EUROPE

Glyphosate: un nouveau vote en novembre suite à l’échec des Vingt-Sept à s’entendre

octobre 13, 2023 17:30, Last Updated: octobre 13, 2023 17:36
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Les Vingt-Sept ont échoué à s’entendre vendredi sur la proposition de Bruxelles de reconduire pour dix ans l’autorisation du glyphosate dans l’UE, la France s’étant notamment abstenue, ce qui conduira à un nouveau vote courant novembre sur le sort de l’herbicide controversé.

La Commission européenne proposait de renouveler son feu vert jusqu’à décembre 2033 après le rapport d’un régulateur européen estimant que le niveau de risque ne justifiait pas d’interdire la substance. Lors d’un vote à huis clos des représentants des États membres dans le cadre d’un comité technique, la majorité qualifiée requise pour valider le texte — soit 15 États sur 27, représentant au moins 65% de la population européenne — n’a pas été atteinte, a annoncé l’exécutif européen.

Si nombre de pays du Sud et de l’Est soutiennent la ré-autorisation, l’Autriche et le Luxembourg avaient fait part de leur volonté de voter contre. La Belgique et les Pays-Bas avaient indiqué s’abstenir. Enfin, conséquence des divisions de la coalition au pouvoir à Berlin, l’Allemagne s’est abstenue, tout comme la France, insatisfaite de la proposition de Bruxelles.

Une proposition en contradiction avec la restriction française

« On a dit, depuis le début, que la proposition telle qu’elle est formulée, dix ans sans conditions, ne correspondait pas à la trajectoire » décidée par la France depuis plusieurs années, qui est de « restreindre les usages là où il y a des [options] alternatives pour qu’il y ait moins de glyphosate », a expliqué à l’AFP le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau.

Première puissance agricole de l’UE, la France plaide pour que sa démarche soit « harmonisée au niveau européen » pour éviter toute concurrence déloyale. Bruxelles avait amendé sa proposition, notamment en réduisant « la dose maximale par hectare, mais cela ne suffit pas. La proposition est toujours moins disante par rapport aux mesures mises en place en France », a souligné le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu. La Commission a évolué « seulement de manière extrêmement cosmétique », a regretté de son côté l’eurodéputé macroniste Pascal Canfin.

Alors que l’avis du régulateur européen EFSA laisse « suffisamment de zones grises pour créer des interrogations (…)  il faut restreindre les utilisations partout où c’est possible, et s’en donner les moyens », plaide-t-il. Parallèlement, un projet de législation européenne fixant des objectifs contraignants de réduction des pesticides est en cours de négociations.

L’autorisation actuelle du glyphosate dans l’UE, renouvelée en 2017 pour cinq ans puis étendue d’une année supplémentaire, expire le 15 décembre. Si aucune majorité qualifiée en faveur du texte ne se dégage vendredi, un autre vote interviendra autour de mi-novembre. D’ici là, la Commission peut modifier sa proposition à tout moment. Mais s’il n’y a toujours pas de majorité suffisante pour la soutenir, l’exécutif européen pourra alors décider seul de prolonger l’autorisation — seule une majorité qualifiée d’États opposés au texte pouvant permettre de le bloquer.

Selon Pascal Canfin, « la France et l’Allemagne ont eu des discussions assez nourries depuis plusieurs semaines » et pourraient rapprocher leurs positions respectives. Le sujet devrait s’inviter lundi au menu d’une réunion des ministres européens de l’Environnement à Luxembourg. Le glyphosate, substance active de plusieurs herbicides — dont le Roundup de Monsanto, très largement utilisé dans le monde — avait été classé en 2015 comme « cancérogène probable » par le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé.

Garde-fous de Bruxelles

À l’inverse, en juillet, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a indiqué n’avoir pas identifié de « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l’environnement susceptible d’empêcher l’autorisation de l’herbicide, tout en reconnaissant un manque de données.

Bruxelles propose quelques garde-fous, notamment avec l’établissement « par défaut » de « bandes-tampons » et des équipements réduisant les « dérives de pulvérisation », tandis que l’usage pour la dessiccation (épandage pour sécher une culture avant récolte) serait interdit.

Si la substance active est approuvée au niveau de l’UE, chaque État reste chargé d’autoriser les produits contenant du glyphosate, en fixant les règles d’utilisation selon les cultures, conditions climatiques et spécificités géographiques – et peut donc adopter des restrictions selon les effets potentiels sur l’environnement et la biodiversité. D’éventuelles limitations jugées très insuffisantes par une partie des États. ONG et élus écologistes continuent pour leur part de réclamer une non-reconduction pure et simple de l’herbicide.

Le groupe allemand Bayer, qui avait racheté Monsanto en 2018 et fabrique le Roundup, affirme de son côté « rester confiant que, dans la prochaine étape, suffisamment d’autres États membres soutiendront le renouvellement de l’approbation du glyphosate », se disant « convaincu de sa sécurité ».

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