Rattrapé par les polémiques et les accusations de harcèlement moral et sexuel, le président de la Fédération française de football (FFF) Noël Le Graët a démissionné mardi, après un règne de 11 années et plusieurs mois d’obstination qui ternissent son bilan.
Au siège de la « 3F », une large page du foot français se tourne avec le départ de l’homme d’affaires de 81 ans — président de la Ligue professionnelle dès 1991 (jusqu’en 2000) avant de prendre la tête de la FFF en 2011 —, fragilisé depuis des mois par une mission d’audit accablante et plusieurs dérapages.
Toujours aussi imprévisible et insondable, le « Menhir » du foot français a tardé pour passer la main, 13 jours après la communication d’un rapport d’audit diligenté par le ministère des Sports. Mais les conclusions de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) ne laissaient aucune marge de manœuvre au Breton, lâché depuis des mois par la ministre des Sports Amélie Oudéa-Castéra, pour qui « le statu quo (était) impossible ».
Selon les inspecteurs, Le Graët « ne dispose plus de la légitimité nécessaire pour administrer et représenter le football français », compte tenu notamment de son « comportement inapproprié (…) vis-à-vis des femmes ». « NLG » est aussi visé depuis mi-janvier par une enquête pour harcèlement moral et sexuel.
Au siège parisien de la FFF, qu’il dirigeait depuis 2011, Noël Le Graët a prévenu le comité exécutif de sa démission lors d’une réunion cruciale pour l’avenir du football français. Autour de la table, les membres de ce « gouvernement » fédéral lui ont rendu « un hommage », selon un membre de ce « Comex », avant de tirer un bilan de l’audit de l’IGESR. Celui-ci épinglait aussi l’instance pour sa politique de lutte contre les violences sexistes et sexuelles, qui « manque d’efficacité et d’efficience » selon les inspecteurs.
Dans un communiqué, la FFF a ainsi dénoncé un rapport d’audit ayant « parfois conduit à un dénigrement disproportionné de l’instance », regrettant un « défaut de réelle procédure contradictoire ». La FFF rejoint ici son ex-président : lui aussi avait critiqué via ses avocats une mission d’audit « aux allures de réquisitoire », soumise « à une pression politique et médiatique qui n’ont pu que la biaiser ».
Vers la reconstruction
Pour son avenir à la « Fédé », l’ancien maire de Guingamp a néanmoins dû se rendre à l’évidence : son « Comex », autrefois si fidèle, ne le soutenait plus, même si la FFF a tenu à saluer mardi « le bilan sportif et économique remarquable de Noël Le Graët », l’homme du redressement de la « 3F » après le scandale du Mondial-2010 en Afrique du Sud. « C’est un grand dirigeant, la fédération est l’une des fédérations les mieux gérées », avait souligné Jean-Michel Aulas, membre influent du Comité et président de Lyon, quelques minutes avant la réunion.
La démission de Le Graët permet au vice-président Philippe Diallo d’assurer l’intérim à la présidence « jusqu’au 10 juin 2023, date de la prochaine assemblée fédérale », selon la FFF. Plusieurs sources internes le verraient même prolonger son intérim au-delà. La reconstruction de la FFF peut désormais s’ouvrir, et elle sera sans doute agitée. Le président de la Ligue de Paris-Île-de-France, Jamel Sandjak, a déjà accentué le flou en démissionnant ces derniers jours du comité exécutif.
Beaucoup lui prêtent des ambitions présidentielles et rappellent qu’une Assemblée générale peut, statutairement, être convoquée par le quart de ses membres, composés de délégués des clubs, Ligues et districts locaux. Cette hypothèse pourrait conduire à la révocation du Comex. Mais, mardi, aucun autre membre n’a souhaité démissionner de manière individuelle, ont précisé plusieurs participants.
Au coeur de ces débats, l’état-major de la « Fédé » devait aussi se positionner en cours de journée sur un cas très inflammable, celui de l’équipe de France féminine et de sa sélectionneuse Corinne Diacre, fragilisée après la mise en retrait de ses trois joueuses phares Wendie Renard, Kadidiatou Diani et Marie-Antoinette Katoto, qui critiquent son management.
À cinq mois de la Coupe du monde en Australie et en Nouvelle-Zélande (20 juillet – 20 août), la crise est insoluble. Donner raison aux joueuses en écartant Diacre reviendrait à leur donner le pouvoir, une dangereuse jurisprudence. Mais l’inaction face à une fronde inédite réduirait sans doute à néant les chances de titre en Océanie.
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