Fausses publicités, faux graffitis anti-Zelensky : de nombreuses publications sur internet tentent ces dernières semaines d’accréditer l’idée d’une lassitude croissante des opinions publiques en Europe et aux États-Unis à l’égard de Kiev, un narratif pro-russe désormais bien rodé.
Parmi les nombreuses allégations démystifiées par les équipes de vérification de l’AFP, des artistes de rue auraient peint à Montreuil, près de Paris, ou à Berlin des fresques murales représentant le Président ukrainien Volodymyr Zelensky en cannibale. Sous-entendu : les manifestations spontanées hostiles au président ukrainien se multiplieraient dans les pays occidentaux, dont les dirigeants soutiennent pourtant en grande majorité Kiev.
?????? Graffiti se objevilo v Berlíně a Paříži zobrazující Zelenského, jak jí své vojáky.
Zdá se, že na Západě běžný svět stále více vidí, kdo a co je Zelenskyj. pic.twitter.com/5PQZ0WUhX1
— Ing. Honza ?????? (@Honza4746) September 16, 2023
Attiser les dissensions
Reposant sur un procédé classique de la désinformation à visée politique, ces narratifs cherchent non seulement à miner ce soutien mais plus largement, à attiser les dissensions au sein des sociétés occidentales.
Autres exemples : l’entreprise française Promovacances aurait lancé un jeu concours sordide impliquant les soldats ukrainiens morts au combat, un garde du corps du président ukrainien aurait déclenché une bagarre dans un bar à New York, un panneau publicitaire dans cette même ville aurait proclamé « Gloire à l’urine » au lieu de « Gloire à l’Ukraine » dans un lapsus ridiculisant la cause ukrainienne.
Souvent aussi, ces publications affirment que des grands médias occidentaux s’en sont fait l’écho, via des montages et fausses captures d’écran utilisant leurs logos et chartes graphiques.
La campagne « Doppelgänger »
« Cette approche, qui a déjà été utilisée par le passé, comme par exemple lors qu’on voulait faire croire de Zelensky était cocaïnomane, a été relancée », souligne David Chavalarias, directeur de recherche au CNRS. « Ce sont des choses qui s’inscrivent complètement dans la campagne “Doppelgänger”, qui veulent porter l’idée d’un lâchage de l’Ukraine par la société civile », explique aussi Alexandre Alaphilippe, directeur exécutif de l’organisation européenne de lutte contre la désinformation EU DisinfoLab.
L’opération « Doppelgänger » est une campagne de désinformation dénoncée notamment par Meta (maison-mère de Facebook, Whatsapp et Instagram) et les autorités françaises, qui y voient l’action de groupes proches de la Russie. Dévoilée en 2022, la campagne, qui consiste à usurper l’identité visuelle de médias pour distiller des infox, se poursuit.
« Il y a une stratégie d’ensemble d’affaiblir le soutien extérieur à l’Ukraine » dans laquelle s’inscrivent ces tentatives, relève David Colon, professeur à Sciences Po Paris et auteur notamment de « La guerre de l’information ». « Nous avons besoin du soutien des dirigeants, voila pourquoi je suis là », a déclaré le dirigeant le 11 octobre lors d’une visite surprise à l’Otan.
L’Ukraine s’attend, comme à l’hiver 2022, à une nouvelle campagne de bombardements massifs russes sur ses infrastructures essentielle. Et alors que l’attention se fixe sur le conflit entre Israël et le Hamas, Kiev craint aussi une diminution de l’aide occidentale, cruciale pour son effort de guerre face à Moscou. Les pays de l’Otan ont assuré qu’ils ne faibliraient pas dans ce soutien.
« Le Kremlin est en train de capitaliser sur la fatigue du conflit, l’apathie, mais aussi l’euroscepticisme et les craintes des sociétés d’Europe de l’Ouest et centrale », explique à l’AFP Ruslan Trad, du laboratoire d’analyse numérique de l’Atlantic Council (DFRLab).
Il relève qu’il y a depuis plusieurs mois « une augmentation visible de la propagande russe en Europe », par rapport aux premiers mois de 2022 et les débuts de la guerre, quand « Moscou se préoccupait plus de l’Afrique », un de ses terrain d’action prioritaire en matière de désinformation.
Pour atteindre ses objectifs, « le Kremlin ne réinvente pas la roue », souligne le Docteur Adam Lelonek, coordinateur régional pour l’Europe centrale et de l’Est du Beacon Project du centre de réflexion américain IRI, insistant sur les dynamiques nationales propres à chaque pays sur lesquelles joue la Russie pour saper le soutien à Kiev. « La Russie est concentrée sur le temps long », rappelle-t-il. « Elle tire profit de décennies d’activité informationnelle », capitalisant que « la peur d’une potentielle escalade du conflit avec l’Otan » ou « les théories du complot qu’elle amplifie », souligne-t-il.
Comment pouvez-vous nous aider à vous tenir informés ?
Epoch Times est un média libre et indépendant, ne recevant aucune aide publique et n’appartenant à aucun parti politique ou groupe financier. Depuis notre création, nous faisons face à des attaques déloyales pour faire taire nos informations portant notamment sur les questions de droits de l'homme en Chine. C'est pourquoi, nous comptons sur votre soutien pour défendre notre journalisme indépendant et pour continuer, grâce à vous, à faire connaître la vérité.