La fin d’une ère pour l’exploitation des sables bitumineux canadiens

15 décembre 2016 07:48 Mis à jour: 14 décembre 2016 11:51

Les beaux jours des investisseurs plaçant de l’argent dans des projets d’exploitation de sables bitumineux à ciel ouvert, avec l’espoir de décennies de gain sont probablement passés. C’est ce que pensent plusieurs analystes, en dépit de la réduction de la production des pays de l’OPEP.

L’exploitation de sables bitumineux est par nature un projet à long terme. Cela exige beaucoup d’argent au démarrage pour un rendement stable sur potentiellement des décennies. Mais les projets d’huile de schiste aux États-Unis offrant des rendements presque immédiats, enlèvent toute perspective à de nouveaux projets pour le sable bitumineux, d’après ce que disent des analystes tels que Jackie Forrest, vice-présidente de la recherche en énergie chez ARC Financial Corporation.

« Même avec des prix élevés du pétrole, il y faut conserver beaucoup de prudence à cause des incertitudes entourant la volatilité des prix », a-t-elle dit.

Au lieu de cela, l’investissement se déplacera vers des projets de rachat ou d’agrandissement, annonce Mme Forrest. Ces petits investissements supplémentaires permettront de faire évoluer les projets existants et l’infrastructure qu’ils utilisent pour convertir les installations d’exploitation des sables bitumineux en exploitation de pétrole brut directement.

La décision de l’OPEP de réduire la production de 33,8 millions à 32,5 millions de barils par jour au cours de la nouvelle année a renforcé ce sentiment dans le secteur. Les investissements iront plus facilement aux projets de schistes bitumineux rentables des États-Unis, note Nathan Nemeth, adjoint de recherche pour l’entreprise d’analyse de risque Wood Mackenzie.

La réduction de la production, cependant, devrait aider à fixer la volatilité des prix et résoudre le problème de capacité excédentaire créant des réserves de pétrole croissantes. Reste à savoir si les Saoudiens et les autres membres de l’OPEP tiendront leur promesse de réduction.

« Si elle se concrétise, cela aidera au rééquilibrage entre l’offre et la demande », a déclaré M.Nemeth.

La dynamique du marché pétrolier a changé de façon spectaculaire avec l’avènement de l’huile de schiste.

– Matthew Foss, ministère de l’Énergie de l’Alberta

Quand les sables bitumineux s’adaptent

Les sables bitumineux du Canada ont leur propre rôle à jouer. En raison de la nature à long terme des projets de sables bitumineux, une grande partie de l’argent investi dans les mégaprojets a encore un impact, a déclaré Mark Oberstoetter, gestionnaire principal responsable de la recherche d’exploration et de production à Wood Mackenzie.

« Le secteur va continuer à croître dans les prochaines années », a-t-il dit.

Mais ce qui va être décisif, c’est le comportement de producteurs comme ConocoPhillips et Devon Energy qui ont des enjeux autant dans les sables bitumineux et dans le schiste américain. Ils concentrent leurs nouveaux investissements dans le pétrole de schiste au sud de la frontière où les projets sont moins chers, les retours sur investissements plus courts.

Même si les projets de sables bitumineux peuvent éventuellement fournir du pétrole pour un prix aussi bas que 7.5€ le baril, cela prend des années. Et peu d’investisseurs pensent qu’ils ont ce genre de temps devant eux. Les coûts par baril à vie sont également plus élevés que la plupart des projets de schistes, selon les analystes.

Lorsque le prix du pétrole a chuté en 2014 suite à la décision de l’Arabie Saoudite d’inonder le marché et de renverser la révolution du schiste aux États-Unis avant que cela ne prenne trop de parts de marché, la plupart des projets d’exploitation de sables bitumineux terminés à moins de 60% ont été abandonnés.

Une des particularités de la production des sables bitumineux est qu’une fois qu’un projet a commencé et que le gisement souterrain a été chauffé et préparé pour l’extraction, l’arrêt peut causer des dommages irrémédiables au réservoir. Le vœu des entreprises désireuses de voir les pertes à court terme compensées par la perspective de l’augmentation des prix, pourra peut-être mettre des décennies à se réaliser.

Des pipelines

La production actuelle continuant de croître, les producteurs canadiens ont besoin de plus gros pipelines pour alimenter les raffineries du Midwest américain et de la côte du Golfe qui ont été réaménagées, à coup de milliards de dollars, pour utiliser le pétrole canadien pour ne pas avoir à utiliser le transport par camion.

L’Association canadienne des producteurs pétroliers affirme que les pipelines existants fonctionnent déjà proche de leur capacité maximale de 4 millions de barils par jour. Les pipelines devront se développer pour accueillir 850 000 barils supplémentaires par jour d’ici 2021 et 700 000 barils supplémentaires d’ici 2030.

Cette augmentation de capacité sera renforcée par la récente approbation par l’Ottawa du projet d’agrandissement du pipeline Trans Mountain. Après avoir franchi plusieurs obstacles, y compris les contestations judiciaires, avant de devenir une réalité, il amènera 590 000 barils de plus par jour d’Alberta jusqu’aux pétroliers et autres pipelines près de Vancouver en Colombie Britanique.

Mais la plus grande demande se trouve toujours sur la côte du golfe du Texas, où les raffineries ont besoin du pétrole brut lourd du Canada.

Mais Matthew Foss, économiste en chef de l’énergie au ministère de l’Énergie de l’Alberta, note que les milliards investis pour rendre compatible les raffineries à l’utilisation du pétrole lourd pourraient être investis pour les modifier à nouveau vers d’autres types de pétrole. Le temps est un facteur important.

Comme les autres, il ne prévoit pas un retour aux énormes investissements dans les sables bitumineux comme avant 2014.

« Toute la dynamique du marché pétrolier a changé de façon spectaculaire avec l’avènement de l’huile de schiste », a-t-il dit.

Auparavant, les investisseurs envisageaient un approvisionnement fini et en baisse, ce que l’on appelle le «pic pétrolier».

« Nous sommes actuellement beaucoup plus préoccupés par le pic de demande dans le monde », a déclaré M. Foss.

En fait, Foss note avec intérêt que les voitures électriques, le potentiel que représente les véhicules autonomes partagés et les batteries de la prochaine génération pourraient tous avoir un impact imprévisible sur la consommation d’énergie.

«Il y a beaucoup de questions à ce sujet », a déclaré Foss.

Version anglaise : End of an era for Canada’s oilsands

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