoir travaillé pour l’entreprise pharmaceutique GSK. Ils ont finalement été libérés après environ deux ans d’emprisonnement.
« Je sais que d’autres sociétés de conseil occidentales, plus petites, sont actuellement harcelées, ce qui n’est pas encore rapporté par les médias », a écrit M. Humphrey après l’annonce des mesures prises à l’encontre de Bain & Co.
La Chine n’a pas non plus renouvelé le statut d’entité étrangère à Wind, une société d’information qui fournit des bases de données sur les enregistrements d’entreprises, les brevets, les documents relatifs aux marchés publics, ainsi que des statistiques officielles.
Selon un nouveau rapport de l’ONG de défense des droits de l’homme Safeguard Defenders, le PCC a élargi la couverture juridique permettant d’imposer des interdictions de sortie du territoire chinois et utilise de plus en plus ces interdictions à l’encontre de tous – des défenseurs des droits de l’homme aux journalistes étrangers.
Extension du contrôle à l’intérieur et à l’extérieur du pays
Le « Trapped: China’s expanding use of exit bans » (Pris au piège : l’utilisation croissante des interdictions de sortie du territoire chinois) de Safeguard Defenders se base sur les données officielles et examine les nouvelles lois.
Il contient des interviews avec des victimes de ces lois afin d’examiner comment l’État-parti chinois recourt de plus en plus souvent aux interdictions de sortie de son territoire pour punir les défenseurs des droits de l’homme et les membres de leurs familles, retient des personnes en otage pour forcer des Chinois à l’étranger à revenir en Chine, contrôle des groupes ethniques et religieux, se livre à une diplomatie de l’otage et intimide les journalistes étrangers.
La Chine a également approuvé des amendements qui permettront d’interdire la sortie de son territoire à toute personne (Chinois et étrangers) faisant l’objet d’une enquête et considérée comme représentant un risque pour la sécurité nationale.
De 2018 à aujourd’hui, au moins 5 lois nouvelles ou modifiées ont été ajoutées à celles qui prévoyaient déjà l’utilisation d’interdictions de sortie du territoire chinois, pour un nouveau total d’au moins 15 lois.
« En l’absence de données officielles transparentes et en excluant les cas d’interdiction de sortie du territoire basés sur l’appartenance ethnique, qui se comptent par millions, nous estimons qu’au moins des dizaines de milliers de personnes en Chine font l’objet d’une interdiction de sortie du territoire à n’importe quel moment », rapporte Safeguard Defeders.
« Des dizaines d’étrangers sont également empêchés de quitter la Chine s’ils travaillent pour une société impliquée dans un litige civil. La formulation délibérément vague de la Loi sur la procédure civile signifie que des personnes qui n’ont même pas de lien avec le litige peuvent être piégées en Chine. »
L’homme d’affaires irlandais Richard O’Halloran a été interdit de quitter la Chine pendant plus de trois ans (de 2019 à 2022) parce que l’entreprise pour laquelle il travaillait était impliquée dans un litige commercial, alors qu’il ne travaillait même pas pour cette entreprise lorsque le litige a commencé.
Une autre analyse a révélé que 128 étrangers ont été interdits de quitter le pays entre 1995 et 2019.
Il est temps de revoir à la hausse les risques dans les guides du voyage
Dans certains cas, le ciblage des étrangers fait partie de la diplomatie de l’otage de Pékin, des représailles contre un gouvernement étranger ou d’une tactique visant à obtenir des concessions. Souvent, ces mesures sont plus graves comme, par exemple, la détention arbitraire.
En décembre 2018, deux Canadiens, Michael Kovrig et Michael Spavor, ont été arrêtés en Chine en représailles à l’arrestation au Canada de Meng Wanzhou, directrice financière du géant des télécommunications chinois Huawei.
Michael Kovrig était un ancien diplomate canadien et conseiller de l’International Crisis Group, Michael Spavor était un consultant travaillant sur la Corée du Nord. Ils ont été inculpés en vertu de la vague loi de Pékin sur le secret d’État.
Lorsque Meng Wanzhou a été libérée après avoir accepté un accord de poursuite différée concernant des accusations de fraude bancaire et électronique aux États-Unis, les deux Michael ont été également mis en liberté.
La réalité sous le régime chinois est le fait que les avocats, les juges et les tribunaux chinois sont ses propres agents.
Par exemple, une directive du Comité central du PCC, publiée en février, demandait aux écoles de droit, des avocats et des juges de « s’opposer et de résister aux opinions erronées occidentales telles que le ‘gouvernement constitutionnel’, la ‘séparation des trois pouvoirs’ et ‘l’indépendance du pouvoir juridique’ ».
Deux éminents avocats spécialisés dans la défense des droits de l’homme, Xu Zhiyong et Ding Jiaxi, ont récemment été condamnés à plus de dix ans de prison après avoir été reconnus coupables de subversion du pouvoir de l’État à l’issue de procès secrets.
Il n’est pas surprenant que les procès en Chine soient impartiaux avec un taux de condamnation de plus de 99% !
Depuis plusieurs années, les conseils du département d’État américain aux voyageurs en Chine avertissent que Pékin utilise les interdictions de sortie de son territoire pour « obtenir un moyen de pression sur les gouvernements étrangers ».
Le ministère australien des Affaires étrangères se contente de conseiller aux voyageurs se rendant en Chine de « faire preuve d’une grande prudence ».
Il est peut-être temps d’actualiser ces conseils pour tenir compte des risques accrus liés au voyage en Chine.
Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.
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